opulence , tantôt conduite avec grâces^ par
la plus séduisante, comme la plus effrénée
dépravation des moeurs , en avoïent fait un
séjour inabordable pour l’homme dont l’ame,
élevée et enorgueillie de l’amour de la patrie,
dédaignoit de s’abaisseV jusqu’à ces honteuses
ressources d e là corruption, et de souiller
la noblesse des sentimens et l’éclat d’actions
recommandables , par de vils expédiens,
quoiqu’ils fussent les voies les plus directes
qui conduisissent à la justice. Aussi, Po n jr
yoyoit rebuter l’homme dont l’utihté faisoit
Je seul titre. On l’abreuvoit de dégoûts , et il
sembloit que l’on cherchât à exciter ses regrets,
à le faire repentir de ses travaux. Celui
qui avoit des droits à la reconnoissance nationale,
étoit éconduit par un gouvernement
qui, depuis long-temps, avoit renoncé à en
être l’interprète ; et de justes récompenses
étoient si difficiles à obtenir, leur épargne
sordide coiïtrastoit d’une manière si affligeante
avec les largesses dont la faveur
n'avait Ia cohorte de ses adorateurs j que ,
p o u r peu que l’on eût de fierté , l’on préférait
de renoncer à des sollicitations trop
souvent s u p e r f lu e s , 'et toujours avilissantes.
Ce parti fut celui que j’adoptai constam-
( 5 )
ment. Fier de n’avoir, dans mes travaux,
d’autre mobile que l’amour de ma patrie,
j’ai suivi avec désintéressement une carrière,
dans laquelle j’aurois pu obtenir quelque
succès, si j’eusse été mieux secondé, si l’on
avoit su mettre à profit mes dispositions:,
et tirer un parti plus avantageux d’un zèle
que les obstacles irritoient, loin de l’affoiblir.
Jamais l’on ne m’a vu fatiguer l’homme
puissant de mes importunités, ni faire bassement
la cour à des subalternes; et si de
justes dedommagemens ne suivoient pas là
simple exposition de mes droits, je me-re-
tirois, et je n’en parlois plus. Plus satisfait
d’un dévouement généreux que de récompenses
qui en auraient affoibli le mérité r
je m’applaudissois, sinon de m’être rendu
utile, du moins d’avoir cherché à l’être, sans
qu’aucune vue d’intérêt personnel eût souillé
mes efforts; Ma conscience me faisoit goûter,
aux dépens-de ma bourse, une joie pure,
un contentement dont les aines intéressées
ne peuvent jouir. Mais ce caractère-de fierté
et d indépendance, dont la fortune est épouvantée
, me valoit au moins quelque considération
, et j’ai: souvent reçu des éloges
en échangé de mon argent.
A 3