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.Oreilles. Dans les oifeaux comme dans tous
les autres ordres d’animaux, les oreilles font
dans la pofition la plus avantageule : elles
occupent le haut de la tête, afin que dominant
fur les autres parties du corps, elles
puiflent recevoir les imprcflions d’un plus
grand nombre d'objets; elles font placées à
côté du cerveau , centre commun des fenfa-
tions, afin de lui communiquer plus promptement
les vibrations du fon ; & enfin elles
avoilinent les yeux qui ont avec les oreilles
tant de rapports, & un commerce intime par
d’eptremife des mufcles qui lient ces deux
organes.
A l'extérieur, la forme de l’oreille eft fim-
pîe & très*app’opriée au vol ; elle n’a point
de conque extérieure, qui, en préfentani une ,
réliflance à l’air, mettroit obflacle au mouve- i
ment progreftif ; c'ell un fimple conduit plus
ou moins large, tantôt nu, tantôt ombragé
de plumes ( i) ; & garni quelquefois d’une
efpèce de cou vercle qui s’ouvre & fe ferme
au gré de l’animal : les oifeaux de proie nodur-
nes pofledent exclufivement cette faculté.
Dans la chouette qui fe perche fur les arbres
ou fur les tours, & qui guette fa proie.en
écoutant de haut en bas, on remarque encore
une ftruâure particulière : le conduit
auditif efi évafé du côté de la mandibule inférieure
& relevé en faillie par le haut, afin
de recevoir jufqu’aux moindres ondulations
du fon, tant efi grande la prévoyance de la
nature & la perfection qui règne dans tous
fe s ouvragesf
Il feroit trop long de décrire ici en détail
tout ce qui entre dans l’organifation intérieure
dé l’oreille ; je vais propofeF feulement
quelques obfervations fur les trois principales
parties d’où dépend le mécanifme
de fouie, les membranes 6r cartilages de la
petite colonne 8c le conclave.
Le timpan ou membrane du tambour eft com-
pofé de deux autres membranes, l’une intérieure
fautre extérieure, qui recouvre tout
le conduit de l’oreille. Du côté de ce conduit
qu’on nomme encore bajjhi ou tambour de
Voreille , on trouve un cartilage attaché au
milieu de cette membrane & qui fert à la
foutenir, à l’étendre & à la relâcher. Au bout
de la petite colonne dont nous allons parler,
( i ) Le trou des ortilles de l’autruche eft fort grand
& dépourvu de plumes ; dans le grand-duc au contraire ,
ces ouvertures font garnies de plumes redreftees qui
forment une efpèce d’aigrette de .chaque côté de la tête,
on remarque auflî un autre cartilage, conformé
en triangle ifocèle ; il adhère par le
fommet au cartilage de la membrane extérieure
8c concourt avec lui à foutenir la
partie fupérieure de cette membrane. Les
deux angles de la bafe de ce cartilage triangulaire
, font attachés à l’oj pétreux, à quelque
diftance de la membrane ; 8c forment
parleur réunion avec la membrane intérieure,
une efpèce de bourfe. Il y a outre cela un
petit ligament très-fin , qui s’étendant du côté
oppofé , traverfe le conduit, & s’imère à la
bafe du cartilage, près de l’endroit où il fe
joint à la petite colonne.
On entend par cette petite colonne, que
Schelhammer a appellé en latin columella ( i ) ,
un tuyau offeux, très-menu , délicat, concave
à fa bafe 8c élargi en une efpèce de couvercle.
Cette bafe ferme & couvre exactement
un trou qui eft au conclave, 8c auquel elle eft
attachée circulairement par une membrane
très-mince , compofée de la partie molle 8c
tendre du nerf auditif.
Le conclave, que quelques anatomîftes appellent
labyrinthe ou le limaçon, corififte en
plufieurs branches, qui reflembient plutôt aux
canaux demi circulaires de l’oreille de l’homme
qu’au limaçon. Cette cavité eft formée, comme
dans la plupart des autres animaux , par un
os folide 8c dur. Prefque toutes les efpèces
d’oifeaux ont des efpèces de canaux demi-
circulaires plus ou moins grands, & qui fe
croifent les uns les autres par des angles droits;
ceux qu’on trouve dans la tête de l’oie, ont
une conformation différente. Tout le conclave
8c les canaux font tapifles de la partie tendre
du nerf auditif, qui entre du côté oppofé au
couvercle de la petite colonne.
Il n’eft pas aifé de concevoir la figure 8c
l’arrangement de ces diverfes parties; Pinf-
peCtion feule peut en donner une connoif-
fanGe précife: cependant , comme l’oreille
des oifeaux eft d’une ftrudure plus fimple
que celle des autres animaux (2) , voici en
peu de mots, l'idée qu’on peut fe former de
la manière dont s'exécute le mécanifme de
l'ouie. Les molécules de l’air, étant mifesen
vibration par le choc des corps ou par l’im- *2
( i ) Franciio. Sylvius , cap. 3 , §. 8 , dé Schçlammer.
(2) On ne trouve point dans l'oreille des oifeaux le
même nombre de parties qu’on obfcrve dans celle des
quadrupèdes: l'étrier, par exemple, eft remplacé par le
couvercle de la piti e colonne ; & le marteau par le ligament
du cartilage qui termine la petite colonne.
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pulfion de la voix, vont frapper le timpan ou
la membrane du tambour : ce mouvement fort
ou foible, doux ou perçant, fe communique
au même inflant aux cartilages, à la petite
colonne, au couvercle, 8c fe propage de cette
manière jufqu’au nerf auditif, qui tapifteles
jparois du conclave. Si enfuite on compare
l’organe de l’ouie & fes mou vetnens avec ceux
de la vue , oh verra que le conclave eft à l’ouie
ce que la retine eft à la vue ; & que les corps
fonores font leurs impreflîons fur le cerveau ,
par l’entremife des nerfs auditifs répandus
dans le conclave, comme les rayons vifuels
font les leurs par le concours du nerf optique
fitué derrière la retine.
