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-140 CH A R . V. — D E Q U E L Q U E S OPIN IO.NS M O R PH O LO G IQ U E S E T D E S A N O M A L IE S ,
développée, que les sépales, par e.xemple, se sonl développés en feuilles, mais bien
qu’ils se sonl arrêtes à l’état de feuilles el n’ont pu s’élever à celui de sépales. S’il est
permis de dire que Tanneau ou les lobes de Tanneau se développent en sporanges et
s’élèvent par anticipation à un degré supérieur, il ne peut être permis de dire que ces
parties se développent en gaîne, quand elles s’arrêtent par anomalie à ce degré
inférieur.
Dire que «Tanneau peut, avec le même droit, être considéré comme une gaîne
avortée ou comme un verticille de sporanges avortés,t c’est exclure toute rigueur de
langage des considérations morphologiques. L ’anneau est déjà plus qu’une gaîne; il
n’est pas encore un vertieille d’organes reproducteurs; il est au-dessus de l'un et un
état de transition vers Tautre; il n'est ni Tun ni Tautre à Tétat d’avortement. Si un
anneau se trouve au milieu d’une lige, c’est par anticipation et développement prématuré,
ou encore parce que les verlicilles supraposés, au lieu de s’élever au degré
supérieur d’organes reproducteurs, se sont arrêtés à l’état de gaînes par défaut d’action
vitale.
En botanique, comme partout, un organe avorte est celui qui, après avoir commencé
à se développer, s’arrête, s’atrophie et périt, comme, par exemple, les spores
qui s’arrêtent à Tavant-dernier degré d’évolution et demeurent impropres à la reproduclion
(p. 93-95). Dans la comparaison des organes d’un rang supérieur, les sporanges,
avec Tanneau, le terme « avorté» ne pourrait leur être appliqué (et encore sans
grande rigueur de langage) que si, à la place normale d’un verticille de sporanges, se
trouvait un anneau. Mais dans la comparaison de Tanneau avec les gaînes qui sont
d’un rang inférieur, dire de lui qu’il est une gaîne avortée, sera toujours et absolument
une expression impropre et fausse. Comme les feuilles en général, les gaînes
des Equisetum résultent de la simple multiplication du tissu celluloso-vasculaire; elles
s’arrêtent à la première période d’évolution. L ’organe reproducteur résulte, non plus
d’une muUiplication de tissus toujours identique à elle-même, mais de la série des
modifications qui atteignent ces tissus; ainsi dans l’évolution d’un sporange et de son
contenu, on peut compter jusqu’à onze périodes successives, toutes différentes
(p. 76-84). Or un organe dont les parties élémentaires ont passé par toutes les phases
de l ’évolution normale, et qui, dans la série des fonctions, est dès lors plus rapproché
de la fonction finale et suprême, ne saurait être considéré comme un avortement ou
une déformation de Torgane inférieur dans cette même série. Si Tanneau, supérieur
à la gaine, est une gaine avortée, les sporanges, supérieurs à Tanneau, sont des
anneaux avortés ou déformés, et les spores, supérieures aux sporanges, sont des sporanges
déformés ou avortés. Il ne saurait en être ainsi. L ’organe reproducteur, spore,
embryon, graine, n’est point un organe avorté, déformé, transformé. I l est ce qu’il
doit être; il est arrivé à ce qu’il devait être, et chacun des autres organes intermédiaires
s’est arrêté à son point dans la série des actes d’évolution et dans la suite des
fonctions. Il n’y a donc point, à mon avis, exactitude et rigueur logique, à prendre
un organe accessoire et inférieur, la feuille, le plus éloigné peut-être du terme, comme
celui auquel on rapporte tout dans les considérations morphologiques, et j’aimerais
mieux renverser les rapports, partir de Torgane final et considérer la feuille comme
organe incomplet, inachevé, arrête aux premières modifications cellulaires, que de
considérer les organes reproducteurs comme des déformations ou des transformations
de la feuille. J ’insiste trop longuement sur ce point; je le reconnais. Mais je vois dans
les expressions qui ont cours le reflet d’une idée inexacte qui fausse toutes les considérations
morphologiques.
A mesure que les organes accessoires ou foliacés se rapprochent des organes essentiels
ou reproducteurs, nous les voyons, sur les tiges des phanérogames, se réduire
dans toutes leurs dimensions, se modifier dans leur forme et souvent même dans
leur coloration. A la feuille succède la bractée, à celle-ci Técaille, puis apparaît le
pédoncule. Celui-ci, considéré avec raison comme un rameau ou axe d’un autre ordre,
supporte d’autres verticilles d’expansions foliacées arrivées à Tétat d’enveloppes
florales, et enfin relie les organes reproducteurs à l’axe principal de Tinilorescence.
La réduction des parties de Tanneau nous indique qu’il en est de même sur
les Equisetum, et que les expansions foliacées vont disparaître et faire place aux
rameaux supportant les organes reproducteurs. Les verticilles des pédicelles sporangifères
me paraissent en effet répondre exactement à des verlicilles de rameaux,
dépourvus de gaîne caulinaire et de gaîne basilaire, comme sur tant de phanérogames
les expansions foliacées «manquent soit à l’origine des inflorescences géné-
« raies ou partielles, soit à celle de chaque fleur en particulier» (Ad. Juss., Élém.
lot., p. 225).
Mais cette manière de considérer les pédicelles n’est peut-être pas aujourd’hui
généralement partagée. Je mentionnerai, sans les discuter, les opinions de M. Lindley et
de Bischofi', qui ont regardé chaque sporange comme correspondant à une seule loge
de Tanthère (Lindl., Introd. nat. syst., p. 311) ou à une anthère complète (Bischoff,
Lehrb. Bot., p. 441), et Topinion émise par M. H. Mohl « que le réceptacle des Equisetum
provient d’une feuille de la hampe même, et représente en quelque sorte le
connectif d’une anthère démesurément grossi, et que les sporanges silués à sa face
inférieure correspondent aux loges isolées d’une anthère » (Morph. Spor., p. 10). Plus
récemment M. Milde s’est ainsi exprimé sur ce point ; « Les carpopliores (Fruchttrâ-
ger) sont disposés, comme les rameaux, en verticilles superposés, et chacun d’eux,
ainsi que nous l ’apprennent de nombreuses monstruosités, peut être considéré comme
une feuille métamorpliosée (Gef. Crypt. Schl., p. 413). Dans tous ses travaux sur les
Equisetum, ce savant botaniste a émis la même opinion el s’est complu à accumuler