paupières font Hanches ; les plumes de tout le corps font brunes
ou noirâtres, avec un reflet de couleur changeante de vert & de
pourpre obfours; les pieds font d’une couleur livide, & les ongles
font noirs : cet oifoau a les narines encore plus longues à proportion
que les autres vautours (q); il eft auffi plus lâche, plus fale
& plus vorace qu’aucun d’eux, fe nourriflânt plutôt de chair morte
& de vidanges, que de chair vivante; il a néanmoins le vol élevé
& allez rapide, pour pourfoivre une proie s’il en avoit le courage,
mais il n’attaque guère que les cadavres; & s’il chaiTe quelquefois,
c’eft, en fe réunifiant en grandes troupes, pour tomber en grand
nombre fur queïqu’animal endormi ou blefle.
Le marchand eft le même oifeau que celui qu’a décrit Kolbe,
fous le nom d’aigle du cap; il fe trouve donc également dans le
continent de l’Afrique & dans celui de l’Amérique méridionale,
& comme on ne le voit pas fréquenter les terres du nord, il paroît
qu’il a traverfé la mer entre le Brefil & la Guinée. Hans Sloane,
qui a vu & obfervé plufieurs de ces oifeaux en Amérique, dit
qu’ils volent comme les milans , qu’ils font toujours maigres. II
eft donc très-poflible quêtant auflî légers de vol & de corps, ils
aient franchi l’intervalle de mer qui fépare les deux continens.
Hemandès dit qu’ils ne fe nourriflènt que de cadavres d’animaux
& même d’excrémens humains ; qu’ils fe ralfemblent fer de
grands arbres d’où ils defcendent en troupes pour dévorer les
charognes ; il ajoute que leur chair a une mauvaife odeur, plus
forte que celle de la çhair du corbeau. Nieremberg dit auffi
. ( f ) N ota. J’ai cru devoir donner une courte deicription de cet oiièau, parce que j’ai
trouvé que celles des autres Auteurs ne s’accordent pas parfaitement avec ce que j’ai vu ;
cependant comme il n’y a que de légères différences, il eft à préfûmer que ce font des
variétés individuelles, & par confoquent leurs deforiptions peuvent être auffi bonnes que la
mienne.
qu’ils volent très-haut & en grandes troüpes; qu’ils paflènt la
nuit fur .des arbres ou des rochers très-élevés, d’où ils partent
le matin pour venir autour des lieux habités ; qu’ils ont la vue
très-perçante, & qu’ils voient de haut & de très-loin les animaux
morts qui peuvent leur fervir de pâture ; qu’ils font
très-filencieux, ne criant, ni ne chantant jamais, & qu’on ne
les entend que par un murmure peu fréquent ; qu’ils font très-
communs dans les terres de l’Amérique méridionale , & que
leurs petits font bbncs' dans le premier âge, & deviennent
enfuite bruns ou noirâtres en grandiflànt. Marcgrave, dans la
defcription qu’il donne de cet oifeau, dit qu’il a les pieds blanchâtres,
les yeux beaux & , pour ainfi dire, couleur de rubis;
la langue en gouttière & en foie fur les côtés. Ximenès alfore
que ces oifeaux ne volent jamais qu’en grandes troupes &
toujours très-haut; qu’ils tombent tous enfemble fer la même
proie qu’ils dévorent jufqu’aux os & fans aucun débat entr’eux,
& qu’ils fe remplilfent au point de ne pouvoir reprendre leur
vol : ce font de ces mêmes oifeaux dont Acofta fait mention
fous le nom de poullajes (r), ce qui font , dit-il, d’une admirable
légèreté, ont la vue très-perçante; & qui font fort a
propres pour nétoyer les cités, d’autant quils n’y lailfent «
aucunes charognes ni chofes mortes ; ils paflènt la nüit fur «
les arbres ou fur les rochers, & au matin viennent aux cités, «
fe mettent fur le fommet des plus hauts édifices, d’où ils «
épient & attendent leur prife ; leurs petits ont le plumage ce
blanc, qui change enfuite en noir avec l’âge ». « Je crois,
dit Defmarchais, que ces oifeaux appelés gallinaches par «
les Portugais, & marchands par les François de Saint- «
(r) Hiftoire des Indes, par Jofeph Acofta, page 1 9 6 .