Bec. Cette partie antérieure de la tête, qui répond
par fes nfages à la bouche de l’homme,
à la gueule des quadrupèdes, à la trompe des
înfedes & au fuçoir des vers, eft dans les
oifeaux un organe principal , d’où dépend
l’exercice de leurs forces, de leur industrie,
8c de la plupart de leurs facultés. C’eft tout
à la fois la bouche & la main de plufieurs individus
qui compofent cet ordre d’animaux ( 1 ),
l’arme pour attaquer , rinftrumentpour làrfir,
& la partie du corps dont la conformation
influe le plus fur leur inflind, & qui détermine
la nécelfité du plus grand nombre de leurs
habitudes : 8c fi ces habitudes font infiniment
variées dans les nombreufes tribus du peuple
volatile; fi leurs différentes inclinations les
difperfent dans l’air, fur la terre & les eaux,
c’eft que la nature a de même varié à l’infini,
8c deftiné fous tous les contours poffibles le
( 1 ) Les perroquets ne marchent , ne grimpent ni ne
defcenôent jamais fans commencer pat s’accommoder ou
s’aider avec la pointe de leur bec : enfuite , ils portent
leur pattes en avant pour lèrvir de fécond point d’ appui j
& ce n’eft que quand ils marchent à plat qu’ils ne font
point ufage de leur bec pour changer de lieu. M. de
Buffon a pareillement obfeivé qu'un jeune coucou ne
faifoie aucun ufage de fes pieds pour marcher, mais
qu’ il fe fervoit de fon bec pour fe traîner fur fon ventre
à peu près comme le perroquet s’en fert pour grimper, j
BufF. hift. nat. du coucou, vol. X I, p. 480.
Le 12 juillet, j ’eus une occafion favorable d’obfer-
ver un engoulevent , pendant qu’il tournoit au tour d’un
grand chene, fur lequel étoir une prodigieufe quan
tité de fearabées. L ’ ufage que cet.oifeau fait de fes ailes
furpaffe s'il eft poffible celui de YhirondeUe ; mais ce qui
m’a le plus frappé, ç’ a été de lui vôir étendre là patte,
baifTer la tête & faifîr avec fui bec quelque chofe qu’ii
tenoit dans fes ferres. S ’il emporte avec lui , comme
je n’en doute pas , une partie de fa proie , on ne doit
plus être étonné de la fingulicte coriftn.clion de fon
doigt du milieu qui trouve armé d’un orgie recourbé.
White the natural h'ifi. andantiquit.of Suborne p. 95.
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trait du bec. Un croc aigu & déchirant arme
la tête des fiers oifeaux de proie, & leur donne
les moyens de fatisfaire l’appetit de la chair
8c la foif du fan g , qu’ils exercent avec tant
de cruauté fur les oifeaux & même fur d’autres
animaux foibles ou craintifs , dont ils
font également des viâimes. Un bec en forme
de cuiller , large & plat, détermine i’inftinCt
des oies , des canards , des fpatules j 8c "les
oblige à chercher leur fubfiftance au fond
des eaux ou dans les fanges des marais; tandis
qu’un bec en cône court & tronqué , en
donnant à nos oifeaux de bafle-cour , la facilité
de ramafter les graines fur la terre, les
difpofe de loin à fe raffembler autour de nous ,
& à venir pour arnli dire s’offrir à nos ufages.
Le bec en forme de fonde grêle & ployante,
qui alonge la face des courlis, de la becajfe,
de la barge 8c de quelques autres oifeaux de
marais ou de rivage, les oblige â fe porter
fur les terres marécageufes pour y fouiller la
vafe molle & le limon humide. Le bec dur,
tranchant & acéré des pics , fait qu’ils s’attachent
au tronc des arbres pour en percer le
bois; 8c enfin, le petit bec en alêne de lafauvette
, du rojjignol, delà lavandière, de l'hirondelle,
ne leur permettent que de faifir les vers,
les moucherons , ou les infeCtes, &Ieur interdit
toute autre nourriture. Cette forme de
bec eft infiniment varice non-feulement par
nuances, comme tous les autres ouvrages de
la nature, mais encore par degrés & par fauis-
affez brufqties. L’énorme grandeur du bec du
toucan ( 1) , la monftrueufe enflure de celui
du calao (2), la difformité de celui du flamant
& du petrel (3), la figure bifarredu bec delà
fpatule 8c du favacou (4) , l’applatiftement vertical
de celui du macareux 8c du pingoin (c ),
la coupe carrée & tranchante de celui de
Vhuürier (6), la courbure à contre fens de
celui de Vavocette 8c du jabiru (7) , &c. nous
démontrent affez que toutes les figures pofir^
blés ont été tracées & toutes les formes
remplies : au fil toutes ces diverfes configurations
fervent à difiinguer les familles ,
8c forment les caractères fecondaires de notre
clafiification. 1 2 *4 6
(1) PI. 108. fig. i & i.
(2) Pl. 108. fig. 4 & ĥ
(?) Pl. 4 2 .% . 3, & pl. 20. H g, 3.
(4) Pl.72.flg. I , 2, 3 , 4&5.
( 0 Pl. *o .fig. I , 2 , 3-
(6) Pl. 6. fig. I.
K 42. flgv I* P1* 4 1 . fig- 4 &ph 47* fig- 2.'