différens fons aigres, tons fi défagréables <jue ceïa joint à l’idée
du toifinage des cimetières & des églifes , & encore à l’obfcu-
rité de la nuit, infpire de fhorreur & de la crainte aux enfans,
aux femmes, & même aux hommes fournis aux mêmes préjugés,
& qui croient aux revenans, aux forciers, aux augures ; ils regardent
l’effraie comme l’oifeau funèhrè, comme le meiïager de la
mort ; ils croient que quand il fe fixe fur une maifon, & qu’il
y fait retentir une voix différente de fes cris ordinaires, c’eftpour
appeler quelqu’un au cimetière.
On là diftingue aifément des autres chouettes par la beauté de
fon plumage ; elle eft à peu près de la : grandeur que le'
chat-huant, plus petite qüe la hulotte, & plus grande que la
chouette proprement dite, dont nous parlerons dans l'article'
fùivant ; elle a un pied ou treize pouces de longueur, depuis
le bout du bec jufqü’à l’extrémité de la queue, qui n’a que
cinq pouces de longueur ; elle a le deflüs du corps jaune, onde
de gris & de brun , & taché de points blancs ; le deffous du
corps blanc, marqué de points noirs ; les yeux environnés très-
régulièrement d’un cercle de plumes blanches & fi fines, qu’on
les prendroit pour des poils ; l’iris d’un beau jaune, le bec
blanc, excepté le bout du crochet qui eft brun ; les pieds
couverts de duvet blanc, les doigts blancs & les ongles noirâtres;
il y en a d’autres qui, quoique de la même elpèce, paroifîênt
au premier coup d’oeil être aflèz différentes ; elles font d’un beau
jaune lùr la poitrine & fur le ventre, marquées de même de
points noirs ; d’autres font parfaitement blanches fur ces mêmes
parties, fans la plus petite tache noire ; d’autres enfin font parfaitement
jaunes & fans aucune tache, telle que la planche 440
la repréfente.
■de l ’E f f r a i e o u la E r e s a ï e . 293
J’ai eu plufieurs de ces chouettes vivantes, il eft fort aifé de
les prendre, en oppofant un petit filet, une trouble à poiffon
aux. trous qu’elles occupent dans les vieux bâtimens ; elles vivent
dix ou douze jours dans les vofièiès où elles font renfermées,
mais elles refufent toute nourriture j & meurent d’inanition au
bout de ce temps ; le jour elles iè tiennent fans bouger au
bas de la volière, le foir elles montent au fommet des juchoirs
où elles font entendre leur foufflement, ché, chei, par lequel
elles femblent appeler les autres ; j’ai vu plufieurs fois en effet,
d’autres effraies arriver au foufflement de l’effiaie prifortnière, fe
pofer au-defîûs de la volière, y . finie le même foufflement,
& s’y laiffer prendre au filet Je n’ai jamais entendu leur cri
âcre ( ftridon) , crëï, grëî dans les volières; elles ne pouffent
ce cri qu’en volant & lorfqu’elles font en pleine liberté; la
femelle eft un peu plus groffe que le mâle, & a les couleurs
plus claires & plus diftinétes ; c’eft de tous les ôifeaux noéhimes
celui dont I#- plumage eft le plus agréablement varié.
L’elpèce de l’effraie eft nombreufe, & par-tout très-commune
en Europe; comme on la voit en Suède auffi-bien qu’en
France ( b ) , elle a pu paffer d’un continent à l’autre ; auffi
la trouve-t-on en Amérique, depuis les terres du Nord jufqu’à
celles du Midi.' Marcgrave l’a vue & reconnue au Brefil, où
les naturels du pays l’appellent tuidara (cJ.
L’effraie ne va pas comme la hulotte & le chat-huant, pondre
dans des nids étrangers ; elle dépofe fes oeufs à crud dans des
(b ) Strix capite loe vi, corpore luteo. Linn. Faun. Suec. n.° 4 0 . Nota. M . Saleme s’eft
trompé lorlqu’ii a dit que Linnæus n’en parle point, & qu’apparemment la freiàie ne le
trouve point en Suède. Voyez Salem e, Ornithol. page j o .
e (c) Tuidara Brafüienfibus; ulula eft fpecies-, Germants S c h l e I e r - e u l e , Belgis
kerluyle Deftribitur & à Gefnero. Marcgr. H f i. nat. Brafil. pag. 2 0 5 .
Tome I. E eee