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liers fe raflgeoient dans la carrière entre la lice &
l’échafaut des princes , éloignés de quarante pas
l ’un de l’autre ; & là armés de toutes pièces & l’épée
à la main , ils attendoient le Ton des trompettes
pour partir; enfuite baiffant la main de la bride &
levant le bras de l’épée, ils partoient avec violence
l ’un contre l’autre, & en paffant, ils fe dônnoient
un coup d’eftramaçon fur la face en tirant un peu
du côté gauche; 6c au même endroit d’où fou ad-
.verfaire éto\t parti , on prenoit une demi-volte ,
8c on repartoit ainfi jufqu’à trois fois. Après la
troifième atteinte , au lieu de paffer outre pour aller
reprendre une autre demi-volte , on tournoit
départ 8c d’autre fur les voltes d’une pifte vis-à-vis
l’un de l’autre, en fe donnant continuellement des
coups d’eftramaçon, avec une a&ion v iv e , 8c on
continuoit jufqu’à la .troifième vólte : il$ s’en retournoient
après d’où ils ctoient partis, faifant mine
d’aller reprendre une autre demi-volte , 8c clans le
même inftant, deux autres cavaliers venoient remplir
la place 8c exécuter la même chofe.
Le connétable de Montmorenci fe rendit très-
célèbre dans cet exercice, il feroit à fouhaiter qu’il
fût encore en ufage, puifque c’eft un véritable manège
de guerre, qui apprendroit à fe fe rv ir , tant
de l’épée, que du piftolet ; d’autant plus qu’il n’eft
nullement dangereux , les coups d’épée pouvant
lé donner au-deffus de la tête par. oppofition, 8c de
même du piftolet, en le tirant le bout en haut.
De toutes les courfes qui étoient anciennement
en ufage dans les tournois 8c dans les caroufels ,
on n’a retenu dans les académies modernes que
les courfes de têtes 8c de bague.
Courfe. des Têtes.
Les allemands ont pratiqué cet exercice ayant
les françois : les guerres qu’ils avôient avec les
turcs y ont donné1 occafion : ils ' s’exerçoient à
courre des figures de têtes de turcs 8c de mores ,
contre lefquèlles ils jettoiem le dard 8c tiraient le
piftolet, 8c en enlevoient d’autres avec- la pointe
de l’épée , pour s’accoutumer à recourir après les
têtes de leurs camarades, que les foldats turcs
enlevoient, 8c pour lesquelles ils avoient une ré-
compenfe de leurs officiers.
On fe Sert dans la courfe des têtes, de la lance ,
du dard , de l’épée 8c du piftolet.
La lance eft compofêe de la flèche, des aîles , de
la poignée 8c clu tronçon. Sa longueur eft d’environ
fix pieds.
Le dard eft une forte de trait de bois dur, long
d’environ trois pieds, pointu 8c ferré par le bout ,
il y a dans un endroit du bois de petits boutons.de
fer pour marquer l’endroit où on doit le tenir, afin
qu’il foit en équilibre.
Dans une courfe bien réglée , îî y a ordinairement
quatre têtes, qui font toutes de carton. La
première, eft celle de la lance , qui eft pofée fur
une efpèce dè chandelier de fer attaché au mur ou*
à un pilier du manège : ce chandelier eft mobile
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& tourne fur deux pitons ; il doit être long d#
deux pieds , 8c élevé à huit pieds de terre.
La fécondé eft une tête de Médufe, plate 8c
large d’un pied, plus ou moins , appliqué fur une-
forte planche un peu plus grande, 8c on attache
cette planche au haut d’un chandelier de bois, qui.
doit être élevé de terre de cinq pieds, ou bien on
la place au-deffus de la barrière.
La troifième tête eft celle du More ; on la pla~e
de même que celle de Médufe , au haut d’un chandelier
de bois de même hauteur , ou au-deffus de
la barrière.
La quatrième tête eft celle de l’épée, qui doit
être pofée à terre fur une petite éminence à deux
pieds 8c demi du mur ou de la barrière.
11 faut placer les têtes fuivant la longueur du
manège, qui, comme nous l’avons d it, doit être
un quarré long d’environ 12.0 pieds, 8c large de
3é. Cela fuppofé , la tête de la lance doit être placée
aux deux tiers de la courfe, c’eft-à-dire , à 8o
pieds du coin du manège,, où on prend la première
demi-volte.
