
«’ eft qu’un demi-pli, dans lequel le cheval regarde
feulement d’un oeil dans la volte ; les autres veulent
qu’il faffe le demi-cercle, c’eft-à-dire, qu’il
regarde prefque des deux yeux en dedans de la
ligne. Il faut convenir que dans l’un & dans l’autre
p l i , le cheval a de la grâce ; mais, félon moi, le
pli en arc, qui n’eft qu’un demi-pli, ne contraint
pas tant un cheval, & le tient plus relevé du devant
que dans celui où il eft plus plié : & dans cette
dernière pofture , la plupart des chevaux font en
capuchonnés, c’eft-à-dire, baiffent trop le nez &
courbent l’encolure.
Ceux qui admettent le demi-pli mènent leurs
chevaux droits d’épaules & de hanches, ou tiennent
feulement une demi-hanche dedans , & ceux
qui veulent un plus grand p li, tiennent les hanches
autant en dedans que la tête, ce qui forme un demi
cercle de la tête à la queue, & c’eft ce qu’on
appelle, les deux bouts dedans. Cette attitude fait
paroître le cheval plus fur les hanches, parce
qu’il eft plus étréci du derrière.
On peut admettre ces différentes poftures, en
les appliquant diverfement, fuivant la différente
ftrufture de chaque cheval. Il fe trouve peu de
chevaux bien proportionnés de tout leur corps ;
les uns font trop courts de reins, & les autres trop
longs de corfage.
Ceux qui font bien proportionnés, c’eft-à-dire ,
ni trop courts ni trop longs de reins, doivent être
menés la demi-hanche dedans. Pour cela , on tient
la hanche de dehors un peu en dedans , enforte
qu’au lieu que les hanches loient tout-à-fait droites
fur la ligne des épaules, le pied dë dehors de
derrière doit fe pofer fur la place de celui de dedans
, ce qui fait que la moitié des hanches fe
trouve en dedans ; 6c c’eft-là ce qu’on appelle proprement
la demi-hanche dedans. Cett^ pofture' eft
très-belle 8c convient à merveille aux chevaux bien
çioulés 6c qui portent beau d’eux-mêmes.
On doit tenir les chevaux courts de reins, droits
d’épaules 8c de hanches avec un demi-pli feulement
, qui les faffe regarder d’un oeil en dedans ;
car fi on les mettoit dans une pofture plus raccourcie
, en les pliant trop 6c leur tenant les hanches
dedans, ils feroient trop contraints , 6c ils n’au-
roient pas un beau mouvement d’épaule ; parce
que la plupart des chevaux de cette ftruéiure retiennent
ordinairement leurs forces, 6c par confé-
quent il faut leur donner un paffage plus libre 8c
plus avancé qu’à ceux qui diftribuent naturellement
leurs forces.
Dans le paffage les deux bouts dedans , la tête
eft placée fort en dedans, 6c les hanches font mifes
autant en dedans que la tête ; en forte que le cheval
eft arrondi de toutfon corps & forme un demi-
cercle. Cette attitude a été inventée {pour raccourcir
8c faire paroître fur les hanches les chevaux qui
font trop longs de corfage 6c d’encolure, 6c qui
n’auroient pas tant de grâce , 6c ne pourroient pas
f i bien fe raffembler, fi on les menoit tout-à-fait
d’uiiô pifte. Cette pofture n’eft autre chofe que la
croupe au mur-renverfèe , c’eft-à-dire , qu’au lieu
de faire aller un cheval de côté la croupe au mur
avec les épaules en dedans du manège , dans les
deux bouts dedans , on met les épaules vis-à-vis
du mur 6c la croupe vers le centre , en forte qu’il
va prefque de deux piftes.
Après avoir examiné laquelle des trois poftures
! ci-deflus convient mieux au cheval , fuivant fon
| naturel 6c fa ftruéiure , il faut enfuite régler la ca-
! dence de fon air. On doit entendre par la cadence
du paffage d’un cheval, un mouvement de trot
raccourci ,-/outenu du devant, 8c continué d’une
mefure égale fans le retenir ni le preffer trop. Ce
mouvement, qu’il eft aufîi difficile de donner à un
cheval que de l’y entretenir en marchant, dépend
de l’accord des aides du cavalier, 6c aufîi de la
foupleffe 8c de l’obéiffance du cheval ; c’eft pourquoi
il ne faut point paffager un cheval dans une
jufteffe fi recherchée, qu’auparavant il ne foit af-
foupli de tout fon corps 6c réglé au piaffer dans les
piliers. Cette pratique eft le modèle du beau paffage
; 6c quoiqu’un cheval foit affez avancé pour
lui demander des leçons de jufteffe , il ne faut jamais
fe départir des premières leçons , dans lef-
quelles on ne fauroit trop le confirmer. Il faut donc
toutes les fois qu’on morne un cheval, quelqu’a-
vancé qu’il fo it , de trois reprifes, lui en demander
du moins une l’épaule en dedans , fuivie de la
croupe au mur , 6c quelquefois même fuivant J’oc-
cafion , le remettre au trot.
