d’eau où il faut le bateau. Tout le monde alors franchit le b a ss in , escalade
l’échelle, et nous nous trouvons dans une grande galerie large de 3 à 6 mètres,
qui court droit au sud sur 1Û0 mètres de longueur; d’étroites corniches permettent
de la suivre sans trop de peine à quelques mètres au-dessus du torrent jusqu’à,
une salle de 18 à 20 mètres de diamètre où nous montons et lançons le canot
et qui reçoit immédiatement-le nom de salle du Havre. La voûte rocheuse
élève son ogive à -80 mètres au-dessus de nos têtes; il n ’y a pas de stalactites;
mais le double effet de la lumière électrique dans la salle et du jo u r à l’entrée
de la galerie est féerique; ici le cours d’eau tourne au sud-est et occupe la
fente dans toute sa largeur, qui n ’est plus que de 1 à S mètres. Marcel et moi,
éclaireurs à notre to u r , embarquons seuls au-dessus d’une troisième cascade
haute de 2 mètres, située à l’entrée de la salle du Havre, et qui nécessite mille
précautions pour parer à une dangereuse dérive. — En amont, o'n entend encore
d autres chutes qui bruissent tout près, cachées par un coude brusque de la
galerie; remontant le courant pendant environ 20 mètres, nous constatons que
la yoûte conserve une grande élévation. Mais n ’allons-nous pas être arrêtés par
une cascade ou par le rétrécissement de la fente? Non, le chemin se dilate, nous
tournons au sud, et sommes entravés 10 mètres plus loin par une quatrième cascade
: ici force est de débarquer dans l’eau même, en plein tourbillon, et de
soulever péniblement la barque par-dessus l ’obstacle, haut de l m,S0. Nous
parvenons ainsi à une expansion de la fente, petite salle qu’occupe un bassin
profond de 4 mètres. Un couloir presque vertical dirigé vers le sud-ouest vient
y aboutir; Foulquier, qui, avec une adresse incroyable, nous a rejoints par des
corniches impraticables pour d’autres que lui, nous hisse hors du bateau, èt nous
grimpons tous- trois l ’espace d environ 18 mètres dans l’espèce de cheminée que*
nous venons d’apercevoir; c’est un puits, un véritable avenc, dont la bouche est
sans doute obstruée^ car aucune ouverture correspondante ne se rencontre sur
le plateau de Camprieu ; l’électricité même ne peut nous montrer la voûte ; l’inclinaison
approche de 80 degrés, la roche est tout humide et effritée, nos pieds glissent
et détachent de petites avalanches de cailloux : il faut renoncer à cette périlleuse
escalade et continuer l’exploration' de la rivière. Au bateau ! Foulquier nous
attend au bas de l’avenc pour nous maintenir en communication avec le reste de
la troupe, demeurée dans la salle du Havre, car le bruit des eaux couvre à brève
distance le son des sifflets et des eornets.
Tournant encore à angle droit de l ’avenc, la galerie, large de 1 mètre à peine,
s infléchit vers l ’ouest-sud-çuest; après 30 mètres de navigation, une cinquième
cascade de 1 mètre nécessite un nouveau portage, le courant redevient libre
sur 20 mètres de longueur, puis une sixième cascade, haute Me 6 mètres, nous
barre définitivement la route ; elle est trop abondante, il y a trop d’eau au pied
(2 m. de profondeur) et de trop petites saillies sur les parois, pour que-l’échelle
de bois puisse être utilisée ; nous accrochant aux aspérités de la galerie-, bras
et jambes écartés de part et d’autre du torrent écumeux, nous nous élevons à.
la force des poignets au niveau du sommet de la cascade : deux gros blocs
arrêtés en travers forment double pont au-dessus d’elle et-empêcheraient do
transporter ie hateau au delà; mais la fissure se prolonge toujours aussi haute
(10 à 20 m.) et large (1 à 3 m.); le courant paraît plus calme, et nous ne percevons
plus en amont aucun tonnerre de cascade. Nous commençons à croire qu’on
pourrait ressortir par le Bonheur, car 200 mètres, détours compris, viennent.