sent ou nous vêtissent encore de nos jours. La faune ne s’est pas modifiée depuis,
et les espèces n ’ont ni changé ni disparu.
Au contraire, à l’âge de la pierre taillée, pendant la période archéolithique
on paléolithique (pierre ancienne), le grand ours et le grand lion, le renne et le
grand cerf, le mammouth et le rhinocéros, occupaient les cavernes, peuplaient
les forêts, fréquentaient les rives des fleuves immensément larges. Plusieurs
de ces espèces n ’ont plus de représentants
sur la terre actuelle ;
d’autres ont émigré loin des contrées
où l’on recueille aujourd’hui
leurs ossements fossiles. La géologie
démontre que de violents
cataclysmes . locaux (inondations
diluviennes ou fontes de glaciers,
débâcles lacustres ou névéennes)
ont causé ces extinctions et ces
Grand ours des cavernes (Ursus spælus). déplacements; les mythes populaires
des premières nations historiques
ont consacré le souvenir de ces grands bouleversements de la nature,
les mentionnant partout sous la dénomination de déluge (Noé, Ogygès, Deuca-
lion, etc.), dénomination trop générale, car il n ’y pas eu de déluge universel. Le
terme antédiluvien est donc une expression fausse ; on doit lui substituer celui
de quaternaire, puisque les déluges partiels, auxquels n ’ont pas survécu dans
nos contrées 1’ Ursas spelæüs (grand
ours des cavernes}, le'Felis spelæa
(grand chat des cavernes^tle Rhinocéros
tichorhimis (à narines cloisonnées),
etc., ont clos, dans tous
les pays où ils Se. sont manifestés,
la période géologique dite quaternaire.
Ainsi l’âge du grand ours fait
partie des temps paléontologiques
et dépend de la géologie pure. Or
il est universellement admis maintenant
que l’homme existait alors f
pour faire réconnaître cette vérité,
il a fallu à Bouohef de Pèr-
Renne (Cervustarandus)., . % : :. . thes vingt-sept anné, es. d-, e -l, ut,,t es et.
de recherches infatigables (1836-1863); mais la lumière est faite, l’homme quaternaire
a été trouvé dans presque toute l’Europe et jusqu’en Amérique; ce que
l ’on discute à l’heure présente, ce n ’est plus le contemporain du grand ours,
c’est l ’existence d’un être intelligent plus vieux de quelques milliers de siècles,
l'homme tertiaire. .
On se créerait une riche bibliothèque rien qu’avec les volumes innombrables publiés
en toute langue sur la préhistoire depuis quarante ans ; une liste des traités les
plus complets et les plus faciles à lire termine ce chapitre. Les curieux y trouveront
les moyens de se procurer des renseignements qui ne sauraient figurer ici.
En une phrase seulement je rappellerai que l’homme quaternaire ou paléolithique,
contemporain des espèces éteintes ou émigrées, n ’a pas pratiqué le polissage
des silex, qu’il a su seulement façonner cette pierre p a r la percussion, en
la débitant par éclats (pierre taillée, pierre éclatée, forme la plus ancienne ou
’paléolithique) ; qu’il habitait soit en plein air, soit dans les cavernes; que l’agriculture,
la domestication.des animaux, le tour, le tissage, étaient choses inconnues
pour lui, et que sa principale préoccupation a dû être la chasse ét la lutte
contre les bêtes féroces.
Ges divisions n ’ont certes qu’une valeur régionale, puisque de nos jours encore
certaines peuplades sauvages d’Océanie n ’emploient que la pierre polie;
mais la chronologie ci-dessus paraît bien définitive pour l’Europe.
On a même été plus loin, en partageant la période paléolithique en chelléenne
p u acheuléenne, moustérienné, solutréenne et magdalénienne (la plus récente),
noms tirés des localités de Chçlles (Seine-et-Oise) et Sàint-Acheul (Somme),
le Moustier (Dordogne), Solutré ( Saône-et-Loirë ) et la Madelaine (Dordogné),
qui ont fourni des types de silex taillés très différents les uns des autres.
En Lozère ont été faites des
découvertes très précieuses pour
la science préhistorique.
Les plus belles sont dues au
docteur P ru n iè re s, de Marve-
jols, qui paraît avoir notamment,
par de patientes et fructueuses
fouilles dans quinze cavernes
sépulcrales ët cent' cinquante
dolmens, établi un fait des plus Silex taillé,
remarquables : l ’absorption d’une
race autochtone (des cavernes) par une race d’envahisseurs (des dolmens)
plus civilisés et plus forts. L ’anthropologie et la préhistoire doivent beaucoup au
modeste et éminent savant qui a su arracher aux ossuaires néolithiques de la
vallée du Tarn et aux tombeaux des Causses tant de secrets précieux. Il serait
injuste de ne pas citer au moins, à côté de son nom, ceux des zélés et expérimentés
fouilleurs de cavernes et dolmens : MM. Louis de Malafo.sse, l’abbé Solanet,
Jeanjean, l ’abbé Cérès, Poujol, l’abbé Boissonnade, etc.) auteurs aussi d’importantes
trouvailles; tous ont recueilli des collections variées de poteries, de colliers
en pierre et d’objets travaillés. Une publication spéciale serait nécessaire
pour résumer même sommairement tous leurs travaux1.
On a nié pendant longtemps que les Cévennes eussent été peuplées à l ’époque
quaternaire : nos recherches personnelles ont contribué à prouver le contraire,
et cette question fera l’objet spécial du. chapitre suivant.
Litige plus grave et d’un caractère plus général : de nombreux savants
1. Consulter, pour les dolmens et tumuli : l ’abbé V i n a s , Mémoires sur les monuments druidiques de l’arrondissement
de Lodève; Lodève, 1866, in-8° ; — Mélange d’archéologie, par Séb. B o t t i n ; Dolmens et pierres branlantes
de la Lozère lithographiées d’après les dessins de M. J or and, peintre, p. 195, 199 ; Paris, 1881 ; — §§J P r u n
i è r e s , Distribution des dolmens dans le département-de la Lozère : Revue, d’anthropologie, t . II, et tous les
mémoires dù docteur Prunières épars dans les comptes rendus annuels de Y Association française pour
l’avancement des sciences (depuis 1872) ; — X.***, Recherches sur le causse Noir : Bulletin, section Lozère et Causses,
Club alpin français, n° 2, 1886 (dolmens du causse Noir) ; — L. dis M a l a f o s s e , Etudes sur les dolmens de la
Lozère: Mém. de la Soc. archéologique du Midi, Toulouse, 1869 et 1872.