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Du Nerf de la jambe.
Nous avons obfervé dans le premier chapitre ,
que derrière 8c le long du canon , il règne un tendon
qu’on a appellé jufqu’à préfent nerf, & dont
nous conlerverons la dénomination. C ’eft une partie
eflentielle pour la bonté de la jambe. Voici les
qualités qu’il doit avoir ; il faut qu’il foit gros, fans
dureté ni enflure, détaché & éloigné de l’os du canon
fans aueune humeur ni groflèur entre-deux ,
qui fafle paroître la jambe ronde.
Les nerfs qui font gros fans dureté ni enflure,
font les meilleurs, parce que les chevaux qui ont
îe nerf menu fe ruinent bientôt, bronchent facilement
, & les jambes s’arrondirent par le moindre
travail. Il faut prefler le nerf avec la main , en la
coulant le long de cette partie , & fi le cheval marque
quelque douleur , on doit prendre garde qu’il
n’y ait quelque dureté ou enflure ; ces duretés empêchent
le mouvement du nerf. Il faut de même
couler la main entre le nerf & l’os , pour voir s’il
n’y a point auffi des duretés ou des glaires mouvantes
qui arrêtent la main, 8c qui échappent fous
le doigt. ( '
Le nerf doit être détaché & ’ éloigné de l’os ; ce
qui forme une jambe plate & large, qui efl la meilleure.
On appelle jambes de boeuf ou de veau ,
celles qui ont le netjf peu éloigné de l’os. Ces fortes
de jambes ont ordinairement le nerf menu , & un
médiocre travail fait tomber fur cette partie une
humeur qui s’y endurcit 8c arrondit la jambe en
peu de temps. -
Il fe trouve encore un défaut dans le nerf, mais
qui efl rare : c’eft lorfqu’étant aflez gros par en bas,
il va trop en diminuant fe perdre dans le genou ;
c ’eft un figne de foiblefle dans cet endroit. On appelle
ce défaut nerf failli.
Lorfque le nerf dont nous parlons eft bien détaché,
on voit entre ce nerf 8c le canon, en dehors
& en dedans , un autre petit nerf, qui eft un ligament
en forme d’y grec rçnverfé , qui unit l’os du
canon avec le boulet, ce qui augmente beaucoup
la beauté & la bonté de la jambe.
Du Boulet.
Le boulet doit être nerveux & grès à proportion
de la jambe, fans aucune enflure ni couronne.
Un cheval qui a le boulet menu l’a ordinairement
trop flexible, ce qui le rend fujet aux molettes
; & il ne peut pas fupporter un long travail.
C ’eft pourtant une belle qualité pour un cheval de
manège, que d’avoir le boulet un peu flexible, les
leflbrts en font plus doux 8c plus lians ; 8c dans un
manège les chevaux ne s’ufent pas comme ailleurs,
leur travail étant réglé. Un cheval de grand fei-
eneur , qui n’eft deftinè que pour les jours de
revue 8c de parade , eft encore à eftimer, lorfqu’il.
a la jointure du boulet un peu pliante, par la même
raifon que les mouvements en font plus doux. Mais J
c’eft un grand défaut pour les chevaux de carrofle |
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& de tirage , lorfque le boulet eft trop flexible ;
cela les empêche de reculer 8c de retenir dans les
defeentes.
' Lorfque le boulet eft enflé, c’eft une marque de
jambe fatiguée 8c travaillée, à moins que ce ne foit
par accident, 8c lorfqu’il eft couronné, c’eft-à-dire,
que fans écorchure ni bleffiire, il y a une groflèur
fous la peau qui va en forme de cercle autour du
boulet, c’eft une preuve certaine de jambe ufée
par le travail.
Du Paturon.
Cette partie, pour être bien proportionnée , ne
doit être ni trop courte, ni trop longue. On appelle
les chevaux qui ont le premier défaut, court-jointés,
8c les a,utres fe nomment long-jointés.
