bombé entre le Goulet et le Bougés, s’est fendu, et par la crevasse le granité,
latéralement comprimé, a été mis à découvert.
<( Tout fait présumer que le granité du mont Lozère est venu au jo u r à une
température assez basse... car on n ’observe pas que les cristaux diminuent de
volume à mesure qu’on se rapproche des schistes, ce qui aurait certainement eu
lieu si la matière fût venue au jo u r à l’état de fusion. Au surplus, son épanche-
ment n’est pas postérieur à l’époque silurienne. » ( F ab r e .) -
Dès 1846, Émilien Dumas émettait des opinions absolument analogues :
« Il résulte de toutes ces observations que le granit porphyroïde paraît avoir
été éjecté à l’état pâteux, et qu’il n’est arrivé au jo u r que postérieurement au
dépôt de schistes talqueux, dont il a plissé,, soulevé et brisé les couches au moment
de son apparitionl. »
Ici doit se placer l’examen d’une question curieuse : celle de l’élévation du
mont Lozère à son altitude actuelle. On va voir comment il faut,-dans cette
montagne, distinguer complètement la phase de Vépanchement du granité et
celle du soulèvement du massif.
Beaucoup de géologues2 ont déclaré que le haut plateau granitique du mont
Lozère, qui a 400 kilomètres carrés de superficie et qui est la protubérance granitique
la plus élevée de la France centrale, formait une île au milieu de la mer
ju ra ssiq u e ; cette opinion, fondée principalement sur l’altitude du massif, n ’est
pas partagée par M. Fabre, qui croit, au contraire, au recouvrement du mont
Lozère par les eaux aux époques de l’infra-lias et de l’oolithe inférieure. Avec
beaucoup de vraisemblance, il appuie sa théorie sur des faits très bien observés,
selon sa louable habitude.
D’abord, tout autour du plateau sont disséminés en ceinture discontinue, et
jusqu’à l’altitude de 1,470 mètres, des lambeaux de terrains jurassiques, « témoins
évidents d’un dépôt jadis continu ». Puis les altitudes d’une même couche sont
très variables ; c’est ainsi que les grès infra-liasiques se rencontrent aux cotes
suivantes : région de Villefort, 840; région du Bleymard, 1,140 ; mont de Mercoire,
1,470; col de la Loubière (faille), 1,188 et 870; col de Montmirat (faille), 880 et
1,048; château de Chaylard (Gard), 580, etc. ; cela démontre que les perturba-,
tions du sol et les failles « ont provoqué, depuis l’époque jurassique, des dénivellations
considérables autour du mont Lozère ; il serait surprenant/pour le moins-,
que la région centrale eût seule été à l ’abri de ces mouvements » et affranchie
de tout soulèvement. «Comme, d’autre part, le sommet delà montagne (1,702 m.)
ne domine les dépôts sédimentaires les plus élevés (1,470 m.) que d’une quantité
bien inférieure aux différences locales de niveau que présentent les dépôts
eux-mêmes d’une région à l’au tre , on est en droit de présumer que le plateau
du mont Lozère a dû jadis supporter quelque dépôt jurassique; » Ensuite, « cette
idée trouve une confirmation éclatante dans l’examen détaillé des relations de
contact des couches jurassiques avec le massif cristallin ; partout ce contact se
fait par faille... Au eol de Montmirat, l’infra-lias sejtrouve au milieu des dolomies
de l’oolithe inférieure ; ce. contact anormal permet de fixer à 800 mètres
environ la dénivellation produite. » Enfin la haute ceinture jurassique du mont
1. Notice sur la constitution géologique des Cévennes; Bull, de là Soc. géologique] réunion extraordinaire à
A lais en 1846, 2e sérié, t. III. — F: aussi, sur l’âge des granités, G r u n e r , Bull, de la Soc. géologique, 2° série,
t. XXV, p. 887. '
2. V. J a u b e r t , Bull, de la Soc. géologique, 2° série, t. XXVI, p. 216,1868.
Lozère ne s’est pas formée sur un rivage, autour d ’une île, car nulle p a rt ses
strates « n ’offrent le faciès littoral* ».
En résumé, il résulte des belles études de M. Fabre qu’il y a eu trois phases
dans la genèse du mont Lozère :
1° Vers l’époque silurienne, et par une déchirure des schistes primitifs, le granité
est monté au jo u r et a redressé sur ses flancs le terrain préexistant, sans
s’élever lui-même très haut.
2° La mer jurassique;l’a recouvert ju sq u ’à la fin de l’époque bajociènne, et'
depuis il n ’a plus été submergé.
3° Vers le milieu de l’époque tertiaire, le développement de grandes failles
parallèles (est-ouest).a produit un deuxième soulèvement du granité de 300 à
700 mètres à peu près, qui a atteint alors son niveau a c tu e l, en disloquant ses
revêtements jurassiques et en portant leurs lambeaux ju sq u ’à 1,470 mètres
d’altitude.
Ces conclusions sont encore confirmées par les observations que voici :
« Si, d’autre part, on cherche, au moyen des témoins laissés çà et là, à se
rendre compte de la grandeur des érosions qui auraient dépouillé le mont Lozère
de son manteau jurassique, on arrive à des nombres qui ne dépassent guère
200 à 200 mètres. Or toute la région accuse des dénivellations bien autrement
importantes; le large cirque du Valdonhès, entre Lanuéjols, Saint-Bauzile
et Saint-Étienne, montre une érosion de 300 mètres d’épaisseur sur 30 kilo-
mètres^carrés;-les vallées du Lot et du Tarn sont excavées.jusqu’à 800 mètres
de profondeur ; enfin les nombreuses' vallées d’érosion qui sillonnent les deux
versants du mont Lozère sont creusées dans un granité très résistant, sur une
profondeur qui peut atteindre 300 mètres.
« On voit donc que l’hypothèse du revêtement ancien du mont Lozère par le
terrain jurassique rend parfaitement compte de la disposition actuelleCcles
témoins, que de grandes failles ont soustraits, pour ainsi dire, à la dénudation
générale, en les protégeant par des falaises résistantes de roches cristallines. »
( F a b r e , Matériaux,\ 4“ note.)
L’Àigoual et les monts du Vigan se sont formés exactement par .le même
mécanisme que la Lozère. Sur leur, pourtour aussi, les schistes sont relevés, et
parfois même recouverts par le granité, qui, en certains points, paraît avoir
coulé dessus, par voie dè'débordement ou plutôt Alextravasement.
T e r r a in s p r im a ir e s . -— « Le silurien et le dévonien de l’Hérault reposent sur de
puissantes assises de gneiss et de micaschiste, qui les séparent du granit sous-
jacent et qui correspondent aux schistes et aux gneiss des Cévennes. » ( F a b r e
Age des schistes du Gévaudan.)
« Le terrain houiller se montre à découvert sur le versant oriental de la chaîné,
des Cévennes, où il forme une. succession de bassins plus ou moins'considérables.
On observe que ce dépôt s’est opéré dans les dépressions de terrains talqueux,
déjà disloqués par l’effet des soulèvements antérieurs... Le bassin du Vigan est
peu important... mais celui d’Alais présente un beaucoup plus grand intérêt. »
(E. Dumas, Notice sur. la constitution des Cévennes. —. V. ce travail pour plus
de détails.)' . ' V A ' 1..-)-a’,.-'..- ; ; |
« Les grès et argiles rouges du Lot sont du permien. supérieur, et synchroniques
1. G. F a b r e , Comptes rendus des stances de l’Académie des sciences, V avril-1873. :