offrandes et à servir aux sacrifices, ou peut-être à exposer aux yeux du peuple, dans les
panégyries solennelles, la bari du dieu adoré dans le sanctuaire.
On se souvient que les plans des temples du soleil sculptés dans les hypogées de Tel-el-
Amarna, sous le règne d’Aménophis IV (Khouenaten, xvur dynastie)? offrent une représentation
de ces:autels chargés de victuailles et de fleurs.
On voit encore, à l’extrémité du dromos du grand temple situé au nord de l’Ammonium dé
Karnac, une plate-forme précédée de gradins, qui a dû servir autrefois d’autel sub dio. La
main des hommes, bien plus que les ravages du temps, en a fait disparaître tous les ornements ;
mais ce qu’il en reste prouve que, contrairement à toutes nos idées, ces magnifiques dromos
avaient souvent une autre destination que celle d’avenue du temple : ils rattachaient au sanctuaire
l’autel isolé.
Voulant m’assurer de la manière dont ces autels extérieurs avaient pu être décorés,
j’entrepris des fouilles à l’extrémité du dromos occidental de l’Ammonium de Karnac, où l’on
apercevait encore une plate-forme de l/im,70 de longueur sur 13m,50 de large, située à 80 mètres
environ des pylônes inachevés. En peu de temps, je mis à découvert les larges marches qui, du
dromos, conduisaient à cette plate-forme élevée par Rarasès et qui était ornée, de chaque côté de
l’escalier, de deux lions et de deux obélisques, érigés par Menephtah-Séti II. Les obélisques, de
3m,80 de hauteur, étaient brisés par le milieu, les lions étaient mutilés; mais en les remettant,
dans mon dessin, sur leurs bases restées en place, j’obtins, sans effort, la restauration' de cette
partie des édifices dont j’avais sous les yeux le dernier spécimen complet. En effet, à quelques
pas derrière la plate-forme, gisait dans les décombres un cube de granit ayant sur ses quatre
faces la forme d’un naos, et qui a dû recevoir la bari qu’on voit figurer sûr un des pylônes du
temple. L’esquisse que je publie ici donnera une idée des autels réservés pour les grandes
expositions du tabernacle quand on l’offrait à l’adoration de la multitude.
Ce dromos, comme on le voit, n’a donc jamais servi d’entrée, même aux rois. Selon moi,
c’était une avenue divine allant du sanctuaire des initiés à l’autel populaire. L’entrée royale des
grands temples était celle qu’on admire aujourd’hui au sud, et que décore une longue suite de
propylées ornés de statues et de mâts.
Je serais tenté de croire qu’il en était ainsi dans tous les grands temples, et cette idée me
paraît avoir été adoptée par les premiers chrétiens de la vallée du Nil. En effet, la plupart des
églises de la Nubie ont deux portes latérales, et presque toujours celle du milieu est murée ou à
demi fermée.
A l’imitation des Égyptiens, les juifs avaient placé devant leur temple, en face de la porte
d’entrée, un autel pour les holocaustes. C’était là où coulait le sang des victimes, où flambait le
feu perpétuel des sacrifices. Leurs colonnes, nommées J a k in et B o a z, placées devant l’entrée du
temple, ne devaient rien soutenir, comme celles de la cour de Karnac et du dromos du temple
de Khons. Elles étaient unies aussi l’une à l’autre par une guirlande de grenades, comme les
Égyptiens reliaient souvent leurs colonnettes par une guirlande de feuilles.
T y p e s d e Sph in x . — De divers monuments.
L’Égypte, avec ses divinités hybrides et ses hiéroglyphes, était la terre métaphorique par
excellence ; il est donc probable que c’est à son génie plutôt qu’aux traditions assyriennes qu’est
due l’invention des types divers de sphinx.
Cependant on ne sait pas précisément à quelle époque il faut faire remonter l’origine du
•sphinx : il ne reste comme preuve de son emploi^ sous les dynasties de l’ancien Empire, qu’une
inscription du musée de Kaire, citée par M. Mariette, et qui attribue à Schoufou la restauration
•d’un temple situé à l’endroit où ëst le sphinx. Je n’ai pu voir cette inscription, dont la date n’est
pas certaine. • f
Les divers types de sphinx ne commencent, réellement, à paraître sur les monuments qu avec
la x v i i i0 dynastie ; mais ils sont, par contre, très-fréquemment en usage, et il n est pas rare de
rencontrer des allées entières de sphinx ornant les deux côtés des dromos qui aboutissent aux
temples des principaux dieux.
Les sphinx représentés dans les bas-reliefs offrent beaucoup plus de variétés que ceux
•sculptés en ronde bosse. J’ai essayé d’en réunir les principaux types, dans la planche
ci-jointe; je les ai disposé pour plaire à l’oeil, et non dans l’ordre logique où il conviendrait
dé les décrire.
Le n° 1 offre un sphinx accroupi, copié sur un bas-relief des ruines d’Erraent ; il est de la
je vin0 dynastie. On rencontre quelquefois des figurines, de ce genre , en terre bleue imitant
le lapis.
Les n°* 2 et 3 sont des hiéracosphinx sculptés sous Aménophis II à Karnac. Le n° 2 se voit
dans les pronaos du temple d’Ombos : il est coiffé du pschent orné del ureus, et porte la légenge
de Haroôri, seigneur .d’Ombos, le dieu grand, auquel toute la partie gauche du temple était
consacrée'. Il était frère d’Osiris et d’Isis. Cette forme symbolique du dieu Haroëriest 1 origine de
l’animal fantastique, Consacré par les Grecs à leur Apollon, le G riffon, monstre formé de la
réunion d’une tête d’oiseau de proie avec le corps d’un lion.
Le n° h est un joli sphinx ailé qui représente la fameuse reine ïïatasou ; il est sculpté de la
grandeur de mon dessin sur un petit coffret de la nouvelle collection du Dr AbbotL II
-offre la plus grande ressemblance avec le sphinx sculpté sur la base d’une statue d’Horus qui se
voit au musée de Turin. ■
Le n° 5 est un sphinx ailé, sculpté sur un vase du gynécée de Ramsès III à Médinet-Thabou.
•On en voit de semblables à Karnac.
Le n° 6 représente Aménophis III sous làvforme d’un sphinx debout, et foulant sous ses
pattes des prisonniers africains et asiatiques. Ce sujet, ainsi que celui que présente le n° 7, se
trouve sculpté avec une finesse admirable sur l'accoudoir du trône où siège le pharaon recevant
les hommages et les comptes de rihtëndant des domaines, Chamhati.
Le n° 8 est un bas-relief qui représente Psammétik Ier ou peut-être Apriès, suivant que le
•cartouche est un prénom ou un nom : ces deux pharaons sont en effet de la même dynastie
(xxvi°), et ayant eu un cartouche commun. li a été relevé sur les restes dun petit édifice situé
-au sud du bassin du grand temple de Karnac.
Le n° 9 est un sphinx divin, sculpté sur un bloc utilisé depuis dans les masures de la ville
d’Esné. Il représente le dieu Hake adoré dans cette localité. Ce bas-relief, d un style assez pur,
d’un travail assez soigné, ne peut donc pas dater de l’époque romaine ; il doit appartenir aux
-dernières dynasties autochthones.
A n im a u x ; r a c e s o v in e e t b o v in e . — Musée du Kaire. — Grandeur d'exécution.
(Voir au chapitre : Bas-reliefs, pages 239 et suivantes.)