1768.
Juillet.
Parages dangereux.
1 66 V O Y Ai G E
1er. Il eft vrai qu’une forte marée qui venoit du Nord &
portoit dans le Sud Eft, nous faifoit efpérer d’y trouver
un débouché. Le fort de la marée fe fit fentir depuis quatre
heures jufqu’à cinq heures & demie du foir ; les vaifîeaux,
quoique poulfés d’un vent très-frais, gouvernoient avec
peine. La marée mollit à fix heures. Pendant la nuit nous
louvoyâmes du Sud au Sud-Sud-Ouefi; fur un bord, de
l’Eft-Nord- Efi: au Nord-Efifur l’autre. Le tems fut à
grains avec beaucoup de pluie.
Le. I er Juillet à fix heures du matin nous nous retrouvâmes.
au même point où nous étions la veille à- l’entrée de
la nuit , preuve qu’il y avoit eu flux & reflux. Nous?
gouvernâmes au Nord-Ouefl: & Nord-Queft-quart-Nord.
A; dix heures nous donnâmes dans un pafiage large environ
de quatre à cinq lieues entre la côte prolongée jufqu’ici
à l’Ell & les terres occidentales. Une marée très-forte ,
qui porte Sud-EA & Nord-Quefi:, forme au milieu de ce
pafiage un raz qui le traverfe & où la mer s’élève & brife
comme s’il y avoit des roches, à, fleur d’eau. Je le nommai
Denis y du nom de mon maître d’équipage , bon &
ancien ferviteur du Roi. L ’Etoile qui le pafîa deux heures
après nous & plus dans l’Ouefi, s’y trouva fur 5 brades
d’eau fond de roches. La mer y étoit alors fi mauvaife ,
qu’ils furent contraints de fermer les écoutilles., A- bord,
de la frégate nous y fondâmes par 44, brades ,, fond de
fable, gravier, coquilles & corail. La côte de l’Efi commençait
ici â s’abaifîer & à tourner au Nord, Nous y ap-
perçûmes, étant à7peu près au milieu du pafiage, une jolie
baie dont l’apparence promettoit un bon mouillage. Il
faifoit prefque calme & la marée dont le cours était alors
au Nord Oueft, nous la, fit dépafler en un inftant. Nous