Lorfqu’un cheval a le paturon trop court, 8c que
le genou, le canon 8c la couronne tombent à plomb,
on le nomme droit fur jambes , 8c les maquignons
l’appellent cheval huche. Lorfqu’il marche dans cette
fituation , il devient avec le temps bouleté j c’eft-
&-dire, que le boulet fe porte en avant. Généralement
tous les chevaux droits fur jambes, font fujets
à broncher 8c à tomber ; 8c les chevaux court-jointés
deviennent facilement droits , 8c enfuite bouletés,
fi on leur laifle le talon trop haut.
Quand un cheval eft long-jointe, c’eft encore
une plus grande imperfeftion que quand il eft droit ;
car c’eft un figne de foiblefle 8c un défaut de conf-
truélion fans remède. Au lieu qu’à ceux qui font
droits, on peut y remédier par la ferrure , en s’y
prenant de bonne heure. Il y a pourtant quelques
chevaux qui ont le paturon long, mais qui ne le
portent point trop bas en marchant, ce qui marque
de lâ force en cette partie , 8c que la vigueur du
nerf empêche le boulet de fe trop plier. Ces che-
vaux font beaucoup plus commodes au cavalier
qu’ un court-jointé, mais ils fe ruinent plus facilement
que les autres ; ils ne font bons que pour la
parade.
Quelquefois un des côtés du paturon eft plus
élevé que l’autre. Quand ce défaut n’eft pas confi-
dérable, il peut fe raccommoder par la ferrure.
Le poil du paturon doit être couché 8c uni. Il
faut prendre garde qu’il ne foit point hérifle près
de la couronne, ce qui fignifieroit qu’il y auroit
une gratelle farineufe qu’on appelle peignes, 8c qui
tient la couronne enflée.
De la Couronne.
Il faut que la couronne foit auffi unie que le paturon
, 8c qu’elle accompagne la rondeur du fabot
tout autour du pied; car fi elle furmontoit, 8c
qu’elle fût plus élevée que le pied, ce feroit une
marque , ou que le pied feroit deflféçhé, ou la couronne
enflée.
La couronne eft l’endroit où les chevauxXç donnent
des atteintes.
L’atteinte eft un coup qu’un cheval reçoit par un
autre cheval qui le fuit de trop près, ou bien qu’il
fè
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■ Sonne lui-même, en s’attrappant les pieds de de-
vanravec ceux de derrière. Quelquefois aufli les
chevaux qui font cramponnés ou ferrés à glace s’at-
trappent le defliis de la couronne avec le crampon
-ou le clou de glace , 8c y , font un trou qui caufe
Souvent de grands défordres.
Du Pied en général & de fes parties.
Il faut examiner avec grand foin toutes les parties
du pied ; car c’ eft l’endroit qui porte tout le
corps du cheval. Le pied doit être proportionné à la
ftruéhire du corps 8c des jambes , ni trop grand ,
ni trop petit. Les chevaux qui ont de grands pieds ,
font pour l’ordinaire pefans 8c fujets à fe déferrer ;
6c ceux qui ont le pied trop petit, l’ontfouvent
[ douloureux, 8c les talons fe ferrent 8c deviennent
I encaftelés.
La forme du fabot, qui eft la partie extérieure
>qui entoure le pied, doit être prefque ronde , un
■ peu plus large en bas qu’en haut, ayant la corne
luifapte , unie 8c brune.
La corne blanche eft ordinairement caftante,
8c les rivets des clous du fer la font facilement
éclater.
Lorfque la corne n’eft pas unie, 8c qu’elle eft
élevée dans quelques endroits , en forme de cercle
autour du fabot ; c’eft le figne que le pied eft
altéré, fur - tout fi les cercles entourent tout le
pied.
. Quand une partie de la corne du fabot eft tombée
par quelque accident, il s’en forme une nouvelle
, qu’on appelle avalure ou quartier-neuf ; ce
qui eft aifé à connoître , en ce que cette partie eft
d’une corne molle 8c raboteufe , qui ne revient
prefque jamais fi folide que l’autre , 8c par confé-
quent rend cette partie foible.