La tête de Médufe doit être placée à 5 pieds du
mur, du même côté que celle de la lance , 8c à
la moitié-du manège , fi le lieu de la courfe eft
fermé de mur; mais lorfqu’il no-l’eft que par une
barrière on la pofe fur cette b a r r iè r e d e même
que la tête du More, qui fe place vis-à-vis cle celle
de Médufe de l’autre côté du manège.
La tête de l'épée fe met à terre du côté de celle
du More , à deux pieds 8c demi du mur , 8c à 40
pieds du coin où on finit la courfe.
Quand on fe fert du? piftolet , on attache un carton
à la muraille à hauteur de la tête d’un homme
; à cheval ; mais quelques-uns tirent fur la tête du
More , au lieu de fe fervir du dard ; le piftoletr
étant plus utile que cet inftrument.
Une chofe très-difficile dans la courfe des têtes,
c’eft de faire de bonne grâce la levée de la lance
il faut pour cela fe placer à trois longueurs de cheval
au defiùs du coin où on doit commencer la
première demi-volte, tenir quelque temps le cheval
droit dans une place , la lance dans la main
droite , 8c pofée fur le m lieu de la cuiffe , ce
qu'on appelle la tenir en arrêt, la pointe de la lance
haute, un peu parïchée en avant , au-deftùs de
' l’oreille droite du "cheval.
Avant que de partir au petit galop , qui d-ou
être uni 8c raffemblé, il faut commencer par lever
le bras de la lance , tenir le doigt indice étendu le1
long de la poignéeVplacer le coude à la hauteur’
de lepaule , & depuis le coude jufqu’au poigner ,•
-le bras placé, droit en avant, enforte que de l’épaule
au coude, & du coude âu poignet, cela’
forme un angle droit ; car fi la main de la lance
étôit vis-à-vis de )a tête , la lance brideroit le vi-
iàge , & fi la main 8c le bras étoient placés trop
haut ou trop bas , cela feroit de mauvaise grâce.
La lance étant ainfi placée dans la demi-volte ,
il faut enfuite obferver les mouvements néceffaires
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pour bien faire la levée de U lance en allant à la
tête. Il y en a quatre principaux. Le premier temps
fe fait en baiffant le doigt indice 8c un peu le poignet,
8c levant auffi un peu le coude , fans que la
pointe de la lance varie ni s’écarte ; il faut enfuite
baiffer infenfiblement le bras à côté du corps, juf-
qu’anprès de la hanche ce qui fait le deuxième
temps ; 8c là en ouvrant un peu le poignet en
dehors, il faut relever le bras à côté du corps ,
fans le porter ni en avant, ni en arrière , « le
tenir étendu jufqu’à ce que la main foit arrivée au-
deffus 8c à côté de la tête , ce qui fait le troifième
temps ; le quatrième temps eft de tourner les ongles
du côté de la tê te , 8c de defeendre infenfi-
blement la lance dans la pofture où,elle étoit avant
que de commencer la levée, c’eft-à-dire , le coude
à-la hauteur de l’épaule.
La courfe de la tête de la lance fe divife en trois
parties. JDans la première, on mène ,1e cheval au
petit galop depuis le coin jufqu’au tiers delà ligne,
on échappe enfuite le cheval en baiffant in-
fenfiblement la pointe de la lance jufqu a la tête
qu’il faut enlever d’un coup d’eftocade , c’eft-à-
dire, allongeant un peu les bras pour la détacher
de defftis le chandelier.
Depuis la tête jufqu’au coin, on remet fon cheval
au petit galop, en levant le bras pour faire
■ voir la tète au bout de la lance.
On quitte enfuite la lance , 8c on prend à l’endroit
ou l’équilibre eft marqué., un des deux dards
qui doivent être placés fous les cuiffes , 8c retenus
par les genoux du cavalier, les pointes du côté de
la croupe , de façon qu’ils fe croifent. IL faut en-
fuite porter le dard en avant le bras libre, étendu
8c élevé un peu plus haut que la tête , en obfer-
vant-que la pointe du dard foit du côté du coude ,
8c que lg bout qui eft à l’oppofite de cette pointe
foit un peu plus haut 8c au-deffus de l’oreille gauche
du cheval, le tenant dans l’équilibre 8c le bras
ouvert: dans cette pofture, on tourne par le milieu
du manège pour venir à la tête de Médufe,
on tourne le dard par-deffus la tête, pour préfen-
ter la pointe 8c le lancer ; 8c il faut un peu retirer
le bras en arrière., afin de le darder avec plus de
force."
