fruEftfufoerutxs in-
pour trouver
des vivres.
Defcription
d’une belle
cafcade.
fitchercher un afyle dans les bateaux. Au refie il fembie
que dans cette faifon les pluies foient ici fans interruption.
Un orage n’attend pas l’autre, letonnere gronde prefque
continuellement & la nuit donne l’idée des ténèbres du
chaos. Cependant nous allions tous les jours dans les bois
chercher des lataniers & des palmiftes, & tâcher de tuer
quelques tourterelles. Nous nous partagions en plufieurs
bandes, & le réfultat ordinaire de ces caravanes pénibles
étoitde revenir trempés jufqu’auxos& les mains vuides. On
découvrit cependant les derniers jours quelques pommes
de mangles & des prunes monbin ; c’eût été un fecours
utile fi on. en eût eu connoiffance plutôt. On trouva auffi
une efpece de lierre aromatique , auquel les Chirurgiens
crurent reconnoître une vertu antifcorbutique ; du-moins
les malades qui en firent des infufions & s’en lavèrent, ont-
ils éprouvé quelque foulagement.
Notre fîtua-
tion empire
chaque jour.
Nous avons tous été voir une cafcade merveilleufe qui
fourniffoit les eaux du ruiffeau de l’Etoile. L ’art s’efforce-
roit en vain de produire dans le palais des Rois ce que la
nature a jetté ici dans un coin inhabité. Nous en admirâmes
les groupes faillans dont les gradations prefque régulières
précipitent & diverfifient la chûte des eaux ; nous
fuivions avec furprife tous ces maffifs variés pour la figure
& qui forment cent baffins inégaux , où font reçues les
napes de cryftal coloriées par des arbres immenfes, dont
quelques-uns ont le pied dans les baffins même. C ’efi:
bien affez qu’il exifte des hommes privilégiés, dont le
pinceau hardi peut nous tracer l’image de ces beautés inimitables
; cette cafcade mériteroit le plus grand peintre.
Cependant notre fituation empiroit à chaque inflant
que nous demeurions ici & que nous perdions fans faire
de chemin. Le nombre & les maux de nos fcorbutiques
augmemoient. L ’équipage de l’Etoile étoit encore dans
un état plus trifte que le nôtre;- Chaque jour j’envoyois
des canots dehors reconnoître le' tems. C ’étoit conftam-
ment le vent de Sud prefque en tourmente & une mer
affreufe. Avec ces circonftances l’appareillage étoit im*-
poffible, d’autant plus qu’on ne fçauroit appareiller de ce'
port qu’en prenant Une croupiere fur une ancre, qu’il faut
fortir tout de fuite & qu’on n’eût pu embarquer au large la
chaloupe qui feroit reliée pour lever l’ancre que nous n’étions
pas dans le cas de perdre. Ces obftacles nie déterminèrent
à aller le 23 reconnoître une pafie entrél’i/e des
Marteaux & la grande terre. J’en trouvai une , par laquelle
nous pouvions fortir avec le vent de Sud en embarquant
nos bateaux dans le canal. Elle avoit, ileftvrai, d’aflez
grands inconvéniens , & nous ne fûmes pas heureufement
dans le cas de nous en fervir.
Il avoit plu fans interruption toute la nuit du 2 3 au 24; Sortje
l’aurore amena le beau tems & le calme. Nous levâmes port Pralün.
auffi-tôt notre ancre d’affourche ; nous envoyâmes établir
une amarre à des arbres, une hauffiere fur une ancre à
jet,& nous virâmes à pic fur l’ancre de dehors. Pendant la
journée entière nous attendîmes le moment d’appareiller;
déjà nous en défefpérions & l’approche de la nuit nous
forçoit à nous réamarrer, lorfqu’à cinq heures & demie il
fe leva une brife du fond du port. Auffi-tôt nous larguâmes
notre amarre de terre, filâmes le grelin de l’ancre à jet
fur laquelle l’Etoile devoit appareiller après nous, & en
une demi-heure nous fumes fous voiles. Les canots nous
remorquèrent jusqu’au milieu de la pafle, où nous reffen-
tîmes aflez de vent pour nous paffer de leur fecours. Nous
N n ij