que le malade s’était écorché en se rasant. Cet
homme était menuisier, et par conséquent sa profession
ne l’exposait point a contracter la pustule
maligne ; il n’avait touché aucune substance animale
qui pût la lui communiquer ; il n’avait
éprouvé aucun des symptômes généraux qui accompagnent
cette maladie 3 enfin le gonflement
et la douleur avaient considérablement diminué
depuis environ douze heures qu’il était entré à
l’hôpital.
Je pensai alors que la maladie n’était point
une pustule maligne, ou que, si c’en était une, elle
était de celles dont les progrès s’arrêtent par les
seuls efforts de la nature, et comme le pouls était
parfaitement naturel et régulier, je me bornai à
prescrire une boisson acidulée et l’application de
quelques sangsues au-devant du larynx, pour faire
cesser une gêne légère de la respiration , seule incommodité
dont se plaignait le malade, et que
j’attribuai à l’extension du gonflement au tissu
cellulaire sous-muqueux de l’origine des voies aériennes.
Cependant bien que, dans ces derniers temps,
on ait rapporté des exemples de guérison de pustules
malignes par les moyens antiphlogistiques,
je recommandai à l’élève de garde de surveiller
attentivement le malade pendant la journée, et,
pour peu qu’il survînt de l’irrégularité dans le pouls,
des dispositions à la syncope ou aux vomissements,
de ne pas hésiter à appliquer le cautère
actuel sur le centre même de la tumeur. La journée
se passe dans un calme parfait. Le soir, à huit
heures, le malade a quelques vomissements, qu’il
attribue à un verre de ldrschwasser que sa femme
lui a fait boire ; mais ces vomissements cessent
aussitôt d’eux-mêmes, sans qu’on emploie aucun
moyen pour les arrêter ; on laisse le malade
tranquille, et dans la nuit il meurt d’une
manière si subite que les malades ses voisins ne
s’aperçoivent de rien.
Autopsie cadavériquefaite trente-six heures après
la mort.
Le cadavre est de petite stature, bien musclé,
d’un embonpoint médiocre. Il y a roideur cadavérique,
et il n’existe aucune ti'ace de putréfaction.
La face interne de la joue droite présente deux
légères excoriations grisâtres.*
La surface intérieure de l’estomac est parsemée,
dans sa moitié pylorique, de pustules lenticulaires,
au nombre de vingt-cinq à trente, dues à l’engorgement
de la membrane muqueuse,et recouvertes
d’une couche pseudo-membraneuse grisâtre. Le
reste de cette membrane est le siège d'une forte
injection sanguine. Le duodénum et le reste de
l’intestin grêle sont sains, à l’exception de quelques
portions un peu plus injectées que le reste
et comme légèrement ecchymosées. La trachée