IV.' CLASSE.
INSECT ES .
Par M. A. BRULLÉ.
Plus les animaux sont parfaits, plus leurs organes ont de temps avant d’atteindre
leur entier développement : c’est une vérité reconnue dans les animaux que nous
nommons supérieurs, parce que l’ensemble de leur organisation les place en tête
de la série zoologique. D’après ce principe, les mammifères doivent Occuper le rang
que leur ont assigné les naturalistes, pour être suivis par les oiseaux, plus composés
que les reptiles. Dans cette dernière classe ’d’animaux se présente pour la première
fois un phénomène particulier, celui de la différence d’organisation dans le
jeune âge et dans l’âge adulte. Les amateurs der causes frivoles demanderont peut-
être dans quel but la nature, qui semblait'àYoir marché jusqu’alors d’une manière
si uniforme, a recours à de nouveaux moyens pour arriver à la perfection de l’individu?
Nous ne tenterons pas de répondre à cette sorte de question: le naturaliste
ne s’occupe que des faits, en remarquant que la force organisatrice semble parfois
avoir besoin de repos pour achever son ouvrage, et que ses ressources sont devenues
beaucoup plus faibles. Nous renverrons le lecteur à l ’article Métamorphose
du Dictionnaire classique d’histoire naturelle, où M. Bbry de Saint-Yincent a si
bien examiné la matière.
Dans la classe innombrable des insectes nous observons la même marche que
dans celle des reptiles, mais avec plus de modifications encore. Là, comme si elle
était lasse de produire, elle fait plusieurs pauses, après lesquelles seulement l’animal
a acquis son entier développement. Et l ’on remarque que ceux d’entre les insectes
qui n’acquièrent toute leur perfection qu’après un nombre, pour ainsi dire, de
phases plus considérables, sont ceux chez lesquels on remarque le plus d’intelligence.
Sous ce rapport", les hyménoptères sont très-éloignés de tous, les autres
ordres d’insectes. Il semble que plus ces petits aiîimaux doivent être parfaits, plus
leur développement est lent, et n’est entièrement opéré qu’après plusieurs transr
formations ou chàngemens d’état Telles sont les idées principales que fait naître
la considération des métamorphoses.
Les premiers naturalistes qui ont réfléchi sur l’ensemble des phénomènes zoologiques,
ont été conduits à attacher de l’importance aux métamorphoses. Ils en ont
suivi les différences dans toute la classe des insectes, et les ont prises pour point
de départ de leur classification. Swammerdam surtout, dans ses immortels travaux,
en a . distingué , et signalé les variations. Cet observateur attentif de la nature partage
d’abord ces. animaux en deux grandes divisions : ceux qui sortent parfaits de
leur oeuf, les araignées, etc., qui étaient des insectes pour lui, et ceux qui en sortent
imparfaits. Dans cette dernière se trouvent compris les insectes véritables, où il
considère trois, ordres de métamorphpses.
Le premier de ces ordres, qu’il appelle l’état de nymphe-ver, est celui où les
insectes sortant de l’oeuf, n’ont plus qu’à changer de peau pour passer à l ’état parfait
au bout d’un temps plus ou moins long, sans rester immobiles ni engourdis. Peu
à peu chez ces animaux se fait le développement des parties qui leur manquaient,
mais toutefois sur un corps qui restera toujours le même.
Le second ordre de métamorphoses, en l’état de nymphe ou chrysalide, comprend
les animaux qui sortent de, l’oeuf sous la forme d un ver; leurs parties véritables
sont ainsi cachées: puis,' quittant cette forme, ils perdent le mouvement et
se plongent dans un état de langueur intermédiaire entre l’état de larve et l’état
parfait.1
Troisièmement, enfin Swammerdam nomme état de nymphe vermiforme, celui
où les insectes subissent sous la peau même de la larve cet état intermédiaire entre
le premier et le dernier. Bien entendu, cet ordre ne pourrait être confondu avec
les deux autres, parce que dans ceux-ci la larve se meut ; dans le dernier au contraire
elle devient immobile: mais cette distinction ainsi caractérisée des trois états,
engagea l’auteur à rapporter au dernier un grand, nombre d’insectes des dèux précédées,
et par cela même- toute sa classification est détruite.
Il existe, en effet, dans les insectes plusieurs sortes de chàngemens ou métamorphoses
, mais tous les insectes y sont soumis plus ou moins. Ceux chez qui ces
métamorphoses sont nulles, doivent en être retirés, telles sont les Arachnides, qui
ont au sortir de l’oeuf la forme qu’elles àuront toute leur vie. Cette classe répond
à la première grande division de Swammerdam. Il est une autre sorte de modification
de forme, c’est celle qu’éprouvent les Myriapodes, que j’ai placés dans une
classe particulière, à cause de la particularité qu’ils ont de .s’accroître par 1 addition
de plusieurs segmens à mesure qu’ils avancent en âgé : au sortir de l’oeuf ils en ont
beaucoup moins que lorsqu’ils ont atteint leur entier développement. Cette manière
de croître est si particulière, elle est si différente de celle des. Arachnides et de
celle des vrais insectes, qu’elle isole nécessairement les êtres chez lesquels on la
i. Dans le premier ordre de métamorphoses Swammerdam plaçait les Hémiptères , les Orthoptères
et partie des Névroptères : en cela il suivait la marche de la nature.' Dans le second étaient
compris des Hyménoptères (presque tout cet ordre), quelques .Diptères et les Coléoptères. Dans le
troisième, enfin j il vient replacer la plus grande partie des Diptères* quelques Hyménoptères et,
les Lépidoptères, il fut entraîné dans cette confusion par le grand nombre de variations des métamorphoses
, considérées avec trop de détails et dont il ne saisit pas 1 ensemble.
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