Pour entretenir un cheval dans ce beau mouvement
de paffage, que produit l’aélion de l’épaule
libre , foutenue 8c également avancée , il faut faire
attention à fon naturel 6c à fa force. Les chevaux,
par exemple , qui retiennent leurs forces , retiennent
aufli par conféquent l’aâion de l’épaule. Ils
doivent être moins afîùjettis , 6c même lorfqu’ils fe
retiennent trop par malice ou autrement, il faut
les chaffer vigoureufement des deux jambes, 6c
quelquefois des deux éperons , laiffant pour quelque
temps l’ordre limité de la jufteffe du paffage,
afin de leur rappelier 6c de leur maintenir la crainte
8c l’obéiffance qu’ils doivent avoir pour les aides
8c pour les châtiments du cavalier : ceux au contraire
qui, par leur timidité naturelle, s’abandonnent
fur la main, doivent être plus raccourcis , tenus
plus enfemble, 8c plus foutenus de la main ,
que déterminés des jambes 6c des jarrets ; avec ces
précautions, on maintiendra 8c les uns 6c les autres
dans leur véritable air. £
Lorfqu’on change de main au paffage , il faut
que ce foit de deux piftes fur une ligne oblique, 8c
que la moitié des épaules aille avant la croupe ; en
forte que la jambe de devant de dehors foit fur la
ligne de celle de dedans de derrière; 6c afin qu’il
demeure dans l’équilibre 6c dans la balance entre
les deux talons, il ne faut pas qu’il faffe un feul
temps pour la peur de la jambe de dehors du ca-
I valier , que celle de dedans ne lui permette. Il
P A S
faut pour cela fçavoir fe fervir à propos de fa main
& de fes jambes.
Dans le paffage des deux piftes , le cheval doit
faire autant de mouvements avec les pieds de derrière
qu’avec ceux de devant. Il arrive fouvent
ciu’un cheval arrête les pieds de derrière en une
place, pendant .que ceux de devant dérobent le
terrein, en faifant deux ou trois pas fans que le
derrière accompagne : on appelle ce défaut dévui-
derde l’épaule. Un autre défaut encore plus grand
que celui c i, c’eft lorfqu’il arrête les pieds de devant,
8c que ceux de derrière continuent d’aller,
ce qu’on appelle s’acculer , s’entabler. Comme la
vue du cavalier eft fur la pofture de la tete 6c du
col j & fur l’aélion des épaules , il lui eft plus aifé
de proportionner les mouvements que le cheval
fait avec les pieds de devant, que de tenir la croupe
6c les pieds de derrière dans une jufte égalité^: il
faut pourtant acquérir la facilité de l’un 6c de 1 autre,
afin de remédier à temps 6c promptement a ces
défordres ; ce qui dépend de la diligence de la
main 6c de la finefîe du talon.
Il faut fe reffouvenir encore qu’une des aides les
plus fubtiles , c eft de faire paffer librement l’épaule
6c le bras de dthors du cheval par-deffus celui
de dedans , en paffageant de deux piftes. Pour
bien prendre ce temps , dit le favant M. de la
Broue , il faut fentir quel pied pofe à terre 6c quel
pied eft en l’a ir, 6c tourner la main de la bride dans
le temps que le pied de devant du côté-qu’il va Ou
qu’il tourne eft en l'air 6c prêt à retomber, afin
qu’en levant enfuite l’autr&pied de devant, il foit
contraint d’avancer l’épaule 6c le bras de dehors,
en le chevalant par-deffus celui de dedans. Il faut,
ajoute-t-il, une grande facilité d’aides pour bien
prendre ce temps ; car fi on tourne la main dans
le temps que le cheval a le pied de dedans trop
haut, au Heu d’élargir l’épaule 8c Sa jambe de dehors,
c’eft celle de dedans qui s’élargit, 8c fi on
tourne la main lorfqu’il pofe le pied de dedans à
terre,il n’a point affez d: temps pour chevaler librement
l’épaule 6c la jambe de dehors.