Après avoir jetté le dard, il faut tourner le cheval
pour aller à l’autre muraille , 8c en prenant la
'.troifième demi-volte dans le coin du côté de la'
tête de l’épée, faire avec le dard le même mouvement,
-8c venir le lancer delà même manière
qu’on vient de le dire pour la Médufe. Cette tête
.fe court auffi au piftolet.
Il faut enfuite tourner fon cheval, 8c en arrivant^
l’autre muraille , on commence la quatrième
demi-volte, en tirant l’épée de bonne grâce par-
deffus le bras gauche, 8c non par-deffous le poignet
, parce qu’on peut s’eftropier en la tirant de
cette manière. On doit la tenir haute 8c droite, le
bras libre, étendu 8c élevé au-deffus de fa tête , 8c
la faire briller en la remuant; & au tiers de la
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courfe, il faut partir à toutes jambes jufqu’à la tête,
en fe baiffant le corps fur l’épaule droite du cheval
, faire entrer l’épée de tierce ., la relever de
quatre , 8c la placer haut pour faire voir la tête au
bout de la courfe.
Il y a des chofes effentielles à obferver dans la
courfe des têtes , qui font de ne jamais galoper
faux ni défuni, de ne point laiffer tomber fort
chapeau, 8c de ne point perdre fon étrier : fi l’un
de ces cas arrive, on perd la courfe , quand même
on auroit pris les têtes, c ’eft pourquoi avant que
de commencer la courfe , il faut s’aftèoir jufte dans
la felle, ferme dans fes étriers & enfoncer fon chapeau.
Il faut auffi tenir les -rênes-un peu plus longues
dans les courfes que dans les manèges renfermés,
afin que le cheval ait la liberté de s’étendre,
fans pourtant trop abandonner l’appui, afin
que le cavalier 8c le cheval foient plus affùrés dans
la courfe.
Courfe de la bague.
Cet exercice n’étoit point en ufage chez les anciens
; il fut introduit lorfqu’on fit, par galanterie
8c par complaifance, les dames juges de ces exercices
; 8c les prix qui étoient auparavant militaires ,
furent changés en bagues, qu’il falloit enlever à la
pointe de la lance pour remporter le prix, ce qui
donna occafion à la courfe de bague.
La bague doit être placée aux deux tiers de la
courfe, comme la tête de la lance; elle doit être
à la hauteur du front du cavalier, au-deffus de
l’oreille droite du cheval.
La potence eft un bâton rond 8c long d’environ
deux pieds, au bout duquel pend le canon où eft;'
attachée la bague. Cette potence doit être plus
élevée que la bague de 7 à 8 pouces , de crainte
que dans la courfe on ne bride la potence, cela
veut dire en terme de courfe , la toucher avec la
tête ou avec la lance, ce qui eftropieroit un cavalie
r , comme il eft quelquefois arrivé.
A l’égard de la levée de la lance, on la fait de
la même manière que nous l’avons expliqué en
parlant des têtes : la feule différence eft , que dans
la courfe de bague , on ne donne point de coup
d’eftocade, comme à la tête.
Il faut encore bien obferver , comme nous l’avons
déjà dit, de ne commencer à baiffer la pointe
de la lance qu’au tiers de la courfe, en échappant
fon cheval au grand galop, fans remuer la tête ni
les épaules , tenant le coude haut, afin que le tronçon
de la lance ne touche ni au bras ni au corps ;
mais que la main feule foutienne la lance ; il ne
faut pas non plus que la lance foit trop croifée en
dehors du côté de l’oreille gauche du cheval, elle
doit être au contraire au-deffus de l’oreille droite;
parce qu’autrement, le vent delà courfe lebranle-
roit, 8t lui feroit perdre la ligne de direction. Le
b ut, ou le point de la courfe, doit être au bord
d’en haut de la bague fur la ligne du canon, ce qui