Il n’y- a pas à douter que eé Sanglier n’ait pu vivre en Grèce, q u il n y ait
vécu : on le trouve encore aujourd’hui sur plusieurs points de la lisière de 1 Afrique
méditerranéenne. Rüppel l ’a rencontré sur les bords du Nil, au-dgfâ des cataractes;
et je .suis informé qu’on se porte de Gibraltar dans l’empire de Maroc pour l y
chercher, et l’y. faire servir au plaisir de la chasse : ainsi, tout aussi bien que le
l io n de l’A ttique, l’énorme Sanglier de l’Éthiopie aura pu de même , dans la
péninsule grecque /céder peu à peu son milieu habitable aux sociétés humaines,
c’est-à-dire succomber sous les coups réunis et du nombre accru et d une industrie
de plus «en plus perfectionnée de la part des maîtres de la terre..-
En définitive, toute la question se réduit à ces termes : il y a deux formes
principales pour rendre les conditions cjp grand genre des Cochons sauvages,
celles du Sanglier proprement d it, ou du sous-génre Sus; puis la conformation
semi-monstrueuse, au dire de Pallas, du Sanglier aux quatre cornes, ou les espèces
du sous-genre Phacochères. Duquel de ces deux types 1 échantillon, d Olympie
s’approche-t-il le plus?
A vrai dire d’aucun, si nous nous en tenons strictement, à nos seules données,
bien insuffisantes sans doute pour une 'détermination rigoureuse, se bornant au
seul fait caractéristique des dents canines ou défenses, comme on les appelle;
et en effet, l’échantillon du monument d’Olympie ne consiste qu’en un bout de
museau, où là ne^sont ni yeux, ni oreilles; toutefois la commissure des lèvres"
est entière : les défenses sont parfaitement conservées.
Mais d’abord, que sont ces élémens caractéristiques dans les deu? types du
point de départ?.Chez le Sanglier vulgaire et ses congénères, ce sont“ des dents
d’inégale grandeur supérieurement et inférieurement. Les dents d’en bas; sensiblement
plus longues, conservent une position constamment extérieure; la défense
d’en haut se courbe en arc pour en suivre le contour, mais n’y parvient qu imparfaitement;
ces dents se rencontrent, se heurtent et s’usent à leurs points de
contact. Cet obstacle, s’opposant à un plus libre développement, porte davantage ses
effets sur la dent supérieure, d’où i l arrive qu’autant cette défense gagne d accroissement
vers sa racine, autant elle diminue à son sommet par un effet de détntion.
Dans l’extrême vieillesse, ces dents sont un peu plus l’une au devant de l’autre,
et la dent supérieure prend proportionnellement plus de longueur. Chez les Phacochères,
cette tendance au mêmë développement est contrariée par un tout autre
Caractère de tête : la facé^est méplate et plus large; le groin est plus court et
transversalement plus évasé : de là il/arrive que la dent d’en bas est plus décidément
en avant de celle d’en haut. Des-lors il n’y a qu-ùpe partie de dent, sa portion
antérieure, de soumise à l'usure; de telle sorte que ce qui tout d’abord a échappé
aux effets de la détrition, c’est-à-dire tout le sommet de la dent, se conserve en
son intégrité: de ce résultat, accroissement prolongé en racine sans diminution
sensible au sommet, provient un caractère zóologique d’une expression ferme et
précise; je veux^dire la grandeur démesurée de la dent de la mâchoire supérieure,
grandeur acquise dans tous les sens, en. longueur et en épaisseur.
Or, ce qui est plus haut rapporté touchant le groin exécuté en marbre pour
le temple d’Olympie, ne moptre aucune de ces dernières conditions organiques, et
par conséquent 'nous sommes pour cela ramenés aux Sangliers proprement dits',
aux espèces du sous-genre Cochon. Mais nous retombons dans un autre ordre de
difficultés, si l’échantillon fourni par le monument d’Olympie ne comporte pas
tous» les documens nécessaires.
Cependant ces renseignemens pouvaient être heureusement suppléés : je les ai
demandés à d’autres pièces; et en effet c’est une scène très-souvent répétée sur les
vases grecs, que la représentation des douze travaux d’Hercule, et plus spécialement
que celle qui témoignait de la docilité de ce héros aux ordres tyranniques
du roi Eurysthée, au.sujet du Sanglier d’Érymanthe. Tous les personnages de ces
vases sont dessinés avec autant de goût que de correction.* J’ai dû compter sur
l’exactitude des animaux faisant partie de ces compositions.
Or, on a vu dans une note qui précède, que j ’ai été admis à la libre pratique
de la riche collection d’antiquités de M. Durand. Toutes les grâces du savoir et de
l ’aménité m’ont été prodiguées par cet ami de M. Ch. Lenormand, qui m’accompa-
gnàit et.,me recommandait. Là mon attention fut fixée sur trois vases, donnant de
la mêmè'inanière le port et le profil du Sanglier du Péloponèse, du Sanglier con-
saçré pàr lamctoire d’Hercule.
0 J’m'déjà traité dans la note précitée de l’un de ces vases, de celui aux trois anses,
portant l’inscription : Panthée m’a fa it; le second est une amphore avec deux anses,
et le troisième est une sorte d’aiguière, portant une seule anse, et présentant un
goulot sous la formé/d’un trèfle. Hercule est représenté sur chacun de ces vases,
combattant le Sanglier d’Érymanthe, dans le moment qu’encouragé par la présence
de Minerve, sa protectrice naturelle et constante, il assure sa victoire en saisissant
l ’animal.
J’ai aussi observé un autre vase analogue ¿donné au cabinet du Musée royal par
M. le duc de Luynes. Hercule tient sa victime dans ses bras, et.s’apprête à la lancer
à Eurysthée, qui, épouvanté, a fui vers son tonneau, et qui s’y est tapi, tenant
dehors la tête et les bras. C’est la même composition que sur le vase à deux anses
dont il vient d’être parlé, à cette exception près, que dans le dernier Eurysthée est
présenté de profil, p|iraissa&invoquer ou suj|plie§ Hercule, et que dans l ’amphore
du Musée royal Eurysthée test vu de face e fla n s l ’attitude d’un homme qui se précipite
et veut{entièrement disparaître.