véritable fléau de cette époque et de tout le reste des chaleurs’. C’est
une espèce de Cousin, différente du Culex pipiens de Linné, qui se
montre en légions épaisses et sonores dès que le soleil a cessé d’éclairer
l’horizon. Elle se répand alors surtout dans les environs des eaux par
milliers et s’attaque de préférence à l’espèce humaine. Sa piqûre occasionne
des enflures souvent considérables, qui ne disparaissent qu’au
bout de quelques heures, durant lesquelles on éprouve les démangeaisons
les plus incommodes. On est fort étonné, en se réveillant, de ne
pouvoir ouvrir les yeux, ou bien d’avoir une joue ou un nez des plus
grotesques ; accidens ordinaires qui résultent de la piqûre de ces insectes.
Ce fléau force les paysans de plusieurs, villages situés au bord de la
mer, à abandonner leurs habitations, e t ‘à se réfugier dans les montagnes
pendant une grande partie de l’été, ou l’on peut dire sans métaphore
que les cousins semblent régner dans les airs. Ces insectes tapissaient
quelquefois l’intérieur de nos tentes au point de leur donner
une couleur noirâtre, et causèrent à la plupart d’entre nous ces insomnies
d’où provint la maladie qui frappa la Commission vers les marécageuses
plaines d’Hélos, à l’embouchure de l’Eurotas.
Les Lépidoptères diminuent; on ne rencontre plus que quelques
Satyres communs à notre pays, mais dont les couleurs sont plus intenses ;
la Coliade Cléopâtre, l’éternelle Belle-dame (Vanessa cardia), et plusieurs
Polyommates. Ce dernier genre, quoique nombreux en espèces,
ne nous en a donné qu’une nouvelle, qui paraît être rare. M. Alexandre
Lefebvre, ce voyageur zélé dont nous avons déjà cité le nom, a rencontré
la même espèce sur la côte d’Asie et en avait reçu un individu
pris sur celle d’Europe près de Constantinople. L’ayant trouvée nous-
même en Morée, nous pouvons assurer que cet insecte est européen,
ce qui jusqu’ici avait paru douteux; il a reçu le nom de P. ottomanus.
De tous les mois de l’été les plus pauvres en insectes sont ceux de
Juillet, d’Août et de Septembre, la chaleur insupportable de cette
partie de l’année empêchant la plupart d’entre eux de se montrer au
milieu du jour, i faut en excepter les Cigales, qui semblent avoir alors
envahi tous les lieux boisés; les Orthoptères sauteurs, les Mantes, qui
courent sur les rochers les plus échauffés par le soleil ; et même la
Gcindèle littorale, qui dispute à ces dernières les localités les plus nues
et les plus chaudes. Quelques Libellulines peuvent compléter ce tableau
de l’entomologie des mois brûlans.
Le Laurier rose, très-répandu par toute la Morée, nourrit la chenille
du beau Sphinx qui porte son nom. Ce n’est qu’à la fin de Septembre
qu’on commence à la voir sur les feuilles de cet arbrisseau, et 1 insecte
parfait sort de sa chrysalide dans le courant de Février, qui pour ce
magnifique animal ouvre le printemps.
Les premières pluies d’Octobre préparant le réveil de la nature assoupie
par de longues chaleurs, et la végétation renaissant sous leur
humide influence, plusieurs Lépidoptères se montrent. C’est alors que
l’on prend le Lithosia pulchella, insecte fort commun pendant le jour
sur les plantes basses ; plusieurs espèces de Brachycères et quelques
Cléonis qui courent parmi la végétation des plaines sont de cette époque
de l’année. Déjà les Mélasomes et les Carabiques se trouvent sous les
pierres ou ils se plaisent si fort durant leur état parfait. Les espèces que
l’on prend alors sont différentes de celles qui sortent au printemps et
en été : on les rencontre principalement dans les endroits assez élevés
pour être à l’abri de l’inondation, dans les terrains pierreux de quelques
hauteurs peu considérables, et dans les ravins, tels que ceux qui existent
derrière la nouvelle ville qui se forme au bas du nouveau Navarin. On
peut dire que ces deux dernières familles d’insectes ouvrent et ferment
le temps des récoltes entomologiques, puisque plusieurs des espèces qui
les composent se prennent à l’entrée de l’hiver et à la fin de cette saison.
Autant qu’on peut en juger par le court séjour que nous avons fait
dans les Gydades, et par les collections qu’Olivier avait déjà rapportées
de ces îles, les insectes y sont à peu près les mêmes que sur le continent.
Notre passage dans l’Archipel eut lieu malheureusement à l’arrière-
saison; ce qui nous empêcha de faire avec fruit des recherches curieuses,
entre autres celles qui regardent l’insecte de la caprification dans l’île
de Syra. Ce que nous pouvons en dire, c’est que cette opération était
alors négligée, comme tant d’autres pratiques d’économie rurale, par
suite des longs malheurs qui affligèrent la Grèce en ces derniers temps,
et nous n’avons pu obtenir des habitans aucun détail satisfaisant à ce