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Ailleurs, ‘la voûte s’abaisse à 30 centimètres au-dessus de l’eau ; dans un autre
endroit formant tunnel, à 50. Il faut se coucher à plat ventre dans le fond du
bateau et avancer anec le i/os. . ' " ' ; ;
S’il survient un orage et si l’eau monte, nous ne pourrons plus repasser. Nous
le savons, nous en causons ensemble, et nous continuons! « A la découverte ! »
Mais les bougies s’épuisent; la lumière risque de faire défaut, et je me souviens
de l’abîme de Hures (causse Méjean), où, suspendu au bout de 80 mètres de corde,
j ’ai passé trois quarts d’heure à frotter mes allumettes humides pour ranimer une
bougie éteinte, sans pouvoir, dans la nuit opaque, ni remonter ni descendre ! —■
Donc, demi-tour! La suite à l’année prochaine; il faut savoir où va la rivière!
Au retour, mêmes difficultés; nous avons navigué 6 heures et levé le plan.
Décrire l’aspect de la rivière de Padirac est impossible.
Aux lacs de la Pluie, des Bouquets, des Bénitiers, qui se suivent, des stalactites
pendent depuis la voûte jusqu’à l’eau, longues de 30 mètres, lustres et
colonnettes de carbonate de chaux aux mille facettes. Les parois sont lambrisées
de même ; à la lueur du magnésium, c’est l’intérieur d’un diamant ; et sûr Fondé
limpide, le reflet double la splendeur! Nous sommes deux, isolés dans la barque,
trop loin des autres pour être attachés à des cordes ou même pourvus du téléphone;
aucun flot ne murmure ; on n ’entend bruire que les gouttes d'eau tombant
des voûtes invisibles, tant elles sont hautes. Nul être humain ne nous a précédés
dans ces catacombes géantes !
Ensemble et spontanément nous nous posons la même question : « Est-ce que
nous ne rêvons pas? » Ces sensations-là sont inoubliables.
On pourra aménager sans peine à l’usage des touristes la plus belle portion de
la rivière.
C’est le premier cours d’eau souterrain de ce genre que l ’on découvre en
France ; l’Autriche et l ’Amérique du Nord en possèdent seules d’aussi.longs.
Or nous ne sommes descendus que dans quatorze abîmes, et il ert existe des centaines,
peut-être des milliers. On devine ce que l’avenir réserve aux explorateurs
de grottes. Il faudra des années d’études difficiles 'et périlleuses, et après les
Causses il y aura le Jura !
C’est une branche nouvelle de la science, précieuse pour l'histoire naturelle,
la géologie, la physique du globe et la météorologie !.
Les Autrichiens, qui la pratiquent depuis dix ans, autour de Trieste, dans le
Iiarst, cette terre promise des cavernes, l’appellent la Gi'ottologie (Hoehlenkunde).
En France, son domaine est magnifique à. exploiter, mais elle n ’est pas encore
organisée ; il faut qu’elle le soit à bref délai : nous y travaillons. ( F. chap. IX.)
Mais revenons au câusse Méjean. « Le causse. Méjean est une immense table
de calcaire jurassique, sans eau, sans arbres, ayant une altitude moyenne de
plus de 1,000 mètres.
« Dix coups de mine,' coupant les routes tracées à grand’peine le'long de ses
murailles, rendraient à peu près inaccessible ce désert de pierre, P a r suite de
quelles circonstances des hommes se sont-ils acclimatés sur ce grand plateau ?
Battu par tous.les vents, torride par le soleil, glacial à la moindre pluie, terrible
en toute saison, livré aux chasse-neige en hiver, comment se fait-il que
ce causse et les causses voisins, qui maintenant se dépleuplent d’année en
année, aient été habités de toute antiquité, comme le prouvent les nombreux
LE CAUSSE MÉJEAN.“r f LES AVENS 83
dolmens qui les couvrent, les nombreux foyers de leurs cavernes, et plus tard
les nombreuses traces laissées par l ’occupation romaine ?
« Le côté pittoresque est grand, terrible. Si vous désirez avoir l’impression
simple produite p ar la vue des Causses, allez les voir à la fin de l’été ou en
automne ; au printemps, leur léger manteau de verdure vous tromperait : c’est
leur beauté du diable, qui ne dure qu’un instant. » (A. L equeutke.)
Descente d’un avenc (l’Egue, causse Noir, profondeur 90 m.). — Phot. G. Gaupillat.
L’ensemble des Causses, dans la Lozère, l’Aveyron, le’Gard, l’Hérault, occupe
une surface de 500,000 hectares, qui de plus en plus^cbàque année devient
un désert, se stérilise, se dépeuple, perd ses cultures et ses habitants.
L origine de ce mal est le déboisement.
Les grottes sépulcrales, les dolmens, les restes de voies romaines, les ruines
u moyen âge, donjons et chapelles, démontrent que jadis la population était
beaucoup plus considérable sur ces plateaux, devenus solitudes.
ux xii et xme siècles, le causse Méjean à lui seul avait quatorze châtellenies