Nous ne pouvions pas désirer une traversée
plus heureuse, dans une saison aussi
avancée j nos matelots nous assurèrent même
, et M. Mac-Donald fut leur interprète,
que c’étoit un de ces beaux jours extraordinaires
dans le pays, et qui ne se présentent
pas deux fois dans l’année $ aussi
pour en témoigner leur contentement, ils
se préparèrent à entonner en choeur des
chansons d’Ossian j il n’y a personne dans
ces îles, depuis le vieillard jusqu’au jeune
enfant, qui ne sache par coeur de longues
tirades ou des hymnes de cet antique et
célèbre Barde.
Les chants commencèrent et durèrent
long-tems $ c’étoient des récitatifs monotones,
terminés par des choeurs aussi monotones
: une sorte de dignité, mêlée de
tons plaintifs et mélancoliques, formoit
le caractère principal de ces chants 5 les
rames, qui tomboienttoujours en mesure,
rendoient la monotonie plus complète. Je
m’assoupis , et je dormis bientôt d’un
profond sommeil.
Je ne sais combien de tems il dura ;
mais je fus éveillé par du mouvement et
du bruit, et l’on m’annonça que nous
étions dans les eaux de l’île de Staffa, et
auprès des écueils qui exigeoient de nouvelles
manoeuvres. C’est ici que je vis,
non sans crainte , l’adresse et l’intrépidité
de nos matelots, qui savent saisir les ins-
tans favorables pour ne pas se briser, et
choisir les vagues propices qui leur per- »
mettent de passer sur ces écueils $ ce qui
rend cet abordage si terrible.
Deux hommes de l’île accoururent bientôt,
et nous jetèrent, du haut de leur rocher
, des cordes 5 avec ce secours , et à
l’aide d’une grande lame choisie à propos,
nous débarquâmes au milieu d’un
nuage d’écume.
Ces deux hommes nous conduisirent,
avec les gens de notre petit équipage, sur
un plateau au -dessus de l’île , et dans l’emplacement
où sont situées deux maisons
ou plutôt deux huttes, construites avec
de gros blocs de laves et des prismes tronqués
de basalte, et recouvertes de gazon ;
ne recevant de jour que par la porte, qui
n’a que trois pieds de hauteur, et par la
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