d’une lieue fur le terrein pour y jouir de l’herbe fraîche &
du foleil. Il paroît que le lion décrit dans le Voyage du
Lord Anfon, devroitêtre, àcaufe de fa trompe , regarde
plûtôt comme une efpece d’éléphant marin, d’autant plus
qu’il n’a pas de crinière, qu’il eft de la plus grande taille,
ayant jufqu’à vingt deux pieds de longueur; & quil y a
une autre efpece beaucoup plus petite, fans trompe &
caraélérifée par une crinière de plus longs poils que ceux
du relie du corps, qu’on pourroit regarder comme le vrai
lion. Le loup marin ordinaire n’a ni crinière ni trompe ;
ainfi ce font trois efpeces bien aifées à dillinguer. Le poil
de tous ces animaux ne recouvre point un duvet, tel qu on
le trouve fur ceux qu’on pêche dans l’Amérique feptentno-
nale & dans la riviere de la Plata. Leurs huiles & leurs
peaux avoient déjà formé une branche de commerce.
Nous n’avons pas pu reconnoître une grande quantité
d’efpeces de poiffons. Nous nommâmes celui que nous
pêchions le plus communément muge ou mulet, auquel il
reffemble affez. Il s’en trouve de trois pieds de longueur,
qu’on féchoit. Le gradeau eft auffi très-commun ; il y en a
déplus d’un pied de long. La fardine ne monte qu’au
commencement de l’hiver. Les mulets pourfmvis par les
loups marins, fe creufent des trous dans les terres va-
feufes q u i bordent les ruiffeaux où ils fe réfugient, & nous
les prenions avec facilité , en enlevant la couche de terre
tourbeufe qui couvre leurs retraites. Indépendamment de
ces efpeces, on en prenoit à la ligne une infinité d autres,
mais fort petits, parmi lefquels il s’en trouvoit un qu’on
nomma Brochet tranfparent. Il a la tête de ce poiffon, le
corps fans écailles, & abfolument diaphane. On trouve
auflfi quelques congres fur les roches 3 & le marfoum blanc
ou taupe fe montre dans les baies pendant la belle faifon.
Si on avoit eu du tems & des hommes à employer pour la
pêche au large, on auroit trouvé beaucoup d’autres poiffons,
& indubitablement des foies , dont on a rencontré
quelques-unes échouées fur les fables. On n’a pris qu’une
feule efpece de poiffon d’eau douce, fans écailles , d’une
couleur verte, & de la taille d’une truite ordinaire. On a
fait,il eft vrai, peu de recherches dans cette partie ; le tems
manquoit, & les autres poiffons étoient en abondance.
Quant aux cruftacées, onn’enadiftingué que trois efpeces
fort petites, l’écreviffe rouge, même avant que d’être
cuite , c’eft plutôt une falicoque ; le crabe à pattes bleues
qui reffemble affez au tourelourou, & une efpece de chevrette
très-petite. On ne ramaffoit que pour les curieux
ces trois fortes de cruftacées, ainfi que les moules & autres
coquillages qui n’ont pas le goût aufli fin que ceux de
France.
Le pays paroît être abfolument privé d’huîtres.
Enfin pour préfenter un objet de comparaifon avec
une île cultivée en Europe , on peut citer ce que dit Puf-
fendorf en parlant de l’Irlande , fituée à la même latitude
dans l’hémifphere boréal, que les îles Malouines dans
l’autre hémifphere. Sçavoir, « que cette île eft agréable
» par la bonté & la férénité de fon air, la chaleur &: le
» froid n’y font jamais exceffifs. Le pays bien coupé de
» lacs & de rivières, offre de grandes plaines couvertes
» de pâturages excellens, point de bêtes venimeufes, les
» lacs & les rivières poiflonneufes, & c ». Voyez l’Hiftoire
univerfelle.
K.
Des Cruftacées.