Mais la superposition ne sé fit pas sans lutte violente entre les trois parties
désormais constitutives de la planète ; vapeurs (atmosphère), eau, croûte encore
chaude. Au contact de l’onde, l’écorce terrestre, insuffisamment refroidie, entra
en nouvelle réaction chimique, et l ’eau d’abord remonta vaporisée et sifflante ;
mais elle devait triompher.
Des phénomènes spéciaux de cristallisation et de combinaison moléculaire
se produisirent, qui eurent pour résultat de consolider l’écorce, et bientôt celle-
ci fut en état de recueillir comme un bassin les pluies atmosphériques, qui s’étendirent
en vastes océans. ,
Quels furent les premiers matériaux des roches ?
Les corps durs,' réfractaires, peu fusibles, devaient former la croûte originaire
: ce sont les silicates ou composés divers du silicium. Les premières roches
légères qui ont flotté comme une écume à la surface du bain fondu, furent la
silice et l’alumine. La silice pure donne le cristal de roche, l’alumine pure, le
•saphir et le rubis, trois pierres remarquables par leur dureté.
Les oxydes (union d’un métal et de l’oxygène minéralisateur ) solidifièrent
les mousses de silice et d’alumine : les principaux furent les alcalis (potassg,
soude, lithine), les terres alcalines (chaux, baryte, strontiane, magnésie) et
le fer.
Souvent la silice s’isolait et cristallisait en quartz.
La potasse, la soude, la silice et l ’alumine s’unirent 'en une sorte de verre
alcalin nommé feldspath.
Au contraire, avec le fer et la magnésie, la silice et l’alumine composèrent le
minéral feuilleté et flexible appelé mica.
La combinaison du quartz, du feldspath et du mica, sans plus, produisit la
plus ancienne roche connue, le gneiss, que l ’on croit avoir formé la première
croûte du globe. (F. ci-après.) I
Le fluor, le carbone, le chlore, le phosphore,- le soufre, l’oxygène et les autres
gaz créèrent le reste des minéraux constitutifs de divers mélangés rocheux :
les oxydes, les chlorures, fluorures, bromures, carbures, sulfures,,etc. ; et les
sels : carbonates (de chaux ou calcite, de magnésie et chaux ou dolomie), sulfates
(de chaux ou gypse-plâtre, de baryte ou barytine), phosphates, etc.
« Tels sont les éléments fondamentaux et peu nombreux de la croûte .du
globe. Le principal est Xoxygène, qui constitue à lui seul la moitié en poids
de la croûte terrestre; après lui vient le silicium, qui forme 28 pour 100 de
toutes les masses cristallines d’origine éruptive. Le groupe de’l ’oxygène, du
silicium, de Xaluminium, du magnésium, du calcium,. Au. potassium, du sodium,
du fe r et du carbone constitue les |§ | de l’éeorce. Dans cë qui re ste / la prédominance
appartient à l’ensemble du soufre, de l’hydrogène, du chlore et
de 11 azote.
« M. Dana a fait observer que la silice, saturée comme elle est d’oxygène et
rebelle à toute altération, est, par excellence, l’instrument de la consolidation
de 1 écorce terrestre. Au contraire, l’élément fondamental du monde organique
est le carbone, caractérisé par l ’instabilité de ses composés, instabilité particulièrement
favorable aux perpétuelles variations que comportent les phénomènes
physiologiques. » (De L a p p a r e n t , p. 570.)
Dans sa lutte contre la matière ardente, et pendant la formation de l’écorce,
1 eau s’était fortement chargée de particules minérales; souvent aussi, au fond
des mers primitives, la même croûte dut être crevée p a r l e s bouillonnements
intérieurs, et des épanchements (éruptions) se produisirent, qui augmentèrent
encore la teneur minérale des eaux.
Cependant le refroidissement progressif des mers et surtout la pesanteur attiraient
les particules au fond, les appliquaient sur l’écorce première et peu à peu
les superposaient en couches, strates ou sédiments.
En même temps, l’évaporation diminuait l’étendue des océans, tandis que l’effervescence
du noyau désormais comprimé et emprisonné sous l ’écorce se tran smettait
à cette écorce et la gonflait, la boursouflait par places; Ainsi émergèrent
les premières terres, dont les vagues se mirent à battre les rivages incertains et
à remanier les éléments,- pour les laisser choir dans le fond au fur et à mesure'
qu’ellesTes arrachaient. De leur côté, les agents atmosphériques (pluies, grêles,
foudre et vent) attaquaient les nouvelles terres, dont les cours d’eau commencèrent
à raviner la surface, portant aux mers ce qu’ils enlevaient à leurs bords.
A partir de ce moment, et par le seul mécanisme du dépôt au fond des eaux,
l’épaisseur de l’écorce terrestre s’accrut d’âge en âge par Xempilement des terrains
sédimentaires ou stratifiés.
Un jour, la température ayant considérablement baissé (50 degrés) et l’air
s’étant purifié d’acide carbonique par le développement de la végétation, l’albumine
put se liquéfier et le sang couler dans ’les veines : ce jour-là la vie se manifesta
sur le globe.
Comment', et produite par quelle force? L’homme sè le demande depuis qu’ii
existe et ne le saura sans cloute jamais !
Toujours est-il que dans les eaux apparurent des annélides (vers) et .des crustacés,
composant la faune primordiale, tandis que, sur des portions d’écorce, de
terrain, déjà mises à découvert, croissaient les premières plantes (lycopodiacéès),
peu vigoureuses. -
v Sans doute, à cette époque les terres émergées n ’occupaient qu’une faible
étendue, et leurs rivages, sans cesse exposés aux incursions des flots, se prêtaient
mal à l ’établissement d’une flore continentale. » (De L a p p a r e n t .)
Néanmoins les organismes végétaux ou animaux avaient pris possession de
la surface du sol, des rivages maritimes et de Ta masse des eaux ; l’ensemble
des conditions extérieures avait subi une transformation qui leur permettait de
s’en accommoder ; dès lors ces organismes concoururent aussi à l’accroissement
deTiéborce*solide du globe, car l’accumulation de leurs débris constitue des
roches entières, telles que le.calcaire et la houille.
L’atmosphère et la mer s’épurant constamment et la terre se couvrant de
plus en plus de plantes et d’arbres, la vie se développa régulièrement, et successivement
vinrent les poissons, les reptiles, les oiseaux, les mammifères et
l’homme.
L e s f o s s i l e s . — Les dépouilles et les détritus d’animaux et de végétaux morts
tombaient au fond des océans ou des la c s, soit par chute directe, soit charriés
p a rle s cours d’eau qui n ’avaient pas tardé à sillonner la terre : empâtés dans les
vases et les autres résidus inorganiques dont le lent dépôt ne discontinuait pas,
ils s’y enchâssaient comme dans une gangue; et quand un re tra it de la mer ou
un boursouflement de l ’écorce mettait le fond à découvert, la nouvelle terre ren fermait
dans son sein tous ces restes antiques à l’état de fossiles. C’est là, dans
les couches du sol, que les géologues vont les retrouver.