«grande quantité, vu que les glandes mammaires n'auront pas assez reçu do menstrue
« alcalin pour en enlever au sang qu’elles élaborent. En conséquence le lait se trou-
«vera plus ou moins réduit à l’état de petit-lait dont il a la couleur» (t. I I I , p. 146,
ct aussi § 3357, éd. de 1838). Cette accusation est difficile à concilier avec l’assertion
de Linné que cette plante donne aux vaches de Laponie un lait plus abondant;
est-elle mieux fondée? Il est fâcheux que le savant chimiste n’ait pas dit qui a remarqué
le fait donl sa théorie offre l’explication, car les propriétaires sont d’accord pour dire
qu’ils n’ont rien constaté de semblable.
I l est donc permis de croire que les propriétés malfaisantes attribuées aux Equiselum
no leur appartiennent guère plus que les vertus merveilleuses dont les douait
la crédulité d’un autre âge,
et qu’ils n'ont incrité
Ni cet excès d’honneur ni cette indignité.
En définitive, l’emploi qui paraît le plus incontestable est le polissage. M. E. New-
man atteste que, pour cet usage, l’Angleterre reçoit (sous le nom de Dutch Rush) de
grandes quantités d’fi. hyemale qui croît on abondance sur les digues de la Hollande
(Rrit. ferns, p. 21).
Dans nos départements méridionaux, en particulier dans celui des Bouchcs-du-
Rbône, l’i i. ramosissimum (quelquefois aussi YE. palustre) est récolté en abondance;
on le tortille en gros anneaux (appelés Fretadour, Escureta, Escuret) qui servent à
nettoyer la vaisselle et les petits pavés rouges. Dans sa Statistique des Bouches-du-
Rhône, M. de Villeneuve comprend la «Prêle au nombre des produits naturels du
«département qui donnent un revenu régulier;» il estime «qu’il s’en récolte 30,000
«douzaines de bottes, évaluées à 10,000 fr.» (I, p. 654; 1821). De nombreux renseignements,
recueillis dans ce département, m’oiit démontré que cette évaluation,
qui me paraissait d’abord exagérée, est au-dessous de la vérité. La douzaine d’anneaux
se vend en été 5 cent., en hiver 10 cent., et il y a peu de ménages qui n’en usent deux
douzaines par mois. En réduisant la dépense annuelle à une moyenne de 1 fr., la
ville de Marseille, à elle seule, a plus de 10,000 ménages qui emploient ces anneaux
à nettoyer la vaisselle et les pavés.
En Alsace on recueille YE. hyemale pour le même usage et on en fait également
des anneaux (Sehaftheukrànze), que Tragus a figurés à côlé de son Hippuris major
(De stirp., p. 692). Les deux Bauhin ont aussi donné un dessin de ces anneaux.
A Strasbourg, comme en Hollande, YE. hyemale est récolté en abondance pendant
l’automne et l’hiver, et expédié à Paris, où les tourneurs et les tabletiers l ’emploient
pour polir les menus ouvrages de bois, de corne, d’ivoire etc. Mais chaque année les
commandes diminuent, et le papier-verre remplace VAprêle. Ainsi celle plante que les
botanistes regardent comme un reste précieux de la végétation d’une autre période
géologique, celle plantes! vantée par rancieime médecine, que Tragus pouvait en dire
«iilrisque corporis parlibus utilissima» {De sifry)., p. 693), est maintenant, si non
méconnue, au moins inconnue en médecine et reléguée dans nos arrière-cuisiiies au
plus vil des usages : Sic transit gloria mundi.
1 3. Composition chimique
Pour compléter ce qui précède je crois devoir faire connaître ce qm a été publié sur
la composition cbimique des Equiselum.
La plus ancienne mention sur ce point se trouve dans Tournefort; «La Presle est
«d’un goût salé, détersif, et ne rougit presque pas le papier bleu : il y a beaucoup
«d’apparence que le sel de cette plante est semblable au sel de Corail; mais il y est
«mêlé avec un peu de sel ammoniac et de soufre. Par l ’analyse chimique on tire de la
«Presle plusieurs liqueurs acides, peu d’huile, beaucoup de terre, point de sel volatil
«concret, mais quelque pou d’esprit urineux; le sel fixe de cette plante ne se résout
«pas facilement à l’air el ne rend pas la solution de sublimé corrosif rouge orangé.
«Extrait des registres de l’Acad. roy. des sciences» [Ilist. des plant, env. P a n s ,
2= éd., I I , p. 46).
Bischoff s’exprime comme il suit, sans faire connaître à qui sont dues les analyses :
«La souche de la plupart des Equisetum est particulièrement riche en fécule et en
gluten. Outre cela, ils contiennent encore un sirop brun et sucré (sucre incristalli-
sable) ; et la cendre de la tige brûlée contient plus de moitié de silice (sur 100 grammes
de cendres VE. palustre donne 53s',75 de silice et VE. hyemale 62sl90). En outre on
trouve dans la cendre; sulfate de chaux, carbonate, chlorure et phosphate potassiques,
chlorure et phosphate sodiques, phosphate de chaux, phosphates de fer et de
magnésie, chaux et au plus charbon 1/2 » [Krypt. Gew., p. 50).
M. E. Newman dit à son tour ; « Sir Humphrey Davy a constaté dans la lige de cette
plante (E. hyemale) la présence d’une quantité extraordinaire de silice; c’est cette
substance qui donne à la lige sa rudesse et en fait ainsi un article de commerce. La
silice se montre sous forme de petits cristaux, arrangés avec une régulante parfaite.
Dans le volume sur l’optique (Lardner’s Cabinet Cyclopedia), le docteur Brewster
constate qu’il a trouvé les molécules de silice douées d’un axe de double rélraclion.
Nous avons entendu dire à des botanistes que la quantité de silice est si grande et que
les molécules en sont si étroitement unies que toute la substance végétale peut être
enlevée par macération sans altérer la forme de la plante» [Bnt. ferns, p. 22).
M. Kirschleger évalue « à 95 pour cent la quantité de silice que l’on rencontre dans
les cendres des Prôlesz [Fl. Als., I I , p. 375); mais il ne cite ni l’auteur de l ’analyse
ni l’espèce analysée.