
ces oifeaux. Je fais bien qu’on a trouvé fou-
verte des hirondelles Hans l’eau ; que des pe- :
eheurs en ont retiré dans leurs filets ; mais
parmi le grand nombre qui fe ralfenibîent la
nuit dans les premiers & derniers temps de .
leur féjour , fur les joncs des étangs, &
qui voltigent fi fréquemment fur l’eau, ne
peut-il pas arriver qu’il s’en noyé quelques-
unes,par des accidens faciles à imaginer ! mais
encore une fois, la queftion principale n’ell
pas de favoir fi elles tombent dans l’eau, mais
fi elles y entrent volontairement, fi elles y
vivent & fi elles en fortent. Jufqu’à ce que
nous ayons des obfervations plus décifives ,
je m’en tiendrai à l’opinion de ceux qui
croient que les hirondelles palïènt dans des
climats plus chauds: je m’en tiendrai aux
relations d’une multitude de voyageurs, qui
alfttrent les uns d’en avoir vu des efifaims innombrables
paffer les mers (1' ; les autres
d’avoir obfervé leur arrivée au Sénégal ( i ) ,
au cap-de-JBonne-Efpérance& dans l’Inde(3},
précifément vers le temps où elles dilpa-
roiffent de nos contrées.
Les voyages desgrtter& des cicognes font les
plus longs & les plus célèbres. Les hilloriens
de l’antiquité & les poètes, les ont autrefois
embellis de fables & de contes ridicules ; mais
ce qu’il y a de certain j c’elt que ces
oifeaux fe mettent en ordre pour voyager
& qu’ils forment un triangle à peu près ifo-
cèle , comme pour fendre l’air plus aifément.
Quand le vent fe renforce & menace de les
rompre, elles fe relferrent en cercle , ce
qu’elles font aufli quand l’aigle les attaque.
Leur palfage fe fait le plus fouvent dans la
nuit, & leur voix éclatante avertit de leur
marche. Dans ce vol de nuit , le chef fait
entendre fréquemment une voix de reclame,
pour avertir de la route qu’il tient ; elle eft
répétée par la troupe, & chacun répond,comme
pour faire connoître qu’elle fuit & garde fa
ligne. Les grecs avoient marqué le rendez-
vous des cicognes dans une plaine d’Afie,
nommée la plage aux ferp'ens , où elles fe
raffembloient comme elles fe raflemblent encore
dans quelques endroits du Levant &
même dans nos provinces d’Europe, comme
dans le Brandebourg & ailleurs, Lorfqu’elles
(1) ftl. le vicomte de Querhoënt, Herreza , liv. 11,
chap. IO, voyage aux ifles de France & de Bourbon 177.3.
(1) M. Adanfon , dans fon voyage au Sénégal, pag.
67 , hill, générale des voyages, rom. i n , p. 412.
(3)Edtv. glan.
font aflemblées pour le départ, on les entend 1
claqueter fréquemment ; & H fe fait alors I
un grand mouvement dans la troupe; toutes I
femblent fe chercher, fe reconnoître & fe I
donner l’avis du départ général, dont le fignal I
dans nos contrées ell le vent du nord. Elles I
s’élèvent toutes enfemble & dans quelques inf- I
tans fe perdent au haut des airs. On connoit au- I
jourd’hiti les pays qu’elles vont habiter; des I
voyageurs éclairés nous ont appris qu elles al- I
loient en Egypte & en Lybie.
Outre ces émigrations lointaines & qui I
arrivent tous les ans dans des faifons déter- I
minées , il y a des oifeaux qui arrivent quel- I
quefois comme par hafard & en grandes trou- I
pes dans d’autres pays ; les bec- croifés ^ les I
caffe-noix, font fujets à ces émigrations irré- I
gulières & qui n’arrivent qu’une fois en vingt I
ou trente ans (1). La feule caufe qu’on puiflè I
imaginer, c’eft quelqu’intempérie dans le cli- I
mat qu’habitent ces oifeaux qui, dans de I
certaines années, aurok détruit ou fait avorter I
les fruits & les graines dont ils fe nouriflent, I
ou bien quelque orage ,quelque ouragan fubit I
qui les aura tous chaffes du même côté; cari
ils arrivent en H grand nombre & en même I
temps fi fatigués, fi battus, qu’ils n’ont plus I
de fouci de leur propre confervation, & qu’on I
les prend pour ainfî dire à la main fans qu’ils I
fuient.
La bergeronette, la lavandière, les traquets, I
les rojjignols, les fauvettes, les globe mouches, I
le rouge gorge j poul, le Jouci , ie loriot, I
arrivent parmi nous au printemps & difpa-1
roiiïent en automne. La beccajfe defeend des I
hautes montagnes au commencement du mois I
d’odobre , pour venir dans les bois des col-1
fines inferieures & juÆjues dans nos plaines, I
où elle pafle l’hiver & regagne enfuite les I
hauteurs au retour du printemps. Tous les I
oifeaux, en un mot, font fujets a changer I
de climat ou a modifier leur féjour dans qelques I
faifons.de l’année : quelles peuvent donc être I
les caufes de ces migrations périodiques? H I
paroit que ceft le défaut de nourriture : en I
effet , ces oifeaux ne trouvent plus dans un I
pays les alimens qui leur conviennent. Il eft ne* I
cefiaire qu’ils pafTent dans des contrées où ils I
trouveront en abondance la proie fans laquelle I
ils ne peuvent pas fubfifter j & il eft fi vrai que I
c’efi là-la caufe générale & déterminante des!