Il eft bon de remarquer que des trois poftures
dont nous venons de parler, 6c dans lefquelles on
peut mener un cheval ail paffage , il y en a deux
qui ne peuvent être admifes que . dans les bornes
d’un manège limité, 6c pour le plaifir de la carrière :
ce font celles de la demi-hanche 6c celle des deux
bouts dedans. Mais lorfqu’on tient un cheval dans
un pas noble 8c relevé , foit à la tête d’une troupe,
foit en des jours de revue , de fête , ou de parade ,
il ne faut point lui demander ce manège d’école ,
mais le tenir droit d’épaules 8c de hanches , avec
un demi-pli feulement du côté vers lequel il marche
, pour lui donner plus de grâce dans fon devant.
( V, Airs ).
PASSAGER, promener , mener un cheval au
pas , au trot. Paffager un cheval fur les voltes , paffager
la volte. Quelques-uns difent pafféger un
I cheval, mais paffager eft en ce fens le mot ordi*
naire.
PASSÉGER , c’eft mener un cheval ail pas ou
au trot fur deux piftes , le faifant marcher de côté ,
en forte que les hanches tracent un chemin paral-
: lèle à celui que traceront les épaules. 11 n’y a pas
longtemps qu’on paffège un cheval au trot, 8c le
mot de pafféger fignifioit promener un cheval au
pas de deux piftes , entre deux talons. On dit aufîi
pafféger 8c promener un cheval. On paffège un
cheval en droite ligne 8c fur les voltes. En ce fens
il eft moins ufité que paffager. On paffège un che-
' val fur deux lignes droites le long d’une muraille
ou d’une haie. On le paffège aufîi de fa longueur
fur les voltes, le faifant marcher de côté dans un
rond alentour du centre, en forte qu’il regarde
dans la v o lte , 6c que la moitié de fes épaules marche
avant la croupe. Des deux façons, il faut que
le cheval, en paffégeant chevale extrêmement *
c’eft à-dire que la jambe de dehors de devant
croife ou enjambe beaucoup fur l’autre jambe de
devant à tous les féconds temps. Au paffège du
- pas 6c du trot le mouvement du cheval eft le même,
mais i’un eft plusvîtej que l’autre. Paflege p arle
droit eft un manège peu ufité en France , mais
beaucoup en Italie 8c encore plus en Allemagne.,
On choifit pour cela un cheval qui foit fans ardeur,
mais qui ait beaucoup de mouvement. En
le conduifant par le droit au pas ou au tro t, on lui
apprend à lever deux jambes enfemble , une de
celles de devant 6c une de celles de derrière, en
croix de faint André. En mettant à terre les deux
qu’il avoit en l’air, il relève alternativement les
deux autres enfemble , 6c les tient longtemps en
l’air , en telle forte qu’à chaque temps il ne gagne
pas un pied de terrein en avant. La beauté du
paffège confifte à tenir longtemps les jambes élevées
en l’air. Le mouvement des jambes à ce paffège
eft le même que celui du pas 6c du trot ; car
elles vont dans le même ordre. La feule différence
eft qu’au paffège par le droit, elles font plus longtemps
foutemies en l’air. Les chevaux qui font cette
forte de manège 6c les piaffeurs, font propres pour
un carroufel, ou pour quelque cérémonie publique.
La différence entre piaffer 6c faire un paffège,
confifte en ce que les chevaux piaffent naturellement
, 6c ne foutiennent pas fi longtemps les jambes
en l’air qu’au paffège par le droit. J] faut un fi
grand art pour le paffège , qu’on eft deux ou trois
ans à dre fie r un cheval à ce manège, 6c de fix chevaux
, c’eft beaucoup fi deux y réufliflent.
PEC , en vieux françois, fignifioit un mauvais
cheval.-
PESADE, ou pofade, félon Guillet, c’eft le premier
mouvement du cheval , lorfqu’il lève les
pieds de devant fans remuer ceux de derrière. C ’eft
j la première leçon qu’on donne aux chevaux pour
manier à courbettes 6c aux autres airs relevés. Le
cheval ne fait point de temps avec les hanches ,
avant que de mettre à terre les jambes de deyant :