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remarque aufli utile, l’élève n’eft pas plutôt entré
dans la nouvelle pifte, qu’il difpofe le cheval à
prendre le premier coin qui fe préfente à droite.
Au moyen de ce que le changement de main aboutit
prefque dans un angle, le peu d’intervalle qui
fépare la clôture de la première évolution d’avec
rouverture de la fécondé , pourroit embarraffer
celui qui tarderoit à fe rappeller l’analogie précédemment
apperçue entre la prifed’un coin & l’action
du tourner.'Mais notre élève ne balance pas à
foùtenir fa main fur le dehors, bien perfuadé que
la colonne de devant, répartie pour lors fur la
jambe i , force le cheval d’apporter dans le coin
la jambe 2,, & néceflairement de placer tranfvèrfa-
lement la jambe 3 fur la crête de l’angle. Enfuite ,
fidèle obfervateur de la méthode du tourner à gauche,
il exécute la fortie du coin ouvert à droite
avec la cambrure de la main , qu’il ramène auflitôt
fur le dedans, & termine ces deux opérations par
une defcente de main étroitement liée à la preflion
de fes jambes égales. Le cheval , qu’entraîne une 1
puiflance irrèfiftible, après avoir porté la tête à
gauche , paffe fa jambe 1 fur fa jambe a , & finit la
fortie du coin par le jeu tranfverfal de la jambe 4.
Je fais qu’il eft d’ufage , à chaque changement de
main , de faire paffer les rênes dans la main du dehors
: je conviens même que c’eft ce paffage des
rênes d’une main dans l’autre qui donne le nom à
révolution dont je viens de parler. Mon but, en
négligeant cette règle pour les feuls éléments, eft
de mettre mes élèves à portée de bien fe confirmer
dans les deux évolutions du tourner , de la feule
main gauche, avant que de leur confeiller de s’aider
de la main du dedans.
Le Doubler.
Il arrive quelquefois que l ’écuyer invite nn de
fes élèves à doubler ; c’ëft-à« dire qu’il lui confeille-
de partager la longueur du manège de façon à ne
prendre, dans le quarré long qu’offre fa fuperfi-
cie , que l’efpace néceffaire pour décrire un quarré
parfait plus ou moins régulier. Ainfi le doubler eft
compofé de deux faux coins comte deux vrais. Dès
qu’on' entend commander cette évolution , il faut
fe figurer avoir totalement parcouru la carriêr.e,
& opérer, en conféquence, comme à la prife des
coins, fuivant la main où on eft, fans oublier de
s’étendre fur le dèdans. Quoique le doubler n’ait
été imaginé qu’afin de garantir les chevaux des atteintes
qu’ils pourroient fe donner en travaillant
trop près les uns des autres, cependant on s’en
fert avec- avantage pour éprouver le degré des
forces de celui qui double. En effet, prefque toutS'
les chevaux de manège ont une fi grande habitude
des diverfes évolutions qui cpmpofent chaque leçon
, qu’ils lés ëxéeuteroiént volontiers à la voix
eh forte que ,: fans injnftice, ôn- peut foupçonner;: 1
lés houveaux' élevés d’avoir peu de part y foit à lar J
prife des: coins', foit aux changements de main. I
Mais, la première pifte du doubler étant in dé ter» [
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minée, aînfi que les deux premiers coins fiâifs qui
lient cette pifte ordonnée, & à celle qu’on abandonne
, & à celle qu’on va chercher, e’eft alors
réellement la feule volonté du cavalier qui fait agir
le cheval le plus routé. On doit fentir combien il
eft avantageux de doubler dé temps en: temps,,
quoique fans néeeflité", puifque la précifion avec
laquelle on demande cette dernière évolution fait
la preuve de la jtrfteffe de toutes celles qui l'a précèdent.