Lorfque le fabot eft trop large par en bas , 8c
que les quartiers s’élargiflent trop en dehors, on
appelle ces fortes de pieds, pieds plats ; défaut
confldérable , qui j fait que la fourchette porte à
terre, & fait fouvent boiter le cheval. Quand au
contraire les quartiers font trop ferrés, que le fabot
s’étrécit trop auprès de la fente de la fourchette ,
8c qu’il ne fuit pas la rondeur du pied, c’eft encore
-un grand défaut, qu’on appelle, cheval encaflelé.
Dans cet accident, les quartiers preflent 8c ferrent
le petit pied , qui, comme nous l’avons déjà d it,
eft un os fpongieux, renfermé dans le centre du
pied , entouré de chair qui communique la.nourri-
tùre à toutes les parties du pied. Alors le petit-
, qui eft le feul endroit fenfible de cette partie,
n étant point à fon aife , 8c étant trop prefle , cela
y caufe de la douleur, fait boiter le cheval. Les
chevaux encaftelés font encore fujets à avoir des
ftymes, qui font des fentes dans ! un des quartiers
du pied, qui régnent quelquefois depuis la couronne
jufqu’au fer.
Après avoir examiné le pied à l’extérieur, il faut
■ Equitation, Efcrime & Danfe.
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R enfuite le lever & en examiner les parties de dedans
, qui font la fourchette 8c le fabot.
La corne de la fourchette doit être bien nourrie,
■ fans pourtant être trop grofle ni trop large, ce
qu’on appelle , fourchette grajje : défaut qui arrive
ordinairement aux chevaux qui ont le talon bas;
8c alors la fourchette portant contre terre, le cheval
boite néceflairement. De même fi la fourchette
eft trop petite 8c deflechée , c’eft. le défaut des chevaux
encaftelés, 8c une marque que cettejpartiè eft:
privée de nourriture.
La foie j qui eft la corne fituée dans le creux du
pied, entre les quartiers 8c la fourchette, doit être
forte, épaifle, point deflechée, ni affoiblie par
aucun infiniment. Lorfque le dedans du pied n’eft
pas creux, 8c que la foie eft plus haute que la corne
du fabot, c’eft une défeéluofité qu’on appelle,
pied comble. Ces fortes de pieds, non-feulement
font difficiles à ferrer, mais ne valent rien pour la
fe lle , ni pour le carrofle ; ils ne font tout au plus
bons que pour la charrue.
Il y a encore d’autres accidents qui arrivent au
pied : nous en parlerons dans la troifiéme partie.
De là beauté & des déf auts des parties extérieures du
Corps.
Avant que d’entrer dans le détail de la beauté
8c des défauts des parties extérieures du corps d’un
cheval, il eft bon de fe rappeller ic i , que ce corps
eft corapofé, fuivant la divifion générale que nous
en avons faite dans le premier chapitre, des reins,
des rognons , des côtes, du ventre 8c des flancs.
Des Reins.
Les reins font, fuivant la dénomination commune
, la partie fupérieure du corps , depuis le ga-
rot jufqu’à la croupe.
La force des reins eft une chofe eflentielle pour
la bonté d’un cheval. Il faut pour cela qu’ils foient
■ un peu courts, 8c que l’épine du dos foit ferme ,
large 8c unie.
Plus un cheval eft court de reins, plus il raftem-
ble fes forces ; il galope mieux fur les hanches,
parce que fes forces font plus unies; mais comme
fes mouvements fe font près de la felle , ils font
incommodes au cavalier. Il ne va jamais fl bien le
pas que celui qui a les reins longs ; parce que ce
dernier étend les jambes avec plus de facilité ;
mais aufli celui qui a les reins trop longs ne galope
pas fi bien , fes forces étant défunies, ce qui l’empêche
de fe raflembler.
Lorfqu’ un cheval n’a point l’épine du dos unie,'
8c qu’il a le dos bas 8c enfoncé , on le nomme
cheval enfellé. Ces fortes de chevaux ont pour l’ordinaire
un bel avant-main , l’encolüre fort relevée ,
la tête placée haut, 8c couvrent leur cavalier : ils
font aflez légers 8c vont commodément pendant;