roptères, volent alors dans les plaines couvertes d’une végétation fraîche.
Le singulier insecte connu sous le nom de Saga serrata, Fab. (Locusta),
se trouve dans cette saison; mais il est fort rare, et nous n’avons pas eu
l’occasion de voir le mâle.
Parmi les Lépidoptères de cette époque on distingue plusieurs Va-
nesses communes en France et dans les environs de Paris : la plus répandue
de toutes est la Belle-dame, V. carilui, qui se montre partout
pour ne disparaître qu’avec la belle saison; quelques Coliades, entre
autres la Cléopàtre du midi de la Franee; plusieurs de nos Satyres et
une suite de Polyommates dont quelques-uns se sont déjà montrés. La
fin d’Avril et le commencement de Mai sont le moment où les Sphinx de
l’Arbousier, du Ciste, de l’Euphorbe procèdent à leur première ponte.
Les Libellulines se font remarquer par diverses espèces nouvelles,
et surtout par un Agrión charmant, dont la femelle est bronzée et le
mâle d’un beau bleu'. Parmi les vrais Névroptères on peut citer deux
jolies espèces d’Asçalâphes", et l’élégant insecte connu sous le nom de
Némoptère, Nemoptera Coa, Oliv. Après s’être balancé lourdement
dans l’air, Ce dernier se pose sur les plantés élevées : ce vol est semblable
aux mouvemens d’un morceau de gaz promené par le vent, tant
il semble peu maître de se diriger par lui-même. Son vol bas et irrégulier
permet presque de le prendre à la main. D est très-commun dans
le courant de Mai et une partie du mois suivant. Plus on remonte vers
le nord de la Morée, plus on le trouve tard, comme presque toutes les
autres espèces.
De beaux Diptères voltigent sur les fleurs pendant le mois de Mai ; des
Muscides en grand nombre, des Syrphies; déjà quelques Asyliquessont
répandus de tous côtés. Mais l’entomologiste prend surtout avec plaisir
les beaux genres Pangonie et Fallénie avec un insecte assez répandu
qui doit former un genre nouveau, dont la place est marquée entre les,
Némotèles et les Oxyeères.3
Le changement que subit la végétation, en amène nécessairement
3. Agrión Festiva, Br.; voy. notre pl. XXXI, fîg. 5 ,et 6.
a . Ascalaphus àculaius et A . ladeas, Br.; même planche, fig. 2 e t 3.
5. Lasiopa Peletería, Br.; voy. noire pl. XLIV, fig. 5.
un parmi les insectes. Les Orthoptères deviennent plus nombreux en
Juin et à mesure que les autres insectes disparaissent. Les chaleurs,
devenues beaucoup moins supportables, conviennent particulièrement
aux Criquets, parmi lesquels on remarque l’Italique, qui se retrouve
jusques dans le midi de la France, et la grande espèce connue sous
le nom de Sauterelle voyageuse, qui devient quelquefois le fléau des
contrées où elle s’arrête. Ordinairement celle-ci ne se rencontre en
Morée qu’isolée ; elle n’est alors presque pas plus nuisible que les autres
espèces du même genre. Les dégâts que font les Orthoptères sont d autant
moins sensibles que ces insectes ne parcourent guère que les plaines
les plus arides, dont la plupart demeurent tout-à-fait incultes, telles
que celles de l’Argolide particulièrement.
La Morée, ainsi que l’Egypte, possède une belle Sauterelle d’assez
forte taille, dont M. Savigny a donné la figure dans le grand ouvrage
de la Commission ; elle rentre dans le genre que vient de former
M. Audinet Serville, sous le nom de Dectique1. Les rochers très-secs
et les plus exposés au soleil sont habités presque exclusivement par le
Truxalis nasuta, insecte du midi de l’Allemagne et de la France, ainsi
que de toutes les parties chaudes de l’ancien continent. Plusieurs Mantes
courent sur les rivages arides et brûlans de la côte orientale. Les plaines
de l’intérieur sont alors peuplées par un Orthoptère fort remarquable
dé la famille des Sauterelles éphippigères de M. Latreille,‘qui se trouve
aussi sur la côte d’Asie, dans les environs de Smyrne, où M, Alexandre
Lefebvre l’a rencontré pendant la même saison. Stoll lui assigne pour
patrie l’Argolide ; mais il habite aussi les autres provinces du Péloponèse.
Privé d’ailes, muni de jambes trop faibles pour soulever facilement son
énorme ventre, cet insecte n’exécute que de très-petits sauts, paraît
peu le jour, vit sur les chardons, aux branches desquels il s’accroche,
et laisse suinter en abondance, par des ouvertures particulières, une
liqueur jaune et fétide, dont il inonde les doigts qui veulent le saisir.
Le mâle ne diffère que par l’absence de la courte tarière qui termine
le ventre de la femelle. On trouve cet insecte en grand nombre dans
i . Annales des sciences naturelles, t. XXII.