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au port par ta ftüte d’un ignorant auquel f ordonnance
nous forçoit de nous livrer. Nous en fûmes
quittes pour quarante-cinq pieds de notre fauffe quille
qui furent emportés.
Avis nanti- Cet accident, dont il s’en eft peu fallu que nous ne fuf-
que‘ fions 'la viftime, me met dans le cas de faire la réflexion
Fuivante. Lorfqii’on en veut à l’île de France, & que l’on
verra que de jour on ne peut atteindre l’entrée du port,
ta prudence exige que de bonne heure on prenne fon
parti de ne pas s’engager trop près de ta terre. 11 convient
de s’entretenir pour 1a nuit en-dehors & au vent de 1 île
Ronde , non en cape, mais en louvoyant avec un bon
corps de voiles à caufe des courans. Au refte il y a mouillage
entre les petites îles ; nous y avons trouvé de 30325
braffes fond de fable; mais il n’ytaudroit mouiller que dans
le cas d’une extrême néceffité.
Relâche à Le 8 dans 1a matinée nous entrâmes dans le port où
l’ile de Fran- nous fûmes amarrés dans la journée. L’Etoile parut à fîx
heures du foir & ne put entrer que le lendemain. Nous
nous trouvâmes être en arriéré d’un jour, & nousy reprîmes
1a date de tout le mondei
Détail de ce Dès le premier jour j’envoyai tous mes malades à Phô-
que nous y pjtaj ^ je donnai letat de mes befoins en vivres & agrès,
& nous travaillâmes fur-le-champ à difpofer ta frégate
pour être carénée. Je pris tous les ouvriers du port qu’on
put me donner & tous ceux de l’Etoile, étant déterminé
à partir auffitôt que je ferois prêt. Le 16 & le 18 on chauffa
m frégate. Nous trouvâmes fon doublage vermoulu ,
mais fon franc-bord étoit auffi fain qu’en fortant du chantier.
• Nous fûmes obligés de changer ici une partie de notre
mâture.
a u t o u r d u M o n d e . 377
mâture. Notre grand mât avoir un enton au pied & devoir
manquer par-là auffitôt que par 1a tête, où la meche
étoit caffée. On me donna un grand mât d’une feule pièc
e , deux mâts de hune, des ancres, des cables & du fi-
lain dont nous étions abfolument indigens. Je remis dans
les magafins du Roi mes vieux vivres, & j’en repris pour
cinq mois. Je livrai pareillement à M. Poivre , Intendant
de l’île de France, le fer & les clous embarqués à bord
de l’Etoile, ma cucurbite, ma ventoufe, beaucoup de
médicamens, & quantité d’effets devenus inutiles pour
nous, & dont cette colonie avoit befoin. Je donnai auffi
à 1a légion vingt-trois foldats qui me demandèrent à y
être incorporés. Meffieurs de Commerçon & Verron con-
fentirent pareillement à différer leur retour en France ; le
premier pour examiner l’hiftoire naturelle de ces îles &
celle de Madagafcar ; le fécond pour être à portée d’aller
obferver dans l’Inde le paffage de Venus; on me demanda
de plusM. de Romainville Ingénieur, & quelques jeunes
volontaires & pilotinspour ta navigation d’Inde en Inde.
Il n’étoit pas malheureux, après un auffi long voyage ,
d’être encore en état d’enrichir cette colonie d’hommes
& d’effets néceffaires. La joie que j’en reffentis fut cruellement
altérée par la perte que nous y fîmes du Chevalier
du Bouchage, Enfeigne de vaiffeau, fujet d’un mérite distingué,
qui joignoit aux connoiffances qui font le grand
Officier de mer, toutes les qualités du coeur & de l’efprit
qui rendent un homme précieux à fes amis. Les foins af-
fe&ueux & l’habileté de M. de ta Porte, notre Chirurgien-
major , n’ont pu le fauver. Il mourut dans mes bras le 19
Novembre, d’une diffenterie commencée à Batavia. Peu
de jours après un jeune fils de M. le Moyne Commif-
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