Conje&ures
fur ces terres.
que nous les relevâmes deTEft auNord-Nord-Eff,à vingt
gu-vingt-cinq lieues de diflance.
Le 29 au matin nous ne vîmes, plus de1.terres , nous
avions gouverné fur l’Ouefl-Nord-Ouefl. Je nommai ces
terres que nous venions de découvrir Farchipel des grandes
Cyclades, A en juger par ce que nous en avons parcouru
& par ce que nous avons apperçu dans le lointain , il contient
au-moins trois degrés en latitude & cinq en longitude.
Je croirois même volontiers que c’eft fon extrémité
feptentrionale que Roggewin a vue fous le onzième parallèle
& qu’il a nommé Thienhoven & Groningue. Pour
nous , quand nous y atterrîmes, tout devoit nous perfua-
der que nous étions à la terre aujlrale du Saint-Efprit. Les
apparences fembloient fe conformer au récit de Quiros,
& ce que nous découvrions chaque jour encourageoit nos
recherches. Il eft bien fingulier que précifément par la
même latitude & la même longitude où Quiros place fa
grande baie de Saint-Jacques & Sraint-P hilippe , fur une
côte qui paroiffoit au premier coup d’oeil celle d’un continent,
nous ayons trouvé un paffage de largeur égalé a
celle qu’il donne à l’ouverture de fa baie. Le Navigateur
Efpagnol a -t-il mal vû? A-t-il voulu mafquer fes découvertes
? Les Géographes avoient-ils deviné, en faifant de la
terre du Saint-Efprit un même continent avec la nouvelle
Guinée ? Pour réfoudre ce problème , il falloir fuivre
encore le même parallèle pendant plus de trois cents
cinquante lieues. Je m’y déterminai, quoique l’état & la
quantité de nos vivres nous avertiffent d’aller promptement
chercher quelque établiffement Européen. On verra
qu’il s’en eft peu fallu que nous n’ayons été les viêhmes de
notre confiance.
a u t o u r d u M o n d e . 253
M. Verron fit plufieurs obfervations pendant le mois Différences
de Mai, & leurs réfultats déterminèrent'notre : Longitude &îesobferv*
le 5, le 9, le 13 & le 22. Il ne s’étoit pas encore trouvé tions-
autant de différences entre les obfervations & l’eftime de
nos routes , ,différences toutes du même côté.-Le 5 à midi
j etois plus Eft que l’obfervé de 4d 00^42".; le 9 de 4d
2,3' 4" ■ le 13 de 3d 38' 15 "5 le 22 enfin de 3d 3 5 Toutes
ces différences, on le vo it, annonçoient que depuisl’île
deTaiti les courans nous avoient beaucoup entraînés dans
l’Ouefl. On expliqueroit par-là comment tous les navigateurs
qui ont traverfé l’océan Pacifique, ont rencontré la nouvelle
Guinée beaucoup plutôt qu’ils ne l’auroient dû.Auflx
ont-ils donné à cet océan une étendue de l’Eft à l’Ouefl
beaucoup moindre que celle qu’il a véritablement. Je dois
toutefois faire remarquer que pendant la faifon où le foleil
a été dans l’hémifphere auftral, nos eftimes ont été dans
l’Oueft des obfervations , & que depuis qu’il a paffe de
l’autre côté, nos différences ont changé. Le thermomètre
dans ce mois a été communément entre 19 & 20 degrés,
il a deux fois baiffé à 18 & une feule fois à 1 j.
Tandis que nous étions entre les grandes Cyclades ,
quelques affaires m’avoient appellé à bord de l’Etoile, &
j’eus occafion d’y vérifier un fait affez fingulier. Depuis
quelque tems il couroit un bruit dans les deux navires
que le domeftique de M. de Commerçon, nommé Baréy
étoit une femme. Sa ffruélure, le fon de fa voix, fon menton
fans barbe , fon attention fcrupuleufe à ne jamais
changer de linge , ni faire fes nécefîités devant qui que ce
fût, plufieurs autres indices avoient fait naître & accrédi-
toient le foupçon. Cependant comment reconnoître une
femme dans cet infatigable Baré, botanifte déjà fort exercé