long-temps de nourriture, fur-tout dans f état dë captivité lorfqu’il
ne fait point d’exercice. J’ai été informé par un homme digne de
foi, qu’un de ces oifeaux de felpèce commune, pris dans un piège
à renard, avoit paifé cinq femaines entières fans aucun aliment, &
n’avoit paru affoibli que dans les huit derniers jours, au bout def-
quëïs on le tua pour ne pas le laiifer languir plus long-temps.
Quoique les aigles en général aiment les lieux déferts & les
montagnes, il eft rare d’en trouver dans celles des prefquîles
étroites, ni dans les îles qui ne iont pas d’une grande étendue;
ils habitent la terre-ferme dans les deux continens, parce qu’ordinairement
les îles iont moins peuplées d animaux. Les anciens
avoient remarqué qu’on n’avoit jamais vu d’aigles dans l’île de
Rhodes, ils regardèrent comme un prodige, que dans le temps
où l’empereur Tibère fe trouva dans cette île, un aigle vint le
pofer liir le toit de la maifen où il étoit logé. Les aigles ne
font en effet que paiïer dans les îles fans s’y habituer, làns y
faire leur ponte; & lorfque les Voyageurs ont parlé d’aigles
dont on trouve les nids fur le bord des eaux & dans les îles,
ce ne font pas les aigles dont nous venons de parler , mais les
balbuzards & les orfraies qu’on appelle communément aigles de
mer, qui font des oifeaux d’un naturel différent , & qui vivent
plutôt de poiiïbn que de gibier.
C ’eft ici le lieu de rapporter les obfervations anatomiques que
l’on a faites fur les parties intérieures des aigles, & je ne peux
les puifer dans une meilleure fource que dans les Mémoires
de M.rs de l’Académie des Sciences, qui ont dilféqué deux
aigles, l’un mâle & l’autre femelle de felpèce commune ( lJ .
Après avoir remarqué que les yeux étoient fort enfoncés,
( l ) Nota. Que quoique M.rs de l’Académie aient penfé que-,ces deux aigles qu’ils o n t . .
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qu’ils avoient une couleur ifabeiie avec l'édat dune topaze, que
ia cornée s’éievoit avec une grande convexité, que la cdnjonétive
étoit d’un rouge fort vif, les paupières très-grandes, chacune
étant capable de couvrir i’oeii entier; iis oflt obfervé fur les
parties intérieures, que ia langue étoit cartilagineuiè par le bout
& charnue par ie milieu; que le larynx étoit carré & non pas
en pointe, comme il l’eft à la plupart des oifeaux qui ont ie
bec droit; quei’oefophage qui étoit fort large, s’éïargiiîbit encore
davantage au-deffous pour former ie ventricule ou eftomac ; qüë
cet eftomac n’étoit point un géfier dur, qu’il étoit ioupie & membraneux
comme i’oefophage, & qu’ii étoit feulement plus épais
par ie fond; que ces deux cavités, tant du bas de i’oefophage que
du ventricule, étoient fort amples & proportionnées à ïa voracité
de i animal; que les inteftins étoient petits comme dans les autres
animaux qui fe nourriiïènt de chair; qu il n y avoit point de coecum
dans ie mâle, mais que la femelle en avoit deux aflèz amples &
de plus de deux pouces de longueur; que ie foie étoit grand &
d’un rouge fort vif, ayant ie iobe gauche plus grand que le droit ;
que ia véficule du fiel étoit grande, & de ia groflèur d’une greffe
châtaigne ou marron; que les reins étoient petits à proportion,
& en coçiparaifon de ceux des autres oifeaux ; que îes tefticules
du mâle n étoient que de la groffeur d’un pois & de couleur de
chair tirant fur ie jaune, & que l'ovaire & le conduit de l'ovaire
dans, ia femelle étoient comme dans les autres oiièaux (m ).
décrits & difféqués étoient de I eipèce du grand aigle (chtyfoetos), il eft aile de reconnoître
par leur propre deicription & en comparant leurs indications avec les miennes, que ces deux
aigles n étoient pas de la grande efpèce, mais de l’elpèce moyenne ou commune.
(m ) Mémoires pour fervit à l’Hiftoire des animaux, partie I I , article de i'aig/e.
Tome L V