les campagnes. Tout le refte eft furmonté par des herbes
menues plus vertes & plus fournies dans les endroits
abreuvés. Les arbuftes furent d’une grande reffource pour
le chauffage , on les^éferva enfuite. pour les fours ainfi
que la bruyere ; les fruits rouges de éelle-ci nous atti-
roient beaucoup de gibier dans la faifon.
Le gommier , plante nouvelle & inconnue en Europe ,
mérite une defcription plus étendue. Elle eft d’un verd de
pomme & n’a en rien la figure d’une plante ; on la pren-
droit plutôt pour une loupe ou excroiffance de terre de
cette couleur j elle ne laiffe voir ni pied ni branches ni
feuilles. Sa furface de forme convexe préfente un tiffu fi
ferré , qu’on n’y peut rien introduire fans déchirement.
Notre premier mouvement étoit de nous affeoir ou de
monter deffus ; fahauteur n’eft gueresdéplus d’un pied &
demi. Elle nous portoit aufîi furement qu’une pierre fans
en être foulée ; fa largeur s’étend d’une maniéré difpro-
portionnée à fa forme , il y en a qui ont plus de fix pieds
de diamètre fans en être plus hautes. Leur circonférence
n’eft régulière que dans les petites plantes qui repréfen-
tent affez la moitié d’une fpherè^ mais lorfqu’elles fe font
accrues, elles font terminées par des boffes & des creux
fans aucune régularité. C ’eft en plufieurs endroits de leur
furface que l’on voit en gouttes de la groffeur d’un pois,
une matière tenace & jaunâtre qui fut d’abord appellée
gomme mais comme elle ne peut fe difloudre que dans
les fpiritueux , elle fut décidée réfine. Son odeur eft forte,
affez aromatique, & approche de celle de la térébenthine.
Pour connoître l’intérieur de cette plante , nous la
coupâmes exa&ement fur le terrein & la renverfâmes.
Nous vîmes en la brifant qu’elle.part d’un pied d’où selèvent
une infinité de jets concentriques, compofés de
feuilles en étoiles enchâffées les unes fur les autres &
comme enfilées par un axe commun. Ces jets font blancs
jufqu’à peu de diftance de la, furface, où l’air les colore en
verd ; en les brifant il en fort un fuc abondant & laiteux,
plus vifqueuxque celui des thytimales; le pied eft une
fource abondante de ce fuc, ainfi que les racines qui s’étendent
horizontalement , & vont provigner à quelque
diftance ; de forte qu’une plante n’eft jamais , feule. Elle
paroît fe plaire fur le penchant des collines , & toutes les
expofitions lui font indifférentes. Ce ne fut que latroifieme
année qu’on chercha à connoître fa fleur & fa graine,
l’une & l’autre fort petites, parce qu’on étoit rebuté de
n’avoir pas pu en tranfporter en Europe. Enfin on a apporté
quelques graines pour tâcher de s’approprier cette
finguliere & nouvelle plante qui pourroit même être utile
en médecine, plufieurs matelots s’étant fervis de fa réfine
avec fuccès pour fe guérir de légères bleffures.- Une choie
digne de remarque, c’eft que cette plante ainfi retournée
, perd fa réfine à l’air feul, & par le lavage des pluies.
Comment accorder cela avec fa diffolution dans les feuls
fpiritueux ? En cet état elle étoit d’une légèreté furpre-
nante & brûloit comme de la paille.
Après cette plante extraordinaire on en rencontroit une
d’une utilité éprouvée; elle forme un petit arbriffeau, &
quelquefois rampe fous les herbes•& le long des côtes.
Nous la goûtâmes par fantaifie, & nous lui trouvâmes un
goût de fapinette ; ce qui nous donna l’idée d’effayer d’en
faire de labierre. Nous avions apporté une certaine quantité
de mélaffe & de grains ; les procédés que nous employâmes
suffirent au-delà de nos fouhaits, & l’habitant
rPe.lante à hier-