beau, oncle du célèbre orateur, fut commandeur de la Couvertoirade ; c’est lui
qui, en 1789, écrivait à son neveu : « Songez que les révolutions ne profitent
jamais à ceux qui les fomentent; » — 2° Le petit château de Sorbs (276 hab. la
comm., 217 aggl.), du xvr° siècle, à 8 kilomètres nord-ouest du Caylar, transformé
en ferme et conservant de charmants détails de la Renaissance (porche,
escalier, balustrades et voûtes).
Au château de Sorbs nous nous trouvons au bord oriental du Larzac, à une
heure de marche de la Yis, dont le moyen canon paraît .superbe, même après le
Tarn et la Jonte. Descendons-y donc, par le ravin de Chevalos.
CHAPITRE XIY
LA. VIS ET L’HÉRAULT
T ro is s o u rc e s , d o n t d eu x s a n s e a u . — Les riv iè re s d e c a illo u x . — P en te e t rep lis de la Vis.
— E n co re l’A m é riq u e . — R o ch e s-g rise s et. ciel b le u . — L a F o u x . — Cascad e de N o v a c è lle r—
M a d iè re s ..— P a n o ram a de la S é ra u n e . — Le d ram e d u c h â te a u de Ganges. — G ro tte des
Dem o ise lle s. — Gorge d e l’H é rau lt. — Avens de la S é ra n n ê . — L’ab îm e d e RaBaliël.- — La
v allé e du Buèges. —; Un d e rn ie r c a n o n in c o n n u . — Cau sse la Selle. — S a in t-G u 2 h em 7lè-
D é s e rt e t ses g ro tte s . — Le p ic S a in t-L o u p . — La v a llé e d e s Arcs. -
La Vis a trois sources, dont deux sans eau!! ! Expliquons-nous sur cet aphorisme.
Au nord de la route de Sauclières à Alzon, les granits et les hauts prés saturés
de pluie du Saint-Guiral laissent exsuder quelques ruisselets colligés par deux
maîtresèes rigoles’, la Virenque à l’est, la Vis à l’ouest : jusqu’aux abords de ladite
route elles, coulent, ces deux rigoles, et font caqueter des moulins sous les
arbres. Mais la Yirenque, passé Sauclières, et la Yis, en aval d’Alzon, ont, aux
vieux âges plus humides, mis l’encagnonnement en pratique aux dépens du plateau
calcaire : dans le flanc oriental du Larzac elles ont tranché à vif et isolé
même l’un de l’autre les deux petits causses de Campestre (684 à 920 m. ; colonie
agricole du Luc et avenc de Saint-Ferréol) et de Blandas-Montdardier (863 à
988 m. ; la tour d’Arre).
Aujourd’hui que la condensation atmosphérique est plus faible et le ruissellement
restreint à la surface de notre globe, leurs eaux, dès qu’elles touchent le
calcaire, s’engloutissent en ses mille fissures, brusquement, comme évaporées au
contact d’un fer rouge. La porosité du terrain est le prestidigitateur coupable de
cet escamotage.
Sauf au lendemain des gros orages, avidement bus par le causse altéré et
vomis quelques heures après par ses fentes basses, il n ’y a plus une goutte d’eau
autour du plateau de Campestre : dans le lit caillouteux des torrents, tortueux
chapelet de larges grèves grises incendiées par le soleil, on pourrait à pied faire
le tour presque complet de cette presqu’île carrée que la Vis, à l’est, et la Virenque,.
au nord, à l’ouest, au sud, circonscrivent de leur fossé sec, creux de 200 à
à l’aise, mais torrents de ballast, où le flux passager d’un ouragan trouble bien
rarement la quiétude des sables et des galets solitaires.
Certes, la descente de ces deux autres petits canons n ’aurait rien de charmant :
les sentiers, au surplus, y font totalement défaut. Mais y je te r quelques instants un
regard du sommet ou du pied d’un des causses contigus n ’est pas un spectacle
sans étrangeté, si, par exemple, de la Couvertoirade ou du Caylar, par le château
de Sorbs et le ravin du Chevalos, on gagne le confluent de la Virenque et de la
Vis pour suivre l ’admirable gorge basse de cette dernière ju sq u ’à Ganges.
Il serait difficile de rencontrer un type plus accompli de champ de cailloux que
le lieu où la carte, ici encore en désaccord avec la nature, opère le mélange des
flots de la Vis et de la Virenque, par 443 mètres d’altitude. Le site, toutefois, ne
manque pas de grandeur.
Un kilomètre plus loin, un joli village (270 hab. la comm., 188 aggl.) a trouvé
quelques arbres au bord d’une fontaine : cette fontaine, il l’accapare toute, et
l’assoiffé torrent n ’en reçoit goutte; est-ce donc pour le narguer que ce hameau
s’est appelé Vissée *? Après les trombes, d’ailleurs, la rivière se venge quelquefois
cruellement, emportant tout dans son gonflement subit, court, ravageur !
Au bec de la Virenque, à 443 mètres; commence le canon de la Vis, profond de
300 mètres, large seulement de 800 à 1,200 mètres au sommet, enfoncé « tantôt
entre rocs vifs, tantôt entre talus avec arbustes et oliviers ». Jusqu’à Madières
où il se transforme en vallée largement ouverte, la ligne d’eau a 27 kilomètres de
développement, car elle décrit trente-cinq méandres de plus de 90 degrés d’angle ;
celle de l’air, que l’oiseau suivrait tout droit à 1,000 pieds plus haut, au niveau
du rebord des causses encaisseurs, ne mesure que 13 kilomètres ; et comme
Madières est à 228 mètres d’altitude, c’est une chute de 8",07 par kilomètre (au
lieu de 2“ ,87 de Sainte-Enimie au Rozier) que le torrent subit en son précipiteux
défilé. Aussi n est-ce pas moins pittoresque, quoique plus petit, que les maîtres
canons d u Méjean. Pas de roches rouges, il est vrai : gris et vert seulement,
mais gris-perle aux reflets violets, qui chatoient dans la vibrante lumière méditerranéenne,
et vert-olive, puisque là prospère l’arbre de Minerve; impression
très différente, en somme, et aussi vive. Puis; malgré la profondeur moindre,
1 étroitesse frappe davantage : pas une expansion, pas un champ (sauf à Nova-
celle), pas un cirque; même quand la source de la Foux a fait la Vis vraie
rivière, pas un bateau, pas un planiol, rien que des ratchs, des cascades, et plus
de trente promontoires rocheux, étroits, dentelés, effilés, jouant la coulisse et
rendant chaque tableau du spectacle grandiose à force de rétrécissement. P a r
un beau temps, c est superbe! D’une sauvagerie complète, en outre ; de Nova-
celle à Madières, 18 kilomètres sans une maison! La Vis est le plus américain
de tous les canons des Causses ! Mais que les après-midi d’été sont donc brûlants
et que les ondoiements des sentiers riverains par-dessus les croupes des
trente caps sont fatigants à descendre et àmonter au fond du trop sinueux corridor !
Après Vissée, encore S kilomètres sans courant : des coudes, des becs, des
escarpements, de la lumière surtout, éblouissante! Dans ce qui sert parfois de
lit au torrent, des blocs et dalles énormes de roches toutes creusées de cuvettes
e t baignoires naturelles, et dans ces trous, quelques laquets d’eau morte sau-
1. En raison sans .doute de cè mauvais jeu de mots, la.carte (feuille du Vigan) et quelques auteurs aooellent
le torrent le lis ; mais dans le pays l’article féminin est unanimement employé.