Lorfqu’un élève reçoit une leçon particulière
, il eft le maître de fixer le point d’où iï veut
partir pour doubler de fon propre mouvement. Au
lieu ■ qu’entre plufieurs académiftes , travaillant
concurremment fur la même pifte, celui qui mène
la file , ou qui la termine , a feul la permiffion de
doubler fans en être averti : encore faut-il, qu’arrivé
précifément au milieu de la pifte , il fe trouve
au centre d’un des deux longs côtés*
Second Changement de main de droite à gauche*
C ’eft aufli l’écuyer qui annonce le fécond changement
de main dont la diagonale, tracée de-droite
à gauche, q q q q , ramène l’élève fur la première
pifte deftinée à voir commencer & finir chaque re-
prife. Nous nous contentons d’indiquer ici la direction
du fécond changement de main , afin de rappeller,
qu’après la préparation du demi-arrêt, les-
temps dé main foutenue fur le dehors, cambrée
& reportée fur le dedans, comme pour le tourner
à gauche, doivent être en raifon proportionnelle
au demi-tourner repréfentatif des deux changements
de main*
Fin de la leçon'*
Lorfquron entend prononcer le mot héla, on
s’apprête à marquer l’arrêt définitif. Pour parve-
nir à mettre le cheval en état d’interrompre, fans
effort, l’aélion entretenue depuis le commencement
de la reprife , on doit avoir foin de le faire
paffer, par degré, du trot au pas, du pas au demi-
arrêt, & du demi-arrêt à l’arrêt total. On recule
enfuite un ou deux pas , & on retourne dans la le-
, vée pour y attendre l’inftant de commencer la fécondé
reprife* •
Quelqu’appliqué quron fùppofe un nouvel élève
, ne peut-on pas imaginer, fans, bleffer fa déli-
cateffe, qu’il n’a pas encore eu le temps d’apprécier
l’utilité des deux ouvertures ménagées .dans le
mur d’appui qui fépare ordinairement la carrière
d’avec: la levée r r ? En effet, cette dernière » tou-
t jours occupée par ceux qui.commencent ou finif-
fent une reprife, deviendroit le théâtre d’une con-
fufion inévitable, fans l’ordre expreflement adrefle
; aux entrants 8c aux fortants de ne jamais fe fervir
: d’autrq .paffage que de celui qui s’offre à leur, gau-
; chu, Touts-les chefs d’académie' ont fi bien fenti la
; néeeflité de eëtte- règle qui fympjatife d’ailleurs
aveé l.’nfage d’entarher chaque reprife de.gauche a
droite ) qu’elle s?abferve à la rigueurmême dans
les manèges où la difpôfitton du terrein n’a permis
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«d'une
enjoint aux élèves de
arrivent, foitquüs s
falité d’une loi faü<
afin de gagner la con
tique, on va rendre
flon de celle-ci. | . , H R
Nul doute que le premier maître de manege, a
oui les avantages d’une levée régulière fe font montrés
dans tout leur jo u r , n’ait fur-tout été feduit
par la certitude d’empêcher qu’aucun obftacle n’interrompît
cette efpèce de courant que l’enchaînement
des reprifes établit depuis le moment où le
premier cheval fort de la levée pour entrer dans
la carrière, jufqu’à celui où le dernier fort delà
carrière pour rentrer dans la levée. Aufli n’a-t-il
pas manqué, en preferivant à fes fucceffeurs les
deux iflùes qui font tout le mérite de cette partie
d’un manège en forme, de leur obferver que, fi on
en Opprime une, aufli*tôt on voit les élèves, inquiétés
par la rencontre de leurs camarades, hé-
fuer d’abord quelques inftants avant que de chercher
à paffer, mais bientôt, entraînés par la foule,
fe précipiter pêle-mêle , & forcer tumultueufement
le feul débouché qui leur foit accordé. Quelle différence
, lorfqu’on rétablit les deux portes d’une
levée feinte ou réelle 1 Alors , qu’un élève fe pré-
fènte avec l’intention d’entrer au manège , ou qu’il
ait deffein de changer de cheval, ou bien dans l’attente
de fa fécondé reprife,,ou enfin pour fortir
tout-à-fait, pourvu qu’il ait l’attention de confer*
ver fa gauche , jamais aucun embarras ne l’arrête.
Ceft ainfi que chacun paffe à fon tour de la levée
dans le manège , & du manège , dans la levée.
Travail du Manège.
