Détails fur
l’ile Boëro.
3IO ... V O Y A G F.
Réfident noùs loua à la journée.L’Etoileprofitade ce tems
pour garnir les chouquets de Tes mâts majeurs, lefquels
avoientun jeu dangereux. Nous avions affourché en arrivant
; mais fur ce que les Hollandois nous dirent de la
bonté du fond & de la régularité des brifes de terre & du
large, nous relevâmes notre ancre d’affourche. Effeêfive-
ment nous y vîmes les bâtimens Hollandois fur une feule
ancre.
. Nous eûmes pendant notre relâche ici le plus beau tems
du monde. Le thermomètre y montoit ordinairement à 1 3 d
dans la plus grande chaleur du jour j la brife du Nord-Eft
au Sud-Eft le jour, changeoit fur le foir ; elle venoit alors
de terre, & les nuits étoient fort fraîches. Nous eûmes oc-
cafion de connoître l’intérieur de l’île ; On nous permit d’y
faire plufîeurs chaffes de cerfs, par battues, auxquelles
nous prîmes un grand plaifir. Le pays eft charmant, entrecoupé
de bofquets, de plaines, & de coteaux dont les vallons
font arrofés par de jolies rivières. Les Hollandois y
ont apporté les premiers cerfs qui s y font prodigieufeinent
multipliés, & dont la chair eft excellente. Il y a auffi un
.grand nombre de fangliers, & quelques efpeces de gibier
à plumes.
£ On donne à l’île de Boëro ou Burro environ dix-huit
lieues de l’Eft à l’Oueft, & treize du Nord au Sud. Elle
étoit autrefois foumife au Roi de Ternate, lequel en tiroit
tribut. Le lieu principal eft Cajeli, fitué au fond du golfe
de ce nom, dans une plaine marécageufe, qui s’étend
près de quatre milles entre les rivières Soweill & Ablo.
Cette derniere eft la plus grande de l’île , & toutefois fes
eaux font fort troubles. Le débarquement eft ici fort incommode,
fur-tout de baffe mer, pendant laquelle il faut
a u t o u RI ' D ü M''o N D E.
que les-bateaux s'arrêtent fort loin de la: plage* Xa loge-
Hollandoife, & quatorze habitations.d’indiens,: autrefois
difperfées en divers endroits de l’île, mais aujourd’hui
réunies autour du comptoir, forment le bourg de Çajeli.
On y avoit d’abord conftruit un fort en pierre : un accident
le fit fauter en 1689, & depuis ce tems on s’y contente
d’une enceinte de foibles paliffades, garnie de fix canons
de petit calibre, tant bien que mal en batterie ; c’eft ce
qu’on appelle le fort de la Défonfe, & j’ai pris ce nom pour
un fobriquet. La garnifon,. aux ordres du Réfident, eft
compofée d’un Sergent & 1 5 hommes:, fur toute l’île il
n’y a pas cinquante blancs. Quelques-autres negreries y
font répandues, 011 l’on cultive du riz. Dans le tems où
nous y étions j les forces des Hollandois y étoient augmentées
par trois navires , dont le plus grand étoit le Draak,
fénâult de quatorze canons,, commandé pan un Saxon
nommé Kop-le-Clerc. Son équipage eft de cinquante Eurcé
péens, & fa deftination de croifër dans les Moluques,
fur-tout contre les Papous & les Ceramois.
Les naturels du pays fe divifenfen deux claffes, les
Maures & les Alfouriens. Les premiers font réunis fous la
loge & fournis entièrement aux Hollandois qui leur infpi-
rent une grande crainte des nations étrangères. Ils font
obfervateurs zélés de la loi de Mahomet, c’eft-à-dire qu’ils
fe lavent fouvent, ne mangent point de porc, & prennent
autant de femmes qu’ils en peuvent nourrir. Ajoutez à
cela qu’ils en paroiffent fort jaloux & les tiennent renfermées.
Leur nourriture eft le fagu, quelques fruits, & du
poiffon. Les jours de fêtes ils fe régalent avec du riz que
la compagnie leur vend. Leurs chefs ou omzoïicxfe demie nt
auprès du Réfident, qui paroît avoir pour eux quelques
Sur les natif
rels du pays.
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