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 obfongue, arrondie comme  celle  d’un navire, & dont le volume  
 eft  fi  léger,  qu’il n’enfonce qu’autant qu’il  faut  pour  le  foutenir,  
 font,  par  toutes  ces  caufes,  prefqu’auffi  propres  à  nager  qu’à  
 voler ;  & même cette faculté  de nager  fe développe  fa première,  
 car  on  voit  les  petits  canards  s’exercer  fiir  les  eaux,  long-temps  
 avait  que  de  prendre  leur  eii'or  dans  les  airs. 
 Dans  les quadrupèdes,  iür-tout dans ceux qui ne peuvent rien  
 faifïr  avec  leurs  doigts,  qui  n’ont  que  des  cornes  aux  pieds  ou  
 des  ongles  durs,  le  fens  du  toucher  paraît  être  réuni  avec  celui  
 du  goût  dans  1a  gueule;  comme  c’eft  fa  feule  partie  qui  foit  
 divifée, & par laquelle  ils puiffent  failir  les corps &  en connoître  
 fa  forme,  en  appliquant  à  leur  furface  fa  langue,  le palais & les  
 dents,  cette partie  eft  le  principal  fiége  de  leur  toucher,  ainfi  
 que  de  leur  goût.  Dans  les  oilèaux,  le  toucher  de  cette  partie  
 eft donc  au moins  aufli imparfait que dans les quadrupèdes, parce  
 que  leur  langue & leur palais  font moins  fenftbles; mais  il paroit  
 qu’ils l’emportent  for  ceux-ci  par  le  toucher  des  doigts,  &  que  
 le  principal  fiége  de  ce  fens  y  réfide ;  car,  en  générai,  ils  fe  
 fervent  de leurs  doigts  beaucoup  plus  que  les  quadrupèdes,  foit  
 pour  faifir  (e j,  foit pour  palper  les  corps;  néanmoins  l’intérieur  
 des doigts étant dans  les oifeaux  toujours  revêtu  d’une -peau  dure  
 &  calleufe,  le  ta61 ne  peut  en  êtré délicat,  &  les  fenfations quil  
 produit doivent  être  affez  peu  diftinéles. 
 (e)  Nota. Nous  avons  vu dans  t’Hiftoire  des  animaux  quadmpèdes,  qui!  n y   en  a  pas  
 un  tiers  qui  fe  fervent  de  leurs pieds  de  d e ^ it   pour  porter  à  leur  gueule,  au  lieu  que  la  
 plupart  des  oifeaux  fe  fervent d’une de  leurs  pattes  pour  porter à   leur bec ; .quoique cet  acte  
 doive  leur  coûter  plus  qu’aux  quadrupèdes,  puilque  n’ayant que deux  pieds  ils  font  obügj|  
 de  fe  foutenir  avec  effort  for  un  feul pendant  que  l’autre  agit ;  au Üeù que le  quadrupède eiï  
 alors  appuyé  fur  les  trois  aunes  pieds  ou  affis  for  les  parties  poftérieures  de  fon  corps. 
 Voici  donc  l’ordre  des  fens,  tels que  fa  Nature paraît  l’avoir  
 établi pour les différens êtres que nous confîdérons. Dans l’homme,  
 le  toucher  eft  le  premier,  c’eft-à -dire,  f e   plus  parfait;  le  goût  
 eft le fécond,  fa vue le troifième,  l’ouïe fe quatrième, &  l’odorat  
 le dernier des  fens.  Dans le  quadrupède,  1 odorat eft le premier,  
 le  goût  le  fécond,  ou  plutôt  ces  deux  fens  n’en  font  qu’un,  fa  
 vue le  troifième,  l’ouïe  le  quatrième,  &  le  toucher  le  dernier.  
 Dans  l’oifeau,  fa  vue  eft  le  premier,  l’ouïe  eft, le  fécond,  le  
 toucher  le  troifième,  le  goût &  l’odorat  les  derniers.  Les  fen-  
 fations  dominantes,  dans  chacun  de  ces  êtres,  foivront le même  
 ordre;  l’homme  fera  plus  ému  par les impreffions du  toucher, le  
 quadrupède  par  celles  de  l’odorat,  &  l’oifeau  par  celles  de  fa  
 vue ;  fa plus  grande partie  de  leurs  jugemens,  de  leurs, déterminations, 
   dépendront  de  ces  fenfations  dominantes;  celles  des  
 autres fens  étant moins  fortes & moins nomhreufos,  feront fahor-  
 données aux  premières, & n’influeront qu’en fécond  fur fa nature  
 de  l’être.  L ’homme  fera  auflî  réfléchi  que  le  fens  du  toucher  
 paraît  grave  &  profond:  le  quadrupède  aura des  appétits  plus  
 véhémens  que  ceux  de  l’homme,  &  l’oifeau  des  fenfations plus  
 légères  &   auffi  étendues  que  l’eft  le  fens  de  la  vue. 
 Mais  il y a un  fixième  fens qui,  quoiqu’intermittent, femble,  
 lorfqu’iï  agit,  commander  à  tpus  les  autres, & produire  alors  les  
 fenfations  dominantes,  les  mouvemens  les  plus  violens,  &   les  
 affermions les plus intimes;  c’eft le  fens de l’amour :  rien n’égale fa  
 force  de  fes  impreffions dans  les animaux quadrupèdes,  rien n’eft  
 plus preffant  que  leurs hefeins,  rien  de  pfus  fougueux  que leurs  
 defirs ;  ils  fe  recherchent avec  l’empreflèment le pfus vif,  & s’u-  
 niifent avec une efpece de fureur.  Dans fes oifeaux  il y  a plus  de  
 tendreffe,  pfus dattachement, plus de morale en amour,  quoique 
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