Dans le Genera plantarum et le Species plantarum, Linné plaça constamment les
Equisetum dans sa vingt-quatrième Classe, la Cryptogamie, et entête des Fougères.
Mais tout nous révèle ses indécisions à cet égard. En effet ses Fragmenta methodi
naturalis (Philos, lot., p. 27 et suiv.) ne contiennent aucune mention de ce genre.
Dans les Ordines naturales qui terminent les éditions du Genera plantarum postérieures
à la si.vieme, on voit le genre Equisetum mentionné le dernier du L I Ordo,
C0NIFER.E, ainsi qu’il suit:
t ? Equisetum (filicis pollen).»
Il paraît toutefois que si Linné avaitété un instant entraîné par l’analogie des formes
extérieures, qui existe, d’une part, enlre Tépi des Equisetum et l’inflorescence des
fleurs mâles de quelques Conifères, el, d’autre part, entre les articulations des Equiselum
et celles des Ephedra (Prcel. ord. nat., p, 592), il n’avait jamais cessé de reconnaître
les rapports plus essentiels qui les unissent aux Fougères. En effet, dans ce
que Fabricius et Giselce nous ont conservé des Leçons de Linné, on trouve les explications
suivantes :
« L V o r d o , FiLiCES.
« I. Filices fructifieationibus spicatis.
« E q ü i s e t o m ratione floris cum Taxa et Ephedra fere convenit, et tamen hue per-
« tinet,-.quod sane singulare. T o u r n e f o r t illud a Filicibus separavit, et unam peltam
«fruetum, alteram florem masculinum proferre credidit. Fructificatio enim ex peltis
« in spicam posilis constat, quæ figuram habent subrolundam et sub valvulis inflexis
«pulverem continent. Equisetum arliculalum est, et omnes verticilli pyxidatirn se
«invicem excipiunt» (Præl. ord. nat., p. 597).
Les botanistes qui adoptèrent le système sexuel de Linné continuèrent à comprendre
les Equisetum dans le premier Ordre de la Cryptogamie, c’est-à-dire dans les
Fougères. Schreber, dans l ’édition du Genera plantarum qu’il donna en 179-1, les en
sépara, et les rangea, avec les Lycopodes et les Rhizocarpées, dans son premier Ordre
qu’il appela Uiscellaneoe. Roth adopta ce nom et cette classification. Willdenow fut le
premier à les considérer comme constituant à eux seuls un ordre particulier, qu’il
nomma G o n o p t e r i d e s , Gliederfarrn, Fougères articulées; ü le plaça en tête de la
Cryptogamie, à côté des Slachgopterides ou Fougères on épi, et rejeta ses Hgdropte-
rides (Rhizocarpées) à l’autre extrémité des Fougères (Grundr. d. Krduterkunde, 1792 ;
c i S p .p l , Y, p. xxxxi, xxxxv et 1, 1810). G. F. Hoffmann en fit à son tour ses
Peltata, ci les plaça enlre ses Radicalia (Pilularia, Isoeteseic.) et ses Annulata (Poly-
podium etc.) (Deutschl. F l , 1795).
Les auteurs de systèmes naturels ont été moins d’accord. Adanson, ne tenant pas
compte de la structure anatomique, ne connaissant pas encore le mode de reproduction
des Equisetum, les classa, comme les autres végétaux, en considérant le nombre
des ressemblances extérieures, et fut ainsi nécessairement amené à les rapprocher
des Conifères. Il les plaça donc dans sa cinquante-septième Famille, les P i n s , à la
suite du genre Casuarina (Fam. Plant., I I , p, 477,1763). De Lamarck les comprit
dans ses Fougères sous le nom de Fougères fausses (Fl. fr., I , p. 3, 1778).
Le Genera plantarum de A. L. de Jussieu (1789) les mentionna dans la première
Classe et le cinquième Ordre, â la suite des Fougères, à côté des Salvinia et do
l’/soctes, sous la rubrique : «V. Fructificatio minus nota. Planta filicibus affines, p
De Candolle en fit, d’après L. Cl. Richard, une famille particulière, sous le nom de
Equisetaceæ, Ordo X (Fl. fr,, p. 580,1805, el Syn. p l., p, 118,1806); et il les sépara
des Fougères par les Lycopodiacea et les Rhizosperma. Sprengel, qui les avait d’abord
rangés parmi ses Pteroides (Anleit. z. Kenntn. d. Gew., HI» part., 1804), les en éloigna
dans la deuxième édition du même ouvrage (1817), et les plaça comme genre isolé
en supplément après les Rhizospermes. Oken les comprit avec les Chara dans la
XI" Tribu de sa 3“ Classe, parmi les Pflaumen-Drossler, dans le voisinage de VEphedra
et du Casuarina (Lehrb. Naturg., 2' part., 1825). El. Fries les classa d’abord parmi
les Fougères (Syst. orb. veget,, 1825); mais vingt ans plus lard il les mit comme
appendix, tout en les notant «Acotyledones,» dans sa XI* Classe I ü l i f l o r æ , à la
suite de sa LX X X R ” Famille, Conifera, et tout à côté des Callitriche et deê Chara
{Sum. vcget. Scand., p. 59). Bischoff, qui mentionna la plupart des opinions précédentes,
repoussa « la réunion des Eqmsetum aux Fougères, à cause des particularités
de leur structure et surtout de leurs organes reproducteurs. » Il les considéra « comme
un sous-ordre à part, occupant un rang systématique égal à celui des Fougères
propres» (Krypt. Gew., p. 55), et il plaça ses E q u i s e t e æ entre les Characea et les
Rkizocarpea. M. Lindley rangeales Equiselum, comme famille, dans sa grande Classe
des Gymnospermes, auprès des Conifères (Nat. syst. bot., p. 317,1826).
M. L. Reichenbach place les Salviniacea parmi les Musci, conserve les Marsileaceoe
parmi les Fougères, qu’il ne décrit pas, place les Isoetes avec les Potamogetón, puis
viennent les Glumacées, les Iridées, les Liliacées etc., et enfm les Lycopodiacea et les
Equisetacea réunies aux Conifères et aux Thyméléacées etc. (Flor, excurs., p. xiv et 153),
en appuyant toute cette complication sur des considérations physiologiques absolument
hypothétiques, sur celle-ci, par exemple, que les Equisetum Telmateia et arvense sont
dépourvus de vaisseaux spiralés (voir ci-dessus p. 46 et 84, note); ce qui, à son avis,
« réfutât systema quod plantas in cellulosas et vasculosas distinguit » (p. 154).
La plupart des hésitations et des coiilradiclions qni précèdent étaient sans doute
permises à une époque où l ’on ne connaissait ni les organes reproducteurs, ni le mode
de fécondation, ni les premiers développements des Equisetum, mais il me semble
que M. Henderson allait beaucoup trop loin quand il disait encore en 1842 ; « La
place des Equisetum est si douteuse que de très-éminents botanistes ne paraissent pas
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