lés eaux à J’approche de l’hiver, qui non-feulement les
ont vu s’y jeter, mais en ont vu tirer de l’eau, & même
de deflbus Ja glace avec des filets ! que répondre à ceux
qui les ont vu dans cet état de torpeur, reprendre peu
à peu le mouvement & la vie en les mettant dans un
lieu chaud, & en les approchant du feu avec précaution
! je ne trouve qu’un moyen de concilier ces faits;
c’eft de dire que l’hirondelle qui s’engourdit n’eil pas la
même que celle qui voyage , que ce font deux efpèces
différentes que l’on n’a pas diftinguées faute de les avoir
foigneufement comparées. Si les rats & les loirs étoient
des animaux auflï fugitifs & auflï difficiles à obfèrver
que les hirondelles, & que faute de les avoir regardés
d’affez près, l’on prit les loirs pour des rats, il fe trou-
veroit la même contradiction entre ceux qui afTureroient
que les rats s’engourdifTent & ceux qui foutiendroient
qu’ils ne s’engourdiffent pas; cette erreur 'eft affez naturelle
, & doit être d’autant plus fréquente que les
choies font moins connues, plus éloignées, plus difficiles
à obferver. Je préfume donc qu’il y a en effet
une efpèce d’oifeau, voifine de celle de l’hirondelle, &
peut-être auflï reflemblante à l’hirondelle que le loir
l’eft au rat, qui s’engourdit en effet ; & c’efl vraifem-
blablement le petit martinet ou peut-être l’hirondelle
de rivage. II faudrait donc faire fur ces efpèces, pour
reconnoître fi leur fang fe refroidit, les mêmes expériences
que j’ai faites fur l’hirondelle de cheminée; ces
recherches
recherches ne demandent, à la vérité, que dés foins
& du temps, mais malheureufement le temps eft de
toutes les chofes celle qui nous appartient le moins
& nous manque le plus : quelqu’un qui s’appliquerait
uniquement à obferver les oifeaux, & qui fe dévouerait
même à ne faire que l’hiftoire d’un feu! genre,
ferait forcé d’employer plufieurs années à cette efpèce
de travail, dont le réfultat ne ferait encore qu’une
très-petite partie de l’hiftoire générale des oifeaux :
car, pour ne pas perdre de vue l’exemple que nous
venons de donner, fuppofons qu’il foit bien certain
que l’hirondelle voyageufe paffe d’Europe en Afrique;
& pofons en même temps que nous ayons bien obfervé
tout ce qu’elle fait pendant fon féjour dans notre climat,
que nous en ayons bien rédigé les faits, il nous manquera
encore tous ceux qui fe paffent dans le climat éloigné;
nous ignorons fi ces oifeaux y nichent & pondent
comme en Europe; nous ne favons pas s’ils arrivent en
plus ou moins grand nombre qu’ils en font partis; nous
ne connoiffons pas quels font les infedes fur lèfquels
ils vivent dans cette terre étrangère; les autres circon-
ftances de leur voyage, de leur repos en route, de.leur
féjour, font également ignorées, en forte quë l’hiftoire
naturelle des oifeaux, donnée avec autant de détail que
nous avons donné l’hiftoire des animaux quadrupèdes,
ne peut être l’ouvrage d’un feul homme, ni même celui
de plufieurs hommes dans le même temps, parce que
Tome I.