sur terre , et des pirates arrêtoient les bateaux
du Nil. Les tribus d’Arabes rév'eil-
loient d’anciennes querelles, et avoient en-
tr’elles de fréquentes esparmouches ; les villages
se battoient contre les villages; enfin,
dans ces occasions, le trouble , l’agitation, la
licence , étoient portés à leur comble ; et
l’étranger sans appui, parce qu’il n’y avoit
plus d’autorité, ne pou voit manquer d’être
victime du bouleversement général.
Il ne m’étoit pas possible de rester plus
long-temps dans les lieux où fut autrefois la
.superbe ville de Thèbes. G.es .cantons,, extrêmement
dangereux dans les temps les
plus tranquilles, étoient à la veille d’être
impraticables pour tout autre que les brigands.
Je ne pouvois songer non plus à monter
vers les Cataractes. Outre les périls auxr
quels m’aüroit exposé une population- plus
barbare dans cette contrée méridionale , les
ennemis de Mourat entre les mains desquels
je me serois livré , m’auroient fait périr comme,
l ’une de ses créatures. Je pris donc, bien mab
gré moi, le seul parti qui me restât, celui de
redescendre le N il, la férocité des habitans
s’adoucissant un peu, ainsi que la couleur
basanée, à mesure que Ton revient vers Je
nord.
nord ; d’un autre côté , j’avois moins à
craindre en rencontrant les partisans de
Mourat Bey.
Le Scheick Arabe dé Tuxor m’engagea
a ne pas retarder mon départ ; mais je vou-
lois aller encore sur la rive occidentale, à
Gournei , afin d’y voir la partie dé l’ancienne
ville de Thèbes f qui étoit de ce côté.-
Ce point de la Tbébaïde passoit pour le plus
difficile à aborder , à cause de la multitude
de voleurs qui en formoient la population.'
J’avois ouï dire par le K ia s ch e f de Kous
qu’il n’oseroit y voyager, même avec sa*
petite troupe de Mameloucks et de soldats.
Le Scheick de Luxor, l’un de ceux dont
la conduite honnête et hospitalière se soit
le mieux soutenue dans un pays où l’on a
l’habitude de promettre beaucoup et de ne
rien tenir, ce Scheick 3 dis-je , essaya aussi
de me détourner de mon dessein; et, quand
il me vit décidé à ne pas l’abandonner, il
m indiqua, avec beaucoup de complaisance,
les mesures de prudence qui pouvoient contribuer
à ina sûreté. Ce brave homme voulut
m’accompagner jusqu’au bateau qui me
porta, le matin du 29, devant Gournei, à
l’ouest du Nil.
Tome m , g