Franchement, on ne peut concevoir l ’audace des
lanceurs de ces affaires et la crédulité des actionnaires,
bernés pendant les deux ou trois premières
années par des rapports imaginaires, des dividendes
pris sur le capital, jusqu’au jour de la liquidation forcée.
L Afrique du Sud. a été un champ nouveau et
fertile pour toutes ces affaires plus financières que
commerciales.
A 1 aide des espérances provoquées par la hausse
des mines, on a créé un certain nombre de sociétés
commerciales dont les débuts ont montré l’organisation
absolument mauvaise. Des sociétés ont été montées
à un capital, dont le quart ou le tiers était donné
aux fondateurs; des actions étaient imposées par force
à des fabricants qui payaient avec des marchandises,
comptées naturellement à un prix surfait; les autres
actions étaient placées peu à peu dans le public et
fournissaient le fonds de roulement ; c’était enfin tout
ce qu il fallait pour provoquer une mauvaise affaire.*
Aussi, le résultat donné par ces sociétés a-t-il été
moins que favorable, et les maisons sérieuses du
Transvaal ne se sont pas gênées pour dauber sur les
Français et sur leurs sociétés. Il convient donc de se
montrer prudent dans le placement de capitaux demandés
pour une affaire commerciale, de s ’assurer de
l’honorabilité des promoteurs, de leurs tenants et
aboutissants. Si ces renseignements sont favorables
et que la société soit conduite par des gens sérieux et
honnêtes, il ne faut pas hésiter à risquer une petite
somme qui, dans la plupart des affaires bien dirigées,
devra donner de bons bénéfices.
L association de quelques personnes est, en effet,
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dans la majorité des affaires, indispensable. Il faut,
dans l’Afrique du Sud, des capitaux relativement importants,
et les jeunes gens qui veulent une affaire ne
les ont pas toujours à leur disposition. S’ils mettent
dans une affaire tout ce qu’ils possèdent, c’est une
preuve qu’ils ont l’intention de faire l ’impossible pour
arriver, en risquant leur capital entier.
Quant aux hommes nécessaires, ils ne peuvent
s’improviser et il faut encore quelques' années pour
en trouver un nombre suffisant en France. C’est aux
maisons de commerce, aux commissionnaires qu’é-
choit le soin de former des jeunes gens sérieux et
honnêtes, de bonne famille, qui, le moment venu,
pourront partir relever un gérant ou fonder un comptoir.
Les maisons de Londres et de Hambourg, les
grosses mâis'ons de Marseille universellement connues,
les Mante, les Fabre, etc., ont toujours sous la main
les employés nécessaires et forment d’avance, dans
leurs bureaux, une pépinière de futurs gérants ou
employés coloniaux.
Voilà donc ce qu’il faut faire : élever les jeunes
gens en leur faisant apprendre les langues, les
mettre dans des maisons de commerce sérieuses,
en leur donnant toujours comme but la recherche, à
l’étranger, d’une position qu’ils auront eux-mêmes à
conquérir.
Mais il s’agit, pour tous ces commerçants montant
une affaire, de vendre leurs marchandises, et ils ont à
lutter, premièrement, contre les prix avilis de la concurrence,
et ensuite, bien que voulant réduire leur
bénéfice pour augmenter leurs affaires, ils ne peuvent
rendre leurs marchandises aux ports d’embarquement