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Et si les animaux domestiques sont dans
ce pays, ainsi que dans d’autres contrées adjacentes
,les plus doux et les plus dociles du
monde, les animaux de proie y sont aussi les
plus cruels de tous. Leur férocité est extrême,
coin me la chaleur du climat. Tant il est vrai
que l’hommé seul a pu changer le caractère
des premiers qui seroient naturellement aussi
sauVages que ceux-ci sont féroces, et que ce
n’est:qu’à une très-ancienne et très-intime
domesticité qu’ils doivent les bonnes qualités
qui les font distinguer. :
Les antres des montagnes hautes et tranchées
qui bordent le Nil à l’orient et à l’occident,
offrent des repaires inaccessibles , et
propres seulement aux animaux voraces :
c’est là que la farouche hyène entraîne les
produits de sa chasse, et que, sur une aire
de carnage , elle amoncèle les ossemens.
C’est presque le seul, entre les quadrupèdes
de proie, qui habite ces horribles solitudes.
Les animaux qüi, sous une robe élégamment
variée et des formés sveltes et déliées,
ont donné leur nom à la cruauté et à l’épouvantable
amour du sang,- n’y paroissent pas
souvent, et le lion , dont l’espèce diminue
par-tout, est aussi très-rare dans le voisinage
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de l’Egypte ; il craint d’y pénétrer, et s’il
s’y hasarde , il n’y reste pas long-temps. Les
Egyptiens l’appellent sabbé. -
Les lions et. les quadrupèdes à peau tigré©
ne sont pas les seuls dont la race se ' soit
éclaircie successivement, et qui ait disparu
de.la terre d’Egypte. Les hippopotames ( 1 )
étoient anciennement des animaux communs
dans-la partie du Nil qui baigne l’Egypte;
« Ceux,que l’on trouve dans le nome Papre-
»» m i t e dit Hérodote, sont sacrés ; mais dans
» Je reste de l’Egypte on n’a pas pour eux les
M mêmes égards,»» (2^. Ils désoloient les campagnes
par des, ravages aussi prodigieux que
leur masse ; et ils étoient aussi redoutables
pour les. hommes que ’les crocodiles (3). La
terreur qu’ils inspiroient les avoit fait généralement
regarder comme le symbole de T y phon
,.ce géant qui avoit portéde désordre et
la mort parmi les divinités que l’on adoroit
dans cette contrée!; ilsy étoient par conséquent
l’emblème du mauvais génie et dé la cruauté.
(1) llippopotamus ampTiibius.D. -
(2) Liv. 2 , § 7 1 , trad. du citoyen Larcher.
(3) « Dans le Tïil , il naît une espèce de cheval
» aquatique , qui est bien aussi mécliant que le croco-
» dite ’»î Pâusanias, trad. de Gedoyn, liv. 4, Voyage
en Mcssenie, page 400.
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