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plus grandes marées n’ont pu attaquer.
Un ruisseau de lave compacte, homogène,
est venu également se loger dans
cette grande galerie , dont il occupoit toute
la longueur ; mais la lave basaltique de ce
courant secondaire, étoit d’une pâte si
égale, si bien amalgamée ; elle avoit une
si grande tendance à se diviser en prismes
réguliers et parfaits, que, placés ho-
risontalement les uns à côte des autres ,
ils n’avoient ni lien ni adhérence entre
eu x , ainsi qu’on peut en juger par une
petite portion qui reste vers la naissance
de la galerie, où la mer n’a pu les atteindre
encore.
Ceux-ci sont véritablement étonnans par
leur belle conservation, et la régularité de
leur forme qui ne laisse rien à désirer ; ils
paroissent avoir été, placés là avec beaucoup
d’art et de soin par la main des hommes
, tant l’espèce de symmétrie et de perfection
qui règne dans leur arrangement
à de quoi -surprendre : il n’y a aucun de
ces prismes, pris au hasard, qui ne fit
l’ornement d’un cabinet d’histoire naturelle.
Leur non-adhérence est la cause de leur
destruction ; car les vagues, trouvant la
plus grande résistance dans les parois de
la galerie , qui sont d’une solidité inébranlable
, exerçoient toute leur fureur contre
les prismes qu’elles deplaçoient et soule-
voient avec facilité, pour les entraîner
ensuite dans le sein de la mer. Ainsi, ce
mur prismatique a été envahi presqu’en
entier ; tandis que le moule qui a concouru
à le former est demeuré comme intact.
Telle est la manière dont les volcans ,
eux qui détruisent, peuvent créer, ou
plutôt simplement imiter, par une suite
de circonstances et d’accidens naturels,
des ouvrages que les hommes ne font
qu’avec beaucoup de peine et une suite
de combinaisons et de moyens difficiles et
longs (1).
(1) Je faisois ces observations sur les lieux au mois d’octobre
1784; Déodat Dolomieu, trois ans après, c’est-à-dire ,
au mois de juillet 1787, en visitant les îles Ponces, découvrit
un mur semblable; mais en prismes beaucoup plus.
petit6. Comme ce rapprochement peut intéresser les natu-
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