facultés. Je demeurai loug-femps immobile
de ravissement, et je me sentis plus d’une
fois prêt à me prosterner, eu signe de respect,
devant des monumens dont l’élévation
paroissoit au-dessus du génie et des forces
de l’homme^
Des obélisques, des statues colossales,
d’autres gigantesques, des avenues formées
par des sphinx, et que l’on suit encore, quoique
la plupart des statues soient mutilées ou
cachées sous les sables ; des portiques d’une
élévation prodigieuse, parmi lesquels il en
existe un de cent soixante-dix pieds de hauteur
. sur deux cents de large ; des colonnades
immenses, dont les colonnes ont plus
de vingt pieds, et quelques --unes jusqu’à
trente-un pieds de circonférence ; des couleurs
étonnantes encore par leur éclat; le granit
et le marbre prodigués dans les constructions;
des pierres monstrueuses par leurs dimensions,
soutenues par des chapiteaux et formant
la couverture de ces magnifiques bâtimens,
enfin des milliers de colonnes renversées,
occupent un terrain d’une vaste étendue.
Que les édifices si vantés de la Grèce et
de Rome viennent s’abaisser devant les
temples et les palais de la Thèbes d’Egypte.
Sës ruines orgueilleuses sont encore plus
imposantes que leurs ornemens fastueux, et
ses débris gigantesques sont plus augustes
que leur parfaite conservation. La gloire
des constructions les plus renommées s’efface
devant les prodiges de l’architecture égypj-
tienne; et, pour les peindre dignement, il
faudrait le génie de ceux qui les ont conçus
et exécutés, ou la plume éloquente de Bos-
suet (1).
(1) Retiré le soir dans une des chaumières de Luxor\
et l’esprit rempli des merveilles que j’avois vues, je lus
encore , avec enthousiasme, le passage de Bossuet, dans
lequel il trace , d’après la relation de Thevenot, une
esquisse rapide des ruines de Thèbes. L ’on ne peut
parler avec plus d’élévation de style, d’ouvrages qui
commandent le respect et l’admiration. Je crois faire
plaisir au lecteur, en lui mettant sous les yeux ce passage
, qui contribuera à lui donner une idée de lieux
dignes du pinceau'de l’orateur Rrançois.-
« Les ouvrages des Egyptiens étoient faits pour tenir
» contre le temps : leurs statues étoient des colosses i
» leurs colonnes étoient immenses, L ’Egypte visoit aü
» grand, et vouloit frapper les yeux de loin, mais tou-
» jours en les contentant par la justesse des proportions.
» On a découvert dans le Saïd ( vous savez bien que
» c’est le nom de la Thébaïde ) des temples et des
» palais , presqu’encore entiers, où ces colonnes et ces
» statues sont innombrables. On y admire sur - tout un