
doit avoir été dans l’origine, ie motif inté-
reflànt qui l’a excité à beaucoup de recherches.
Les peuples j qui peuvent fe palier d’habits,
font en général plus ftupides que les autres,
parce qu’ils manquent d’un befoin qui devient
bientôt la fource d’un grand nombre
d’inventions & d’arts. Concluons donc , en
analyfant cet article, que les oifeaux pour-
roient avoir fait des progrès fans que nous
fullions capables^de les fentir , mais qu’il
eft vraifemblable qu’ils n’en ont pas fait beaucoup
& même qu’ils n’en feront jamais, parce
qu’ils ne peuvent tirer à cet égard prefque
aucun fecours ni de la nature de leur fociété ,
lorfqu’ils en ont, ni des motifs qui les raf-
lèmblent, ni du loilîr qu’ils n’ônc pas, ni
des pallions fa&rces dont ils font pareillement
dépourvus.
Voyages. Les quadrupèdes, bornés pour ainfi
dire, à la motte de terre fur laquelle ils font
nés, ne connoilïent que leur montagne, leur
plaine ou Ieurvallée; ils n’ont nulle idée de Pen-
fembie des furfaces, nulle notion des grandes
diftances , & par conféquent nul defir de les
parcourir ; mais les oifeaux parfaitement inf-
truits de la connoilïànce des lieux éloignés,
& doués de la faculté de s’y rendre en peu
de temps , entreprennent tous les ans de
longs & périlleux voyages, fur la notion anticipée
des changemens de l’atmofphère &
de l’arrivée des faifons , qui les déterminent à
partir en fembie & d’un commun accord , dès
que les vivres commencent Jà leur manquer,
dès que le froid ou le chaud les incommodent.
D ’abord ils paroiflènt le ralTemblef de con- !
cert pour entraîner leurs petits & leur communiquer
le même defir de changer de climat
f qu’ils ne peuvent encore avoir acquis
par aucune inflruétion ni expérience précédente.
Les pères & mères ralïèmblent leur famille
pour la guider pendant la traverfée, &
toutes les familles fe réunifient enfuite, non-
feulement parce que tous les chefs font animés
du même defir ,. mais parce qu’en augmentant
les troupes , ils fe trouvent en force
pour réfifier à leurs ennemis.
Ce defir de changer de climat, qui communément
le renouvelle deux fois par an,
c’eft-àdire, en automne & au printemps, eft
une efpèce de befoin fi preffimt, qu’il fe ;
manifefte dans les oilèaux captifs, par les inquiétudes
les plus vives. On a vu de jeunes
caillesj élevées en domefticité prefque depuis
leur najlîançe, & qui nepouvoient connoître
ni regretter la liberté, éprouver régulièrement
deux fois tous les ans des agita- I
tions fingulières: elles alloient d’un 'bout de
la cage à l’autre, puis s’élânçoient contre le
filet qui lui fervoic de couvercle, & fouvent
avec une telle violence, qu’elles retom-
boient toutes étourdies. Lorfque ie temps de
la migration approche, les oifeaux libres,
non-feulement fe réunifient en troupes, mais
encore s’exercent à faire de longs vols, de
grandes tournées , avant que d’entreprendre
leur plus grand voyage. Au refle, tous les
oifeaux ne font pas voyageurs ; & les cir-
confiances de ces migrations varient même
dans les efpèces qui aiment à changer de cli-l
mat. Il y en a qui partent feuls ; d’autres avec 1
leurs femelles 8c leurs familles ; d’autres
marchent par petits détachemens ou en
troupes nombreufes.
Les raies voyagent ordinairement feuls. É
Cet oifeau dont le vol eft court & pefant, I
au moment où la faifon du départ arrive, I
recueille toutes fes'forces pour fournir au I
mouvement de fa longue traverfée. Il prend I
fon elTor la nuit ; 6c fécondé d’un vent pro- I
pice il fe porte dans nos provinces mérrdro- I
nales, d’où il tente le pafiage de la Méditer- I
rannée. Les anciens & les modernes fe font I
beaucoup occupés du paflage des cailles ; I
les uns l’ont chargé de circonltances plus I
ou moins mervéilieufes ; les autres confidé- I
rant combien cet oifeau vole difficilement & I
péfamment, font révoqué en doute, & ont I
eu recours, pour expliquer la difparution ré-1
gulière des cailles en certaines faifons de I
l’année, à des fuppofiiionS plus révoltantes; I
ils ont prétendu qu’aux approches des fri-1
mats, elles fe retiroient dans des trous pour I
y palier l’hiver, dans un état de torpeur & I
d’engourdiflement, comme font les iorrs,les I
hériftons, les marmottes , &c. ; mais il eft I
certain qu’au même - temps où elles difpa-1
roifient de nos contrées; elles paflènt à
Malthe, dans les illes de Pontia , de Pondata-1
ria, de Caprée, vers le golphe Adriatique, I
pour fe rendre enfuite dans des pays“plus mé* I
ridionaux. Les obfervations des voyageurs à I
ce fujet font en fi grand nombre & fi multi* I
pliées, qu’il n’eft plus permis d’en douter;l
il y a deux migrations tous les ans; une au!
printemps & l’autre en automne; 6c c’eft ia|
nuit, fuivantBelon , qu’elles voyagent.
