Reconnoif-
fance faite de
plufieurs
ports aux terres
de Feu.
146 V o y a g e
réfugier auprès d’un grand feu que nous nous appliquâmes
à entretenir, tâchant de nous défendre de la pluie
avec la voile du petit canot. La nuit fut affreufe, le vent
& la pluie redoublèrent & ne nous laifferent d’autre parti
à prendre que de rebrouffer chemin au point du jour.
Nous arrivâmes à la frégate à huit heures du matin, trop
heureux d’avoir gagné cet afyle ; car bientôt le tems devint
fi mauvais, qu’il eût été impoffible de nous mettre
en route pour revenir. 11 y eut pendant deux jours une
tempête décidée, & la neige recouvrit toutes les montagnes.
Cependant nous étions dans le coeur de l’é té, &
le foleil étoit près de dix-huit heures fur l’horifon.
Quelques jours après j’entrepris avec plus de füccès
une nouvelle courfe pour vifiter une partie des terres de
Feu & pour y chercher un port vis-à-vis le cap Fonvard ;
je me propofois de repaffer enfuite au cap Holland & de
reconnoître la côte depuis ce cap jufqu a la baie Fr an-*
çoife ; ce que nous n’avions pu faire dans la première tentative.
Je fis armer d’efpingoles & de fufils la chaloupe de
laBoudeufe & le grand canot de l’Etoile j & le 2,7 à quatre
heures du matin je partis du bord avec Mrs de Bournand,
d’Oraifon 8c le Prince de Naffau. Nous mîmes à la voile à
la pointe occidentale de la baie Françoife pour traverfer
aux terres de Feu, où nous terrîmes fur les dix heures à
l’embouchure d’une petite riviere, dans une anfe de fable
mauvaife même pour les bateaux.Toutefois dans un tems
critique ils auroient la reffource d’entrer à mer haute dans
la riviere où ils trouveroient un abri. Nous dinâmes fur
fes bords dans un aflèz joli bofquet qui couvroit de fon
ombre plufieurs cabanes fauvages. De cette ftation nous
relevâmes la pointe du Ouefl: de la baie Françoife au