Les éléments qui font la bafe de l’équïtation ;
ces éléments où l’on puife des notions anatomiques
de l’homme & du cheval ; qui enfeignent la façon
de monter fur un cheval ; qui donnent la méthode
; pour s’y placer furement & agréablement ; dans
‘ iefquels on démontre la mécanique des mouvemens
du cheval ; où on indique comment, après avoir fu
raffembler un cheval, on peut le porter en avant,
foit au pas, foit au trot, foit au galop ; qui traitent de
la néeeflité abfolue de marquer un demi-arrêt avant
que de tourner, ou de gauche à droite, ou de droite
à gauche ; dans Iefquels on trouve les moyens d’arrêter
un cheval, enfuite de le reculer , enfin la façon
d’en defeendre ; ces éléments qui contiennent
& la deîcription d’un manège, & le détail des le çons
qui s’y prennent ces éléments enfin où on
explique tout ce qui concerne la leçon.du faut dans
les piliers ; ces éléments, dis-je , malgré leur étendue,,
ne peuvent jamais fatisfaire que ceux qui
n’ont d’autre b ut, en venant au manège , que de
fgyoir ce qu’on entend ordinairement par fe tenir
fur un cheval. Ce n’eft queJa parfaite intelligence
des airs de manège qui mène à l’art de l’équitation
, & qui, feule , petit faire acquérir le titre
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d’homme de cheval. Comme on s’attendoit peut-
être que j’allois dire le titre d’é cuy er, je me voi*
obligé d’appuyer la diftinâion que je fais ici de ces
deux perfonnages , en appréciant la dofe de fayoir
propre à chacun d’eux.
Diflinâion de l'homme de cheval F avec V écuyer*
L ’homme de cheval eft celui qui fait monter dans
toute l’étendue de l’expreflion >qui fait encore mener
, à leurs airs, les différents chevaux qii’on lui
préfente, & c e , avec le degré de jufteffe qu’ils
exigent ; qui peut même , à l’aide de l’exécution
précife qu’il s’eft rendue familière, parvenir à dref-
fer quelques chevaux.
Non-feulement l’écuyer poflede éminemment
tout le talent qui conftitue le meilleur homme de
cheval, mais il a , de plus que lui, la connoiflance
intime de la charpente du cheval : connoiflance qui
lui donne ce ta& pour diftinguer , au premier coup-
d’oeil ,1e cheval dont la conftruâion peut s’adapter
à l ’équitation , ou que cette même conflruéiion en
éloigne : connoiflance qui lui fe r t, avec beaucoup
plus . d’avantages , en lui preferivant ce qu’il peut
attendre de. chaque individu. Aufli les chevaux af-
fez heureux pour tomber entre 'les mains d’un
écuyer, ayant toujours la poflïbilité de répondre à
ce qu’on leur demande, fe prêtent-ils , fans répugnance,
à recevoir le genre d'éducation qu’il fe
plaît à leur donner.
Je ne m’étendrai pas davantage fur les différences
qui féparent l’homme (le cheval d’avec l’écuyer.
Ceux qui liront cet ouvrage, dans fon entier, feront
à même de décider fi j’ai eu tort d’en faire
deux claffes. Cependant je ne puis m’empêcher de
faire obferver que, fi l’écuyer eft celui qui prépare
à l'homme de cheval le théâtre fur lequel ce dernier
fait parade de fori fçavoir,donc l’écuyer eft
créateur en cette partie, où le plus habile homme
de cheval n’eft que créature.
Confirmé dans les premiers principes , l’élève
abandonne les éléments pour fe livrer tout entier
au travail. Arrêtons-le un inflànt à l’entrée de cette
nouvelle carrière, premièrement, afin de lui définir
ce qu’on entend au manège, par le mot travail,
& lui donner enfuite les moyens de Soigner l’exécution
des différents airs qui compofent ce travail,
dont la fcrupuleufe régularité fait tout le mérite.
Définition du travail.
Travailler , en terme de manège, c’eft avoir l’art
d’exiger du cheval une certaine manière de fe porter
en avant9f.qui, quoique conforme aux allures
naturelles, quant à la combinaifon tranfverfale des
quatre jambesi^eft cependant tantôt plus mefuréè ,
tantôt plus cadencée, tantôt pliis élevée. On peut
donc aflimiler les allures artificielles du cheval, autrement
fon travail, à la danfe de l’homme. Cette
comparaifbn me parort d’autant moins choquante ,
que les chevaux peuvent varier' leur travail par
l’exécution de plufieurs pas diverfement figurés*
Alo rs , ppur y fuppléer, il eft
: fe porter à gauche, foit qu’ils
’en aillent. Quoique runiver*
3 fon apologie, cependant,
fiance du lefteur le plus feep-
compte des motifs de l’admif