» Domiligne, font une efpèce Je coq-d’inde ( f j , qui au lieu de
» vivre Je grains, de fruits & d’herbes nomme les autres, fe
» font accoutumés à être nourris de corps morts & de cha-
» rognes ; ils fuivent les chaifeurs, fur-tout ceux qui ne vont â
» la chaflè que pour la peau.des bêtes; ces gens abandonnent
» les chairs, qui pourriraient fur les lieux & infeéteroient l’air
» fans le fecours de ces oifeaux qui ne voient pas plutôt un
>». corps écorché, qu’ils s’appellent les uns les autres, & fondent
» defliis comme des vautours, & en moins Je rien en dévorent
» la chair & biffent les os aulîî nets que s’ils avoieht été radés
» avec un couteau. Les Efpagnols des grandes îles & de b
» terre-ferme, auffi-bien que les Portugais, habitans des lieux
» où l’on fait des cuirs, oiit un foin tout particulier de ces
» oifeaux , à caufe du fervice qu’ils leur rendent, en dévorant
» les corps morts & empêchant ainfi qu’ils ne corrompent l’air;
» ils condamnent à une amende les chalîèurs qui tombent dans
» cette méprife ; cette proteélion a extrêmement multiplié cette
» vilaine eipèce de coq-d’inde; on en trouve en bien: des
» endroits de 1a Guiane, auffi - bien que du Brefil, de la
» nouvelle Elpagne & des grandes îles; ils ont une odeur dé
» charogne que rien ne peut ôter; on a beau leur arracher dé
» croupion dès qu’on les a tués, leur ôter les entrailles, toul
» ces foins font inutiles ; leur chair dure, coriace,; filaffeufe ;
a contraété une mauvaife odeur infupportable ».
« Ces oifeaux (dit Kolbe) fe nourriifent d’animaux morts;
» j’ai moi-même vu pluiieurs fois des fquelettes de vaches, dé
( [ ) N ota. Que quoique cet oifeau reiïêmble au coq-d’inde par la tête, le cou & la
grandeur du corps , i l n’eft pas de ce genre; mais de celui du vautour dont il a non-
ieulement le naturel & les moeurs, mais encore le bec crochu & les ferres. ,
boeufs & d animaux fauvages qu’ils avoient dévorés ; j’appelle
ces relies des fquelettes, & ce n’eil pas fans fondement,
puilque ces oifeaux féparent aVec tant d’art les chairs d’avec
les os & 1a peau , que ce qui relie elt un lquefette parfait,
couvert encore de b peau, fans qu’il y ait rien de dérangé ;
on ne buroit même s’apercevoir que ce cadavre elt vide
que lorlqu’on en ell tout près : pour ceb, voici comme ils
s y prennent ; d’abord ils font une ouverture au ventre de
l’animal, d’où ils arrachent les entmUcs sp’il» mangent, &
entrant dans le vide qu’ils viennent de faire ils féparent les
chairs ; ■ les HoUandois du Cap appellent ces aigles, flront-
vogels ou flront-jagers (t), c’eit-à-dire, oifeaux de fiente,
ou qui vont à b chaflè de fa fiente ; il arrive fouvent qu’un
boeuf qu’on laiflè retourner feu! à fon étable, après l’avoir
ôté de b charue, fe couche fur le chemin. pour fe repofer ;
fi ces aigles l’aperçoivent elles tombent immanquablement lur
lui & le dévorent; lorfqu’elles veulent attaquer une vache ou
un boeuf, elles fe raflèmblent & viennent fondre deffus au
nombre de Cent & quelquefois même davantage ; elles ont
l’oeil fi excellent qu’elles découvrent leur proie à une extrême
hauteur, & dans le temps qu’elles-mêmes échappent à fa vue
b plus perçante, & auflhôt. qu’elles voient le moment favorable
elles tombent perpendiculairement fur l’animal qu’elles
guettent ; ces aigles font un peu plus- groflës que les
oies fauvages , leurs plumes font en partie noires , & en
partie d’un gris clair, mais b partie noire eil fa plus grande; 1
( t ) Cette eipèce d’aigle eft appelée turkey b u sa rd , dindon lu fe , par Cateiby. H iß . nat.
Carol. T ab . v i ; & par Hans Sloane,- H iß . nat.' o f Jama'ic: & c . Note de l’Éditeur de
Kolbe.