(1) Les bees'croifés ont paru en 1756 & ƒ 7 57> daslS
lï voifîuage de Londres, en grande quantité»
1 N T R 0 D
mlaratlons des oifeaux, que ceux là partent
ies8premiers qui vivent d’mfeaes voltigeans
& pour ainfi dire aeriens , parce que ces m-
M es manquent les premiers; ceux J M
de larves, de fourmis & d’autres mfeètes ter-
refires, en trouvent plus long temps & partent
plus tard ; ceux qui fe nourrillent debaies ,
de petites graines & des frutts qui muriflent
en automne & qui relient fur les arbres tout
l’hiver, n’arrivent aufli qu’eu automne , «
relient dans nos campagnes pendant U mau-
vaife faifon; ceux qui vivent des memes alr;
mens que l’homme & de fon fuperflu fréquentent
pendant toute Pannee les lieux
habités : enfin de nouvelles cultures quisin-
troduifent dans un pays, donnent lieu a la
longue à de nouvelles migrations. C eft amii
qu’après avoir établi à la Caroline , la culture
de l’orge, du riz & du froment, les colons
v ont vu arriver régulièrement chaque année
des volées d’oifeaux qu’on n’y connoiftoit
point, & à qui l’on a donné, d’apres cette
circonilance, les noms d’oifeaux de riz , d or
féaux à bled & c 1). D’ailleurs, il n eft pas
rare de voir dans les mers d’Amérique des
elfaims d’oifeaux attirés par des nuées de papillons
fi coniidérables que Pair en elt obf-
I ctirçi. Dans tous les cas, ^ il paroit qui
ce n’eft ni le climat, ni la faifon , mais 1 ar
ticle des fubfiftances, la néceiïité de vivre
qui détermine principalement leurs migra
tions, qui les fait errer de contrées en con
trées , pafle r & repafler les mers ou qui les
fixe pour toujours dans un meme pays.
Il eft peut-être aulîi une autre caufe qui
influe fur les voyages des oifeaux, du moins
fur leur retour dans le pays qui les a vu naître.
Si un oifeau n’a point de climat, du moins
il a une patrie : comme tout autoe animal il
reconnoit, il affeâionne les lieux ou il a commencé
de voir la lumière , de jouir de fes
v facultés, où il a éprouvé les premières fen-
fations, goûté les prémices de i’exiftence ; il
ne le quitte qu’avec regret & \orf<l.1 11 y
forcé par la difette ; un penchant irréfiflible 1 y
rappelle fans ceffe; & ce penchant , joint^ à
la .connoiflance d’une route qu’il a déjà faîte
& à .la force de fes ailes, ie met en état de
revenir dans le pays natal toutes les fois qu’l
peut efpcrer d’y trouver le bien être & la fub
fiflance.
( 1) Voyez les tranf. Dhilof. n°. 48 , art.
U C T I O N.
O bservations générales sur les moeurs des
oiseaux. Dans, l’immenfe populalion des ha-
biians de Pair, il y a , dit M. de Buflfon, trois
états ou plutôt trois patries, trois féjours dif-
férens : aux uns, la nature a donné la terre
pour domicile ; elle a envoyé les autres
cingler fur les eaux ; en même-temps q 1 elle
a placé des efpèces intermédiaires aux confins
de ces deux clcmens, comme pour en
faire le commerce vivant & pour former en
ce genre les degrés , & les nuances des différentes
habitudes qui réfultent de la tfiverfite
des formes dans toute nature organilce. On
pourroit donc en faifant abftraâion des ca-
raélères d’organifation qui rapprochent certaines
efpèces, ranger tous les oifeaux en trots
grandes familles, favoir en oifeaux de terre,
d’eau & de rivage.
On divife encore très-imparfaitement les
oifeaux terreftres , d’après leur manière de
vivre, en oifeaux carnaciers, en granivores &
en frugivores. Les carnaciers, qu’on appelle
aufli oifeaux de proie, parce qu’ils fe nour-
riflent de chair & qu’ils font la guerre aux
autres oifeaux, ont tous P°^r
turelle & commune , le goût de la chafle oc
l'appétit de la proie , le vol trcs-éleve, le
bec crochu , l’aile & la jambe forte , les
oncles recourbés, la vue tiès-perçante , la
langue charnue , Peftomac fimple 5c membraneux
, les inteftins moins amples & plus
courts que les autres oifeaux. Ils habitent de
préférence les lieux folitaires, les montagnes
déferres, & font communément leur nid dans
les trous des rochers ou fur des arbres très-
élevés. Les femelles de cette tribu font d’un
tiers plus grandes que les males, mais beaucoup
moins fécondes que celles des autres
oifeaux ; celles des grandes efpeces, de l aigle,
par exemple , & de l'orfraie, ne pondent ordinairement
que deux oeufs ; d’où l'on conclut
que ie nombre dans le produit de la génération
eft proportionnel à la petiiefle de
l’animal, dans les oifeaux comme dans les
quadrupèdes. De plus, on a remarque que
les oifeaux carnaciers ont plus de durete
dans le naturel & plus de férocité dans le
caractère : non-feulement ils font les plus difficiles
de tous à priver , mais ils ont encore
prefque tous , plus ou moins 1 habitude
dénaturée, de chafler leurs petits hors du nid,
bien plutôt que les autres oifeaux , 8c dans
le temps qu’ils leur devroient encore des loin*
& des fecours pour leur fubfiftance : cette