Une autre peinture très-curieuse, découverte également à Thèbes, sur les parois du splendide
tombeau deRekchara ou Rekhmara, c’est-à-dire, littéralement, savant comme le soleil, nous montre
ces prisonniers occupés à puiser l’eau, à pétrir la terre, à en former des briques, à les transporter
et finalement à construire les murs d’un temple d’Amon. Les ouvriers occupés d e là partie la
plus difficile de l’oeuvre, sont Égyptiens, ainsi que d’autres employés comme conducteurs : armés
de bâtons, ils surveillent le travail dès étrangers, fort reconnaissables d’ailleurs à leur teint
clair et à leur physionomie particulière. L’inscription, du reste, nous apprend que ce sont des
« captifs pris par Sa Majesté pour faire les constructions du temple de son père Amon à Thèbes. »
Tous les pharaons qui signalèrent leur règne par des campagnes en Asie et en Afrique utilisaient
ainsi les vaincus, et ce que les prisonniers de guerre de Thoutmès III furent contraints
défaire, vers l’an 1600 avant notre ère, devait se répéter, à peu près deux siècles plus tard,
alors que Ramsès II utilisa ses prisonniers juifs en les forçant à fabriquer des briques pour bâtir
les citadelles de Pithom et de Ramsès. On croirait que cette planche est le commentaire de l’histoire
dè la servitude des enfants d’Israël en Ëgypte : tellement on y reconnaît la vérité de la
description donnée par l’auteur du Pentateuque.
« Et les Égyptiens faisaient servir les enfants d’Israël, avec rigueur, tellement qu’ils leur rendirent
le vie amère par une rude servitude en les employant à faire du mortier, des briques et
toutes sortes d’ouvrages qui se font aux champs. »
Éternelle compensation des destinées humaines! Depuis la fin de la monarchie de Menés*
les Égyptiens, à leur tour, travaillent sans répit et sans trêve sous le fouet des Asiatiques sortis de
l’Arabie, du Caucase ou de la Mongolie !
Joueuse d e mand o re. — Nécropole de Thèbes. — x v in * dynastie.
Jeune fille jouant de la mandore (ou mandole à long manche). La partie inférieure est détruite.
Ce buste charmant, dont ma planche n’a pas rendu toute la grâce, nous offre le portrait
d’une des suivantes de la nourrice d’Aménophis II. On le trouve conservé sous le même édicule
que celui de sa maîtresse, qui est représentée portant, sur ses genoux, le jeune pharaon.
Il y a plus de natuiel dans la figure, plus de souplesse dans les contours et plus de grâce dans
la pose qu’on n’en trouve ordinairement dans les' peintures égyptiennes. Les deux mamelons
sont bien indiqués, particularité que je n’ai jamais rencontrée ailleurs. Cette remarque s’applique,
également, aux cheveux qu’on ne trouve jamais aussi bien représentés. L’artiste paraît
s’être, ici, volontairement, départi des inconséquences du tracé hiératique et s’être particulièrement
complu à reproduire avec exactitude cette figure naïve et douce qui ressemble encore,
par l’expression et le caractère général, aux jeunes Égyptiennes d’aujourd’hui.
In t é r ie u r d ’un tombeau d e l a v a l l é e d ’E l -A s s a c if . — Thèbes.
Réprésentation peinte d’un tombeau de cette vallée si riche en monuments funéraires.
J’ai donné cette belle planche pour démontrer une fois de plus l’importance qu’offre au point de
vue des moeurs et des coutumes les représentations peintes des hypogées.
Pour le détail de la construction des tombeaux, consulter la planche de la page 378.
Pl a n t e s e t f l e u r s . — De divers monuments.
Les artistes égyptiens, qui avaient saisi avec tant de vérité le caractère de tous les animaux,
n’ont jamais su, exactement, peindre les arbres, ni même les fleurs; aussi sont-ils restés dans ce
genre de dessin, pourtant si facile, tout à fait aux parties rudimentaires de l’art. Je ne connais
qu’une seule représentation qui fasse exception : c’est celle d’un bouquet d’ombelles de papyrus
peint avec une vérité étonnante. Ce beaulspécimen, qui montre jusqu’où les Égyptiens auraient
pu parvenir, est d’autant plus précieux que les botanistes ignorent aujourd’hui maintes particularités
sur cette espèce de Cyperus qui a disparu depuis longtemps des rives du Nil : des
circonstances particulières m’ont empêché de le reproduire.
Le n° 1 représente une ombelle de plante papyriforme peinte dans un hypogée d el-Bauaba
à Thèbes. Ce qu’elle offre de plus remarquable, c’est une espèce de limace rampant sur sa
tige. Cet animal, qui représente dans l’alphabet hiéroglyphique le son F.,. avait été considéré par
tous les égyptologues, au premier abord, comme un céraste, sans doute parce qu il a des yeux,
tandis que ceux de la limace sont à l’extrémité de ses cornes; mais les autres caractères du
serpent spécial à l’Égypte faisant complètement défaut, il y a lieu de penser simplement que
l e s a r t i s t e s égyptiens n e s ’e n sont pas préoccupés.
Le n° 2 représente une ombelle de papyrus peinte dans un hypogée de la nécropole de
Thèbes, sur l’emplacement désigné par le nom de Cheikh Abd el-Gournah. C est la seule plante
qui se présente avec un cao.het de vérité irrécusable.
Dans le n° 3 j’ai voulu représenter, sous une forme plus saisissable, les ombelles de
papyrus qu’on voit peintes, dans l’intervalle de deux feuilles chevronnées sur les bases des
grandes colonnes de Karnac.
Les.n°* A et 5 sont des fleurs peintes dans les hypogées.
Les n°* 6, 7 et 8 offrent des plantes peintes dans le tombeau de Ramsès III, ou dans un petit
hypogée de la même époque situé dans la vallée des Reines : les mêmes plantes se rencontrent
dans ces deux hypogées, et les numéros d’ordre ayant disparu des calques, je n’ai pu les distinguer.
P o r tr a it d e R amsès-Meïam o un. x ix ° dynastie.
Ce beau portrait de Ramsès le Grand a été copié, en 18A3, dans un petit hypogée qui se
trouvait situé derrière le Ramesseum, et qui a entièrement disparu aujourd hui sous le pic es
fellahs pour alimenter les fours à chaux de Kéné : heureusement il se trouve encore un portrait
absolument semblable sur la paroi intérieure du mur méridional de la salle hypostyle de
Karnac. Le roi est représenté avec la tresse pendante dont l’extrémité se termine par une grosse
boucle qu’on sait avoir été alors l’emblème de l’adolescence, et vêtu de la peau de panthère,
signe distinctif d’un certain ordre des prêtres : il brûle de l’encens devant son père, Sétil ,
debout sous un naos. La tête peinte dans l’hypogée, de même que celle sculptée dans la salle
royale, semblaient faites sur le même poncif, ce qui prouverait que les artistes égyptiens s attachaient
à donner aux portraits de leurs souverains une ressemblance aussi exacte que possib e.