ailleurs, ne rend témoignage que des premiers pas dans l’architecture monumentale en
p ierre, nous ne saurions oublier que l’architecture en bois était déjà bien développée
à l’époque de la construction en p ie rre , puisque le fait est prouvé par les représentations
de colonnes en bois, parfaites, qui se trouvent dans les tombeaux contemporains
des pyramides.
Le désir de la variété, du contraste, si l’on aime mieux, fait que l’on recherche
davantage les grandes masses architecturales dans les pays plats que dans les pays accidentés
; car dans les endroits montagneux ces masses ne p ourraient pas lu tte r avec les
masses na ture lle s; et, où il y a des collines, celles-ci, comme c’est le cas avec les acropoles
grecques, élèvent naturellement les temples en leu r p rê tan t une base plus ou
moins considérable, tandis qu ’en Égypte et en Assyrie, il fallut, ou élever artificiellemen
t cette base et l’édifice qui la couronne, ou faire l’édifice plus h au t pour q u ’il pût
se passer de base; d é p lu s , en Égypte, les deux chaînes de montagnes, qui bordent la
vallée du Nil, pouvaient bien en tra în e r à ériger, par imitation, deux autres chaînes de
grands monuments aux bords du fleuve, afin d’interrompre ainsi l’uniformité de cette
vallée, si large, e t par trop peu ondoyante pour sa la rg e u r; car les villes et les temples
é ta ien t bâtis, pour la plupart, aux limites de l’inondation afin qu ’il ne fût rien perdu
d e s te rre s fertiles, e t qu’on pût mettre les fondations des édifices à l’abri des eaux.
Ajoutons qu ’en Égypte, dès les premiers temps historiques (qui commencent avec
Ménès), la société paraît être déjà b ien formée et bien réglée, e t que cette circonstance,
jo in te à la facilité de se p rocurer les choses nécessaires aux premiers besoins de la vie,
dans un pays Rqssi fertile, ayant dû avoir fait augmenter considérablement la population,
il y avait suffisamment de forces matérielles pour exécuter ces ouvrages, quelque
surprenants qu’ils fussent par leurs masses. En outre, plus tard, sous d’ambitieuses
dynasties, les Égyptiens (qui nous apparaissent, alors, comme conquérants e t comme
ayant profité de succès poursuivis bien au delà de leurs frontières)| durent, et accroître
leurs richesses domestiques par les tributs des peuples soumis, en même temps que les
triomphes de la guerre leu r fournissaient aussi, dans les vaincus, des ouvriers, des
manoeuvres; et se sen tir inspirés du désir de manifester la gloire de leu r nation dans
toute l’étendue du pays.
Voici les raisons principales pour lesquelles, selon nous, la tendance d’en imposer
par les masses architecturales, commencée p a r les pyramides, non-seulement,
n ’a jamais fléchi ; mais, au contraire, a toujours augmenté, et a a tte in t son apogée
dans l’intervalle qui sépare la x v i i i0 dynastie de la.xxi*, temps qui coïncide avec la plus
b rillante époque de l’archite cture grandiose de ce peuple.
Il faut pourtant bien se garder de confondre ce qui est massif avec le caractère du
colossal. Tous deux, -il est « a i , ont beaucoup de points de ressemblance; mais les
masses en elles-mêmes n e donnent que la conscience des forces matériel es, tandis que.
par lui-même, au contraire, le colossal est u n caractère d 'a rt dont 1 effet sm le sp ! S
teu r doit surpasser l'action des moyens par lesquels l'oeuvre a.¿te produite : Ici, c est
donc l’apparence optique qui décide, parce que nos yeux, habitués dans la vie oïdinai
à la vue perspective, transportent cette habitude à la contemplation des oeuvres d a rt, et
n ’aperçoivent plus les détails dans les objets éloignés; ce qui fait que nous éloignons
et, par cela, nous agrandissonsinvolontairement les objets dont nous ne voyons pas 1
d étails; tandis que, d’un autre côté, les contours des objets naturels devenant moin
déterminés, au fu r e t à mesure qu’ils s’éloignent, l’oeuvre d’a rt peu éloignée conserv
son contour bien accusé, et, par cela, doit nécessairement g ran d ir, dans notre imag -
n a tio n /p o u r que les- limites de ses formes précises puissent être mises en harmoni ,,
avec le manque de détails.
Pour éveiller l’idée abstraite d u colossal, il faut donc que les masses, bien et
ment accusées, l’emportent sur le fini des détails. C’est ce qui se p roduit dans les
oe u v r e s plastiques,êgyptienùes q u i,ÿ êm e quan d elles sont d’un e petite d.mension, ont
encore u n aspect de g randeur; c’est ce qui arrive aussi dans l’archite cture égyptien ^
où c’est toujours la disposition des grandes m asses qui prévaut su r le détail,
e t le m odèle immédiat d’où dérive ce caractère du colossal sont les pyramides. ^
Mais le caractère du colossal a sa contre-partie, très-difficile à éviter : c e s t le
caractère, l’aspect du lo u rd ; et les Égyptiens fu ren t enclins d’au tan t plus a tomber
dans ce défaut, que leu r architecture lib re, en p ie rre , se ra tta ch ait p a r trop de liens a
sa-génératrice, c’e sU -d ire à l’architecture creusée ou hypogéenne; en effet, les hens
en tre ces deux genres d’a rt, é taient si fortement établis que 1 influence de la legere
architecture en bois, quoique assez puissante pour les formes, n e parvint pas a les rompre
pour les proportions. . __
Un autre caractère de l’a rchitecture en p ie rre , dont on doit aussi faire remonter
l'origine aux pyramides e t aux hypogées, est celui du sombre, du sérieux, du mystique.
Il est tout .naturel que ce caractère convint parfaitement aux pyramides e t aux tombeaux
; mais convenait-il de même aux temples considérés comme vraies demeures des
dieux, e n même temps que de leurs animaux sacrés î. . . . . «
Il y a u n fait qui parait contribuer à l’explication de cette contradiction. Sui les
tablettes funéraires e t dans les tombeaux datant des douze premières dynasties, qui
nous o n té té conservés (et le nombre en est grand), nous ne trouvons pas de représentations
des dieux, alors que ces représentations abondent sur les monuments analogu
du nouvel empire pharaonique : ainsi, tandis que dans les premiers î y a ou