reuses infidélités, qu’il se serait porté décidément par un mélange calculé de plusieurs
traits, chacun donnant sa naïve expression, à essayer de placer sous l’oeil
quelques idées compliquées et à arriver ainsi à faire un tableau/parlant?^
III. Le S a n g l ie r . Le bas-relief d’Olympie n’eut, pour y comprendre une scène
de Sanglier, qu’à produire un groin de cet animal, ou du moins c’est tout ce qui
nous en reste dans un morceau présentement isolé^Eflectivement c'était assez pour
placer dans la^composition générale un souvenir du Sanglier d’Érymanthe, ou
autrement de f action qui est réputée le troisième travail d’Hercule. C’était aussi
tout ce que le naturaliste en pouvait désirer comMître pour la détermination de
l’espèce. Cependant quel était ce Sanglier d’Érymanthe, également nommé Sanglier
de Calydon? Érymanthe était le nom d’une montagne-cj’Arcadie ,* et Calydon celui
d’une forêt située plus au nord ét de l ’autre côté dû golfe de Lépante. Hercule
fut renommé pour avoir forcé et pris ici vivant, et laÆué, un énorme Sanglier.
Le groin,-exécuté en marbre, que nous avons soüsles yeux1 , donne très-bien
les conditions principales et caractéristiques du genre; la saillie du disque nasal
et les défenses qui excèdent et qui contournent la lèvre en se dirigeant vers le
haut. Cependant ces défenses sont grêles, rondes, assez longues pour atteindre'
ensemble la hauteur du museau, symétriquement arquées, bien ajustées, celle de
la mâchoire inférieure étant rangéeÿparallèlement au devant de 1 autre^ et toutes
deux enfin paraiÉant tout-à-fait appliquées sur le derme. I l y a sans doute dans
cette coÆimation de quoi satisfaire à la reconnaissance du genrè Sanglier? Alcamène
ne s’étant proposé rien de plus; car ce qui à pu contenter cet artiste selon
les idées de son temps, nous paraît passer à des effets d’indifférence pour l’exactitude.
D’autres moeurs nous ont fait aujourd’hui les hommes de la précision.
Nous voulons laisser aux faits tous les enseignemens de leurs, conditions matérielles,
quand on ne pensait retirer d’eux autrefois que la manifestation de leur
essence poétique.
Ce point de fait reconnu, à quoi bon, dira-t-on, une détermination scientifique
du Sanglier du Péloponèse d’après^un marbré qui n’en §|rait qu’une copie infidèle?
La remarque est juste, mais je lui oppose cette réponse: i.° l’inexactitude
de ce modèle n’est que présumée; 2.° quene doit-on pas attendre du savoir actuel
en histoire (naturelle, pour comprendre d’anciennes études faites instinctivement
d’après les animaux? et 3.° on peut s’aider de renseignemens puisés ailleurs.
O n compte plusieurs espèces de Sanglier; laquelle d’entre elles aura valu a Hercule
l’honneur d’un nouveau triomphe? Le Sanglier du monument d’Olympie nous
laisse dans l’incertitude. Si nous l ’avions reçu d’un sculpte# moderne, nous peni
. Voyez figure 3, en la vignette qui termine , le présent mémoire,
cherions à y trouver le type d’une espèce inconiffee; mais avertis, comme nous le
sommes, des habitudes*du faire antique, ne sommes-nous'pas tenus de choisir
entre le§. animaux de notre moderne zoologie ?
Je pars de cette idée; j’exclus, d’abord, en me fondant sur les seules indications
suivantes: i.° les animaux américains, les Pécaris aux doigts impairs, dont,
les défenses se croisent et se prolongent droites à la manière des dents canines;
2.° le Babyroussa aux défenses grêles, très-longues et doublement contournées
en spirale; 3." le Sanglier à. masque (Sus larvatus de Madagascar), dont le bord
maxillaire est si fprtement replié sur lui-même que cela fournit une facette rugueuse,
sur laquelle une forte excroissance du derme se trouve implantée; 4»° le Sanglier
aux quatre cornes d’Élien (Phacochère¿ F. Cuvier), à tête ramassée, lequel a son
groin transversalement'ellypsoïdal, dont on compte déjà deux espèces1, et qui a
pris cette bizarre dénomination, chez les anciens, du volume considérable de ses
défenses. C’est le plus farouche des Sangliers; il existe partout où sont des Lions,
et sans dpute que s’il eût été placé autrefois en Grèce, il y eût fourni un plus beau
sujet de triomphe pour Hercule, qu’aucun autre des Sangliers connus. Je me suis
long-temps fixé à cette idée. Pallas a le premier décrit cet animal sous le nom de
Sus oethiopicus; ce fut en 17717, long-temps après qu’Adanson eut vu cette espèce au
Cap-Vert, ainsi que l’attestent plusieurs pièces anatomiques, déposées au Cabinet du
Roi. Vivement impressionné par les formes extraordinaires de cette bête farouche,
Pallas lui fit, dès le commencement de son article, l’apphcation du proverbe
romain, África ferat monstris. Et en effet, que de justifications pour3celte idée,
pour notre préoccupation d’esprit! Aspect horrible, naturel furieux, caractère opiniâtre
et indomptable, animal né pour la fange, créé pour nuire, et n’étant pas même
après sa mort une venaison d’un goût passable. Que de motifs, pour n’y voir qu’un
monstre à exterminer, pour qu’il eût engagé Eurysthée, si au temps des campagnes
d’Hercule ce ,Sanglier se fut trouvé dans l ’Attique, à le proscrire, et à
placer l’oeuvre de sa destruction parmi les travaux imposés à ce héros !
1. Phacochoerus incisivas (au Cap-Vert) et Phacochoerus rdentatus (au cap de Bonne-Espérance)•
Ces Sangliers ont été ainsi nommés par Isidore Geoffroy Saint-Hilaire dans le i 3.e volume du
Dictionnaire classique d’histoire naturelle. M. Cretzschmar, directeur du Musée de Francfort,
décrivant les animaux découverts dans le Kordofan par M. Rüppel, son compatriote (Voyage en
Nubie, Francfort, 1826), a ramené l’attention sur les travaux d’É lien, en proposant le nom de
Phacochoeres Æliani. Cette dénomination a été presque aussitôt changée en celle de Phacochoerus '
Harvià par M. Ehrcnbcrg, correspondant de l’Académie des sciences, lequel vient de publier
(Berlin, i 83o ) un article ttrès - remarquable sur le Sanglier aux quatre cornes d’Elien. Déjà
MM. Ludolf et Sait, ses compatriotes, avaient fait connaître et témoigné de préférer le nom du
pays, Harvia.