Les ro Hiers, les b if et s, ont des faifons mar-1
quées pour leurs migrations, 6c paflent re-1
gulièrement I
gulièrement tous les ans des contrées fepten-
trionales, dans celles du midi.
Les grives viennent au commencement de
Pautomnne , avec ces volées innombrables
d’oifeaux de toute efpèce, qui, aux approches
de l’hiver j traverfent la mer Baltique ,
6c paffent de la Laponie, de la Sibérie,-de
la Livonie, en Pologne, en Prude, 6c de
là dans.des climats plus tempérés.
II eft certain que tous les ans, un peu après
l’équinoxe d’automne, les hirondelles abandonnent
nos contrées feptentrionales , 6c
qu’elles ne reparoiflent qu’au commencement
du printemps fuivant; cette obfervation étoit
même connue des anciens; Ariftote 6c Pline
ont dit que ces oifeaux vont palier l’hiver
dans des climats d’une température!pîus douce,
lorfque ces climats ne font pas fort éloignés,
mais que lorfqu’elles fe trouvent à une grande
diftance de ces régions tempérées , elles ref-
tent pendant l’hiver dans leur pays natal, &
prennent feulement la précautionjde fe cacher
dans quelques gorges de montagnes bien ex-
pofées : Ariftote ajoute qu’on en a trouvé beaucoup
qui étoient ainfi recélées, 6c auxquelles
il n’étoit pas refié une feule plume fur le
corps. Cette opinion accréditée par de grands
noms , 6c fondée fur des faits, étoit devenue
une opinion populaire, au point que les
poètes y pnifoient des fujets de comparaifon;
O la u s Magnus, 6c Kircher, renchétiflant fur
ce qn’Ariftote avoir avancé, ont prétendu que
dans lés pays feptemrionaux, les pêcheurs
tirent fouvent dans leurs filets avec le poifibn,
des groupes d'hirondelks pelotonnées, fe tenant
accrochées les unes aux autres , bec
contre bec, pieds contre pieds, ailes contre
ailes ; que ces oiféaux tranfportés dans les
pocies fe raniment allez vite, mais pour
mourir bientôt après; 6c que celles - là feules
confervent la vie après leur reveil, qui
éprouvant dans fon temps l’influence de la
belle faifon, fe dégourdifïentinfenfiblement,
qurttent peu-à-peu le fond des lacs, reviennent
fur l’eau, & font enfin rendues par la
nature même, 6c avec toutes les gradations
a leur véritable élément. Cette aifertion a
ete répétée, embellie, chargée de circonftances
plus ou moins extraordinaires ; 6c comme s’il
y eue manqué du merveilleux, on a ajouté
qn* vers le commencement de l’automne,
fifeaux venorent en foulé fe jetter dans
les puits & les citernes. Cette opinion qui
neft appuyée que fur des conjedures, a eu
beaucoup de partions: M. White, dans fou
hifiôire naturelle des antiquités de Selburne * a
publié encore de nouvelles obfervations qui
fâvorrfent un peu l’alfertion de ceux qui prétendent
que les.-hirondelles fe plongent dans
l’eau pendant l’hiver. « Pendant monféjour
à Sambury près cTHamptoncourt, fur laTa-
mife, dit - il , je m’amufois à obferver les
effaims d1hirondelles qui s’affemblent en cet
• endroit; & ce qui me frappoit le plus, c’étoit
de les voir abandonner les toits 8c les cheminées,
pour aller fe repofer fur les touffes
d’ofiers qui couvrent les bords de la rivière.
En les voyant rechercher l’eau dans cette far-
fon de l’année, je ne pou vois m’empêcher
de regarder comme probable l'opinion du
naturalifte Suédois (Linné;, qui, dans fou
calendrier de Flore, en parlant des hirondelles ,
dit qu’elles vont aufli régulièrement fe cacher
fous Peau au commencement du mois de
feptembre, que les poules vont fe jucher, un
peu avant le coucher du foleil. (i). Dans un
autre endroit de cet ouvrage, le même auteur
s’exprime ainfi : un de mes voifins,
grand obfervateur,, m’aiTure qu’il a vu au
commencement du mois de mai, un peu
avant huit heures du loir , une trentaine d’hirondelles
perchées fur une branche de faule
au bord d’un étang. Leurs têtes étoient tournées
du même côté, 6c elles ne paroiflbient
avoir aucun efpèce de mouvement. II n’entendit
qu’un léger gazouillement qui les lur
fit d’abord appercevoir. Le poids de leur
corps faifoit pencher la branche jtifqu’au niveau
de la rivière. Tous ces faits raffemblés,
pourfuit toujours M. White, me déterminent
à croire que les hirondelles aiment beaucoup
Peau , indépendamment de la nourriture
qu’elles rencontrent fur le rivage, 6c que fi
elles ne fe retirent pas dans cet élément, il eft
très-probable qu’elles fe cachent dans la terre
fur les bords des rivières & des étangs, pendant
la faifon rigoureufe de l’hiver (i).
Ces obfervations prouvent, ce me fembie,
que les hirondelles fe plaifent fur le bord des
eaux; qu’elles s’y portent en plus grand nombre
au commencement de feptembre, parce
que peut-être alors lesinfeâes dont elles font
leur nourriture , fe rabattent plus volontiers
fur les endroits aquatiques ; 6c on ne peut
en rien conclure en faveur de l’immetfîon de * (i)
(i) Hift. nat. and antiq. of Selburne, pag. jf.
(i) tiji , pag- 2-77-
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