Le cas peut se présenter, mais il. n ’est sans doute pas général. Il faudrait
étudier l’intérieur des galeries de rivières avec grand soin pour résoudre la
question ; or la chose est très difficile, car les parois sont toujours couvertes de
stalagmites ou d’argile, et le magnésium même n ’éclaire pas suffisamment loin.
— A propos du Jura, M. Bertrand dit, au contraire, que les sources citées p. 338
sont le débouché de grandes cavités et de canaux souterrains sans rapport avec
les lignes de failles de la région (carte géologique de France,-feuille de Lons-le-
Saulnier, n° 138, 1881-1882, publiée en 1884).
Les eaux intérieures peuvent aussi descendre plus bas que le niveau des.
grandes rivières, puis remonter et former dans leurs lits des sources de fond :
telle est l’origine des cabas ou gouffres du Tarn, par exemple.
Tout ce régime hydrographique invisible a un très grave inconvénient, car
« les crues n ’ont pas lieu comme dans nos contrées : ici les affluents coulent à
ciel ouvert, aussi peutron savoir d’avance ce que sera une inondation; là, au
contraire, presque tous les affluents sortent des entrailles de la terre; leurs eaux,
comme la lave des volcans sous-marins, font irruption au fond même de la
rivière et la grossissent sur place, sans qu’il soit possible de savoir au juste d’où
elles viennent et d’apprécier leur volume. » (A. L a g r è z e - F o s s a t ) , -,
Enfin M. Mouret croit qu’il peut y avoir des rivières souterraines, des rigoles,
situées en plein dans la roche perméable, mais rendues étanches par des remplissages
sidérolithiques.
On ne fera disparaîtra tous ces doutes et controverses que quand on entreprendra
l’étude-géologique raisonnée et méthodique des cavernes, dont nous.,
n ’avons qu’à peine commencé l’exploration purement lopographique.
L’abîme de Rabanel, comme cas particulier, creusé dans le calcaire corallien,
explique, nous l ’avons vu p. 220, pourquoi certaines sources deviennent troubles
après les orages : c’est à cause du remaniement temporaire des masses d’argile
contenues dans des cavités voisines..
En résumé, la masse interne des Causses est bien moins caverneuse qu’on ne
lë croyait, et les eaux souterraines, au lieu de s’y étendre en grandes nappes,
paraissent y circuler dans des galeries longues, étroites et hautes, ou sous des
voûtes surbaissées, ce qui avait déjà été déduit de l’exploration de Bramabiau,
de Dargilan et des Baumes-Chaudes en 1888.
F o rm a t io n d e s c a n o n s . — Les grottes et rivières souterraines des Causses
expliquent lumineusement le mode de formation des canons :
Etudions, pour commencer, le cours de Bramabiau.
De l’aspect des lieux comme de l’examen du plan et de la coupe, il ressort que
les couloirs secondaires sont à peu près perpendiculaires à la galerie .principale
parcourue par la rivière, et qu’uniformément toutes ces conduites sont très étroites
(1 à 6 m.) et fort élevées (10 à 40 m.). Ce faciès général prouve à priori, et
surabondamment, que les eaux ont simplement suivi les cassures préexistantes
(diaclases) de la masse calcaire ; siTérosion n ’a pas encore transformé en grottes
spacieuses ces fentes intérieures qu’elle sape sans relâché, c’est faute de temps,
l ’enfouissement du Bonheur étant relativement récent, comme l’établit la conservation
de ses anciens, lits. (F. p. 180.) Or, ce que le Bonheur exécute actuellement
aux dépens du plateau de Camprieu, des eaux plus anciennes, et plus
abondantes l’ont fait jadis dans les hautes dolomies des Causses pour former
les vallées du'Tarn, de la Joute, de la Dourbie, etc.
A Padirac, il n ’y a qu’une seule, galerie, haute et étroite : les lacs (élargissements)
et les abaissements des voûtes se trouvent aux coudes, qui sont tous à
angles à peu près droits. (F. le plan..}.Tout cela est conforme aux expériences
de M. Daubrée sur les cassures.
A la grotte du Sergent, même disposition rectangulaire des ramifications :
élargissements aussi aux croisements des fentes, etc.
De tout cela nous déduisons ce que voici:
L e f plus anciennes eaux courantes des Causses ont d’abord cherché leur voie
parmi les fissures mu les dépressions des bancs supérieurs : pénétrant ensuite
dans les diaclases des dolomies, suivant l’allure constatée à.Bramabiau et à Padi-
- rac, elles ont élargi ces cassures et évidé des cavernes- (c’est ce que font à notre
époque les rivières souterraines du Karst, en Istrie); isous l’effort des courants
ramifiés, les polyèdres de roches limités par les diaclases se sont par endroits
amincis en piliers, à la mode de l’exploitation des carrières de gypse; rongés au
pied, ces piliers entraînaient dans leur chute des voûtes immenses.
Dans leur descente à l ’Océan, favorisée par l ’inclinaison des couches vers le.
sud-ouest, les eaux adoptèrent sôus terre des directions générales (esquisses des
thalwegs futurs),.coudées suivant le sens des principales diaclases ou la disposition
des failles. Puis les marnes sous-jacentes furent attaquées à leur tour- la
roche compacte, déjà toute corrodée, vint à perdre sa base et s’effondra petit à
petit comme un plafond dont on enlèverait un à un les supports. Alors l’écoulement
cessa d être souterrain : l ’érosion aérienne continua seule, par le délayement
des marnes tendres, le travail commencé par 1 ecavernement des dolomies résistantes,
et l’approfondissement des canons devint, de siècle en siècle, plus consi
déraille. .
La première phase de cette formation de vallées n ’a donc pas consisté dans le
simple sciage vertical des dolomies par des rivières creusant leur lit de plus en
plus, mais bien dans le développement, puis l ’écroulement des cavernes. Les
Causses eux-memes nous en fournissent cinq preuves manifestes :
1 ° Bramabiau montre, sur une échelle réduite, le mode de transformation des
diaclases en cavernes.
.2 Les grottes hautes (300 m. à 400 m. au-dessus des vallées) ont trois
sortes d aspect : puits verticaux et étroits, grandes salles d ’éboulements longs
couloirs élevés Or les puits et galeries des Baumes-Chaudes découpent la
montagne en véritables polyèdres, et les subdivisions de Dargilan sont toutes perpendiculaires
entre elles. Les diaclases ont donc été les directrices constantes des
eaux souterraines. L excavation de ces grottes est due aux dérivations latérales
des courants primitifs intérieurs ; leur extension s’arrêta dès que ces courants
eurent trouvé à un niveau inférieur, un écoulement normal et aérien dans
les marnés-friables. P f ? ;
Car les ruisseaux et torrents souterrains furent déplacés, soutirés par l’approfondissement
graduel des vallées, qui jouèrent dès lors le rôle de drains.
3 Les accidents si pittoresques des . falaises dolomitiques font voir leurs
aiguilles et leurs tours hardiment détachées des parois par le seul effet des
cassures.
4° A la surface même du causse Noir, sur des points où les bancs stratifiés de
le vîènx êduSRnae rr 0r « ent 11? “Y*1' deS dolomies> les le-Vieux, du Rajol, de Roquesaltes, de Madasse, etc., renNfer'mÜen dt ed Mes ocnetnptealilnieers