dresser à lui avec le ton de Ja confiance.
Apres s’être- informé ,des symptômes qui ac-
compagnoient la fièvre, ce médecin si peu
exercé, chercha long-temps dans son livre ,
qui prescrivoit, en pareil cas j. les fruits acides
, comme les limons, les grenades, etc. etc.
et la Fumée d’un os de poisson, brûlé, que le
fiévreux devoit respirer. Mais, ajouta-t-il
en fermant son livre et de sa propre science,
«t il n’est point de remède plus assuré contre
?» la fièvre que Vécriture >» c’est-à-dire, des
petits billets , sur lesquels on écrit de certains
mots, et que l’on avale ou que l’on porte
en amulette.
Cet empirique,que l’on avoit fait yenir de
loin pour traiter le chef de ' Gournei , ne
connoissoit pas sa maladie , quoi qu’il fût à
ses côtés depuis plusieurs jours. Lorsque je
sortis, il me suivit pour me demander ce
que j’en pensois. « Chercher, lui dis-je, dans
sî votre livre, à l’article des fistules, et vous
j» connoîtrez la nature et probablement les
« remèdes du mal; mais ne perdez pas de
« temps ; car la gangrène commence à se
»> manifester , et, dans peu., votre malade
« mourra, si vous ne vous hâtez d’en arrê-
w ter les progrès ». A ces mots, mon savant,
connoïssant tout le danger qu’il y avoit, dans
son pays, à manquer une cure , n’hésita pas
sur le parti qui lui parut le plus convenable
à sa sûreté ^ il ne rentra pas même chez
son majade, et il disparut sans parler à personne
, et emportant toujours son savoir sous
le bras.
S’il n’étoit pas prudent de voyager à Gournei,
il n’étoit pas aisé d’en sortir. Les bateaux
du Nil évitoient son rivage, généralement
redouté ; et la méchanceté de ses habitans les
avoit mis en guerre avec leurs voisins , et
particulièrement avec le peuple de Kamoulé,
village à moitié chemin de Néguadé , dans
lequel ils.avoient massacré un homme depuis
peu de temps. Suivant l’usage atroce du
pays , il falloit que le sang coulât à Gournei
, pour venger celui de Kamoulé, sans
que l’on.s’inquiétât si ce sang, qu’une vengeance
aveugle; çherchoit à répandre, fût
celui du meurtrier ou de tout autre. Personne
n’osoit s’exposer à devenir la victime
d’un ressentiment que le temps n’effacepas, et
qui pe .peut s’éteindre que dans le sang. Aussi
tous se refusèrent à me servir de guides , et
le Scheick Arabe lui-même craignit d’entreprendre
de nous conduire à JSéguadé, Enfin,