Obfervations
aftronomiques.
Seconde di-
vifion d’îles.
Mai.
Vue de nouvelles
îles.
± 36 V o y a g e
voyage étoit-il un jeune homme de vingt ans : le fécond
étoit du même â ge, & les Aide-Pilotes naviguoient pour
la première fois.
Mon eftime comparée deux fois dans ce mois avec les
obfervations aftronomiques de M. Verron, différé la pre-
mierefois,&c’étoitàTaiti,de 1 3' 10", dont j’étois plus Oueft*
la fécondé fois, qui eft le 27 à midi, de 1d 13 ' 3 7 11 dont j é-
tois plusEff quel’obfervé. Aurefteles différentesîles découvertes
dans ce mois, forment la fécondé divifion des îles de
ce vafte Océan. Je l’ai nommée l'archipel de Bourbon.
Le 3 Mai, prefque à la pointe du jour , nous découvrîmes
une nouvelle terre dansleNord-Oueft a.dix ou douze
lieues de diftance. Les vents étoient de la partie duNord-
Eft, & je fis gouverner auvent de la pointe feptentrionale
de cette terre, laquelle eft fort élevée, dans 1 intention de
la reconnoître. Les connoiffances nautiques d’Aotourou ne
s’étendoient pas jufque-là : car fa première idée, en voyant
cette terre, fut qu’elle étoit notre patrie. Dans la journée
nous effuyâmes quelques grains, fuivis de calme , de pluie
& de brifes du Oueft, tels que dans cette mer on en éprouve
aux approches des moindres terres. Avant1 le coucher
du foleil, nous reconnûmes trois îles, dont une beaucoup
plus confidérable que les deux autres. Pendant la nuit,
que la lune rendoit claire, nous confervames la vue de terre
; nous courûmes deffus au jour, & nous prolongeâmes
la côte orientale de la grande-île, depuis fa pointe du Sud
jufqu à celle du Nord * c’eft fon plus grand côté-qui peut
avoir trois lieues * l’île en a deux de l’Eft à l’Oueft. Ses côtes
font par-tout efcarpées, & ce n’eft , à proprement parler,
qu’une montagne élevée, couverte d’arbres jufqu’au fom-
met, fans vallées ni plage. La mer brifoit fortement le
A U T O U R D U M" O N D E. 2 3 7
long de là riye. Nous y vîmes des feux , quelques caban-
nes couvertes de joncs & terminées en pointe , conftrui-
tes à l’ombre des cocotiers, & une trentaine d’hommes qui
couroient fur le bord de la mer. Les deux petites îles font à
une lieue delà grande dans l’Oueft-Nord-O.ueft du monde,
fituation qu’elles ont aufli entre elles. Un bras de. mer peu
large les, fépare, & à la pointe du Oueft de la plus occidentale
il y a un îlot. Elles n’ont pas plus d’une demi-lieue
chacune, & leur côte eft également haute & efcarpée.
A midi je faifois route pour palier entre ces petites îles Echanges
& la grande , lorfque la vue d’une pirogue qui venoit à f^ la^ les
nous me fit mettre en panne pour l’attendre. Elle s’approcha
à une portée de piftolet du vaiffeau fans vouloir
l’accofter, malgré tous les lignes d’amitié dont nous pouvions
nous avifer vis-à-vis de cinq hommes qui la conduis
e n t . Ils étoient nuds à l’exception des parties naturelles,
& nous mônttoient du cocos & des racines. Notre Taitien
fe mit nud comme eux & leur parla fa langue, mais ils ne
l’entendirent pas * ce n’eft plus ici la même nation. Laffe
de voir que, malgré l’envie qu’ils témoignoient de diver-
fes bagatelles qu’on leur montroit, ils n’ofoient approcher,
je-fis mettre, à la mer le petit canot. Auffitôt qu’ils
l’apperçurent, ils forcèrent de nage pour s’enfuir, & je ne
voulus pas qu’on les pourfuivît. Peu après on vit venir
plufieurs autres pirogues, quelques-unes à la v oile. Elles té-
moigneremmioins -de méfiance que la première, & s’approchèrent
affez pour rendre les échanges praticables ;
mais aucun infulaire ne voulut monter à bord. ; Nous eû-
mès d’eux des ignames, des noix de cocos,,une poule
d’eau d’un fuperbe plumage & quelques morce,aux d’une
fort belle écaille. L’un d’eux avoit un coq qu’il ne voulut