tr i ^ V 6 Ÿ A G E S '
joC. le étoit parfaitement belle , ôc très - propre-
Juiilet. ment habillée , d’une maniéré toute fingu-
liere. Il y avoit , comme le Jour précédent«
une grande table couverte , au haut bout de
laquelle le Roy fe plaça , ôc m’ordonna de
m’afleoir à fa droite, ôc au Secrétaire de fe
mettre a'côté de moy.
On nous prefenta d’abord du thé , ^ôc peu
après la Reine parut, ôc fe mit à côté du Roy
a fa gauche. Dès que nous la vîmes arriver«
nous nous levâmes le Secrétaire & moy ,
& lui fîmes une profonde révérence* mais le
Roy nous ordonna de reprendre nos places.
On fer vit en fuite plufîeurs fortes de *nets,
& entr’autres une affiete de fromage de H ol-
lande , que la Reine pouffa de mon côté,
croyant me faire plaifir, dont je lui témoi-
gnay ma reconnoilfance, ôc en mangeay un
morceau , ôc un peu de tout ce qui étoit fur
la table. Le R‘o y , qui l’obferva, avecplaifir,
me fit demander fi les faufies étôient à mon
goût, .ôc comment je trouvois leur maniéré
d’apprêter les viandes v à quoy je répondis
que je les trouvois admirables , comme de
fait , ôc que je ne pouvois en donner une
meilleure preuve qu’en mangeant comme je
fa’ifois. Le Roy fourit, Ôc en parut content.
Alors lés Danfeufes commencèrent à s’exercer*
La Re ine , fécondé femme de Sa Majef
fié,
b e C o r n e i l l e l e B r u y n . - 6 }
ÆéVôc la plus confidérable de toutes ; nommée
Ratoe csJnoen, do n t on a déjà parle, etoit
â la fleur de fon âg e , belle, bien faite, avec
un teint admirable ,. ôc un air majeftueux,
accompagné de mille agréments, ôc de maniérés
douces ôo engageantes. fille etoit habillée
à la maniéré du païs , cornue les autres
Dames de la Gour: Cette Princeffe fe retira
au bout d’une heure s ôc apres qu on eut
delfervy , le. Roy parcourut une partie de la
Relation de mon Voyage ,que j ’avois apporté
par. fon ordre , ôc que je luiexpliquay, autant
que.le tems le pût permettrej à quoy il
fembla prendre plaifir. Cependant le Roy fit
venir une de fes Concubines , qu’ il fit aifeoir
vis-à-vis de moy. Cette Dame étoit fort re-
plette, ôc fort blanche, avec de beaux cheveux
blonds ; mais elle avoit les joues enflees,
ôc les yeux à demy fermez. Elle me demanda
de quel païs je croyois qu’elle fût. Je répondis
que je ne le fçayois pas ornais quç s’il m’e-
toit permis de le deviner , il me fembloit
qu’elle pourroit être une efclave Ruffienne,
en ayant vû de femblables à Conftantinople,
Je me trompois cependant : c’étoit une Montagnarde,
des Illes b tué es au Sud-fift de Ter-
nate, dont les habitants s’appellent KacierUcke^
Ces gens - là. voyant beaucoup mieux, la nuit
que le jo u r , Ôc ne fçauroient foufrir la lumie-
170.6.
1 x. Jaillit.
Portrait de
la Reine. '
Le Roy
parcourt lat
R elawon du
Voyage de‘
l’Auteur.
.Concubine
du Roy.
KacKerlac